Les mauvaises fréquentations

ça sent l’orage - on entend même ses premiers rugissement derrière les montagnes. Il faut faire vite avant que la pluie n’arrive et efface la piste : la signature des sabots ferrés dans la boue trace encore un chemin bien défini. Makoyepuk peut même y lire les foulées ( le rythme de course d’un cheval épuisé ) et ne peine pas non plus à découvrir que les cavaliers sont au nombre de deux. Un ami a rejoint sa cible en cours de route il semblerait, cavalier moins expérimenté et un peu plus lent ( de l’argent facile ). L’ennemi, lui aussi, à ralenti à la rencontre de ce nouvel arrivé.
Au pas, ils ont poursuivi leur aventure, s’enfonçant dans les bois des Beaver - peut-être en espérant y trouver un abri, ou, qui sait, un logis endormi. D’ailleurs, une balle perdue sur ses terres ne le chagrinait pas le moins du monde. Il espère presque l’escarmouche, si ça peut emporter au passage la scierie où l’un de ses propriétaires. Peut-être même qu’il ferait bien de lancer un feu là-bas, histoire de déloger les fugitifs et de se débarrasser du cancer de ces terres - pourtant, rendre des comptes à Clayton ou Jacob ne l’inspire pas vraiment. C’est donc en soupirant qu’il mène sa monture jusqu’à la petite usine désertée à cette heure de la nuit, ravi de débusquer l’ennemi, mais triste de ne pouvoir en faire plus.  

Au loin, il aperçoit la lumière d’un feu ou d’une lampe à huile - quelques rires gras semblent accompagner les flammes dans leur danse : ça s’amuse, ça chante et sa s’esclaffe, comme s’ils étaient déjà en terrain conquis. Tant mieux pour lui, il ne réside dans la fierté et l’oublie de l’adversité que la promesse d’une chute douloureuse. Ils peuvent bien s’amuser si cela leur fait oublier que le danger rôde.
Avant de passer à l’action, le chasseur de prime laisse son cheval filer, histoire d’épargner à la vieille carne une fusillade qui n’est plus de son âge. Puis, arme en main, il se glisse entre les restes de troncs découpés, petites collines qui vallonent les alentours du bâtiment. Véritable labyrinthe, ses pas résonnent pourtant étrangement avec ceux d’un des vagabonds. Chien de chasse lancé vers la battue, il se paralyse en plein mouvement, laissant ses yeux vagabonder dans l’obscurité, cherchant la silhouette d’un ennemi potentiellement mortel.
Mais ce n’est qu’un garçon titubant qui apparaît des ténèbres, pas même armé. Surpris mais pas déçu, Makoyepuk s’élance et vient écraser la cross de son fusil contre le visage de l’inconnu ( Vivant, il lui rapportera une prime plus juteuse ).  — Si tu cries je te tire une balle dans le crâne. “ La petite bête se débat si bien qu’il peine à lui attacher les mains dans le dos. A vrai dire, il n’y parvient pas vraiment...  — Tu vas - “ Il essaye de le maintenir au sol. “ - rester “ Il se débat encore “ bien sage “ Il tente de lui flanquer un coup dans les côtes “ pendant que je vais cueillir ton ami. “