Mae Matthews feat @Clyde King

« I’m sick of your shit ! I’m gonna leave n’ never go back with you ! This’s too much ! Don’t wanna heard ‘bout both of you anymore ! » Autour du feu de camp qu’ils avaient monté pour passer la nuit en Louisiane, Mae s’égosillait suite à une conversation animée avec les frères. Ils n’étaient pas d’accord quant au modus operandi du braquage d’une banque et la hors-la-loi s’était vexée devant le refus catégorique de Sean à suivre son idée. Son index accusateur les pointait tour à tour à mesure qu’elle faisait pleuvoir sa colère sur leurs oreilles qui n’avaient rien demandé. « But, yeah, you’ll do better without me right ? » Les mains sur les hanches, elle les narguait, ses yeux défiant leurs regards. « And I’ll do better without you. » C’était faux. « I’ll succeed without you n’ when you’ll see what I can do all by myself you’ll beg me to go back with you ! » Ça aussi, c’était faux. Mais cela arrivait souvent, les crises existentielles de Mae Matthews qui ne supportait pas que l’ont puisse remettre en cause ses idées et donc, la contredire. « Youd’be nothin’ without me ! » Et elle sans eux.

Comme cela lui arrivait parfois, elle était donc partie avec toutes ses affaires, fulminant à leur encontre et bien décidée à reprendre le court de sa vie solitaire. Dans la précipitation de son énervement, la jeune femme n’avait absolument pas pensé à prendre sur elle de quoi se payer à manger et un toit pour le soir. Par fierté, elle considérait que cela n’était pas un problème, après tout, elle avait toujours su se débrouiller avant. Elle en était parfaitement capable à présent. Les caprices de Matthews étaient monnaie courante, elle s’attendait à ce que les frères la supplient de revenir, mais c’était rarement le cas. La plupart du temps, elle revenait au bout de quelques jours, sans rien ajouter de plus et reprenait la place qui lui était due. C’était un temps où Patterson n’était pas encore là pour rire d’elle. Mae revenait, car la cause qu’elle portait et l’affection qu’elle vouait aux frères étaient bien plus importantes que son ego fragilisé. Mais elle n’en disait rien. Personne n’avait besoin d’entendre une vérité criante.

Ce jour de brouille, elle a donc pris la décision de faire étape dans le saloon de la ville la plus proche. La hors-la-loi pose un billet froissé par le temps (le dernier) sur le comptoir en échange d’un verre de whisky. Lorsqu’elle était en colère, elle privilégiait la boisson bien plus que la nourriture. Reprenant ses vieilles habitudes, elle se met à balayer la salle du regard, à la recherche de celui qui la fera manger (et dormir à l’abri) pour la soirée, avant qu’elle ne parte d’ici. Sait-on jamais si les frères partent à sa recherche, ce qu’elle espère secrètement, sans pour autant se l’avouer. A l’heure qu’il était, ils étaient sûrement en train de rire d’elle en trinquant à leur nouvelle tranquillité. Matthews chasse ces mauvaises pensées qui assombrissent son visage et prend la direction d’un homme seul à une table. Les hommes seuls sont souvent faciles à avoir. Qui boit seul est … très seul. Sur ces grandes déductions, elle prend place à sa table (elle avait remarqué qu’il avait une bouteille avec lui et cet argument avait été décisif dans son choix.) et c’est lorsque leurs regards se croisent qu’elle se dit qu’elle a vraiment eu du nez. Il n’est pas si déplaisant à regarder. Elle lui sourit en posant son verre sur la table. « You goin’ to drink this alone ? » Mae le regarde alors en se reprenant pour lui tendre la main. « ‘k lets start over. My name’s Holly ! I’m pretty sure I’ve seen you before, I’m sorry, that’s why I came, I had to know ! You’re not from here right ? » Elle rit. Sinon, il serait accompagné.

Mae Matthews feat @Clyde King

L’aplomb de l’homme la désarme un instant, il n’aime pas être dérangé. C’est le risque lorsque l’on s’attaque aux âmes solitaires, elles sont parfois égarées. Il doit sûrement en être, de ceux dont plus aucune compagnie n’arrive à faire vivre un sourire au fond des yeux. Elle est un peu comme cela, Mae Matthews au fond, parfois, seule la compagnie de l’ambre maudit l’aide à imaginer des jours meilleurs. Et la douce lumière de l’aurore vient agresser à nouveau ses yeux pour éteindre sa tristesse et raviver l’étincelle de ses espoirs perdus la veille. C’est le désespoir qu’elle lit dans un premier temps dans les yeux de l’homme, celui de ne plus être seul. Elle vient troubler son tête à tête en rompant l’alchimie alcoolémique qu’il avait très certainement instauré avec cette bouteille de whisky. Il a au moins le mérite d’être honnête, mais la hors-la-loi ne perd pas son sourire de façade. Oh si seulement cela pouvait être un peu facile. Si seulement il pouvait simplement lui proposer de s’asseoir tout en la laissant boire à l’œil. En ce jour, tout semble décidé à compliquer sa vie.
Et pourtant, elle arrive à accrocher son regard lorsqu’il prend sa main sans qu’il ne remette un nom sur son visage qui ne lui est pas familier. Elle ne se démonte pourtant pas : « Are you sure ? »
Enfin, l’inconnu se décide à lui laisser une ouverture, infime brèche dans laquelle elle va bien évidemment tenter de s’engouffrer. Alors, lorsqu’elle s’assoit, elle ne perd pas ses vieilles habitudes en le reluquant, faisant passer son regard de fouineuse pour un intérêt non dissimulé. En réalité, ce qu’elle cherche, ce son ses richesses. Une bouteille, des colts qui brillent (certainement quelqu’un de soigneux), il doit avoir assez pour venir passer la soirée seul et payer un peu de compagnie. Discrètement, son œil droit se plisse lorsqu’elle se persuade qu’il y a surement quelque chose derrière cette mine triste qui la provoque.
Il la met au défi, roi plein de misères sans divertissement qu’il est*. Il veut qu’elle lui change les idées dans son royaume de solitude, qu’elle anime la flamme qu’il n’a plus au fond des yeux. Mae n’est pas une prostitué, elle n’est certainement pas douée pour cela, et il lui reste assez de fierté pour ne pas rentrer dans son jeu. Elle s’enfonce donc dans sa chaise, collant son dos au dossier, croisant les pieds sur la table et portant son verre à ses lèvres. Après tout, il lui rendra la tâche plus facile s’il est ivre comme un Polonais. Mae le regarde alors en riant. « Do you really think that I’m the kind of woman who needs to convince man ? » Elle était bien bonne celle là. « Well, we’re gonna have a problem. »

* Un roi sans divertissement est un homme plein de misères - Blaise Pascal