Red droplets on white satin

C’est en toute quiétude que Vano Lovell s’en est allé se balader en ville avec sa dulcinée. Ce matin même, le chasseur de prime l’a aperçu avec une petite blonde trop bien vêtue pour son cavalier. Ils avaient l’air heureux - mais leur bonheur lui importe peu, puisque qu’à dix dollars la tête, il y a de quoi oublier sa morale.

Par bonne mesure, il avait tout de même attendu que la gamine s’en aille - hélas, quand il les avaient vu repartir ensemble, il comprit trop tard que l’arrestation se ferait de toute façon devant madame et qu’il venait de rater une belle occasion d’utiliser la foule ( et donc une multitude de témoins ) pour rendre son travail plus facile. L’idée n’était pas de tuer Lovell ( la justice s’en chargerait bien elle-même ), mais seulement de l’arrêter. Il n’avait pas envie de gâcher une balle pour un homme déjà condamné.


Les sabots de Numees claquent le sol dans un galop pas vraiment soutenu. Il faut dire que celui qu’il traque n’a pas fait l’effort de cacher sa piste, comme s’il ne se doutait pas que sa tête était mise à prix, à moins que ce soit l’audace ( ou l’amour ) qui le rende stupide. Le garçon ne doit de toute façon pas être bien malin pour retourner à sa petite vie après avoir volé un cheval - Makoyepuk le sait, c’est un crime qui coûte cher quand on est pris.

Entre les buissons et les pierres, la jument zigzague. Blotti dans sa couverture colorée, le chasseur de prime ne fait pas non plus pas beaucoup d’efforts pour rester discret. Il faut dire que devant leur poupée, certains ne font plus les braves : ils rendent vite les armes pour éviter à leur jolie fiancée de se retrouver pris entre deux feux. Le job ne sera pas compliqué.
Bientôt, les silhouettes du petit couple apparaissent au loin.

— Vano Lovell ! “ Makoyepuk ne sort pas tout de suite son arme, histoire de ne pas apeurer la bête ( dans la stupeur vient souvent l’erreur : personne n’a envie de dégainer trop vite ). De toute façon, le futur pendu a plutôt l’air de se demander ce qu’un autochtone botté peut bien lui vouloir au milieu de nul part ( le privilège de surprendre les gens à qui il s’adresse l’intriguera toujours ).
Le cheval freine dans la poussière quand il arrive à hauteur du duo. Fouillant dans son veston, Makoyepuk sort un papier froissé dont il connait contenu par cœur ( merci Jacob ), puisqu’il serait incapable de le leur lire. Le biais leur est présenté, histoire de corroborer ses dires. — J’ai été missionné par l’Etat afin de - “ Le cliquetis d’un chien l’interrompt avant même qu'il ait pu citer sa sentence. En bon petit ami qu’il est, Vano cache de son imposante carrure la demoiselle, le canon de son fusil pointé sur l’ennemi.  — J’ai pas bien entendu. T’as dis quoi ? “
— On est pas obligé d’en arriver là tu sais. “ Sous sa couverture, la main de Makoyepuk glisse vers le manche de son colt.

Pas de réponse.
— D’accord. D’accord. J’ai compris. “ A peine a-t-il fini de souffler ces quelques mots que le sifflement d’une balle leur griffe les tympans. Vano s'effondre et le plaid Huron fume, percé d’un trou qui révèle le mauvais coup du chasseur de prime.

Le bas de la robe de madame est toute tachée de sang maintenant que son peut-être fiancé s'agrippe à son jupon et crache comme un goret à l’abattoir. — Il a dégainé le premier. “ Voilà les seules excuses qu’il présente à la petite fiancée. Le voyou expire d’ailleurs sur ces entrefaites - alors, ne craignant plus rien, Makoyepuk descend son cheval et tire une corde de sa selle. ( la mécanique bien huilée d’une méthode de travail forgée par l’expérience ). “ Votre fiancé a volé un cheval. Il était de toute façon en route pour la potence.. “

Les Borden aimait adopter les chats errants, particulièrement si c'était pour les laisser les tâches ingrates et pouvoir avoir les mains libres, et surtout propres. Et Penelope avait dû se faire au fait qu’accompagner sa mad-jeste faire un tour en ville relevait parfois du travail ingrat. C’etait donc avec un anphytrion de compagnie que la jeune femme et son pseudo port de reine, avait pour mission de la journee de verifier que les activites de la famille allaient bon train, en pretextant l’envie de faire un tour dans une librairie pour voir les dernieres nouveautees epiques qui allaient lui tenir compagnie le soir, a defaut de chaleur humaine. Penny avait toujours eu un certain faible pour les enfants, et si au début, graisser les pattes des orphelins pour garder un œil avisé sur les bonnes -ou mauvaises- personnes lui avait donné un haut le cœur. Mais son petit univers n'était plus fait de messes basses derrière un éventail au détour d’une soirée, mais de sang et d’argent qu’il fallait gagner de n’importe quelle façon. Elle veut devenir la femme qu’elle pretend etre, ses etats d’ames de petite fille doivent definitivement s’envoler.

Vano était un de ses train-pattes de bon à rien qu’on avait recruté à la sauvette. Quand Monsieur Borden avait demande qu’on accompagne sa femme -hors de question qu’elle aille en ville toute seule alors que les rivaux grouillaient partout- Vano, soucieux de bien se faire voir histoire de ne pas etre jete a la potence la plus proche, avait vivement accepte. Penny, sachant très bien qu’elle n’allait pas faire route avec un personnage particulièrement intéressant, avait cependant pas -trop- détester son petit périple. Oh bien sûr, il fallait lui dire de garder ses distances avec elle et ses mains dans ses poches: ils ont tous l’habitude de traîner avec des femmes qui sont habitués à son genre de traitement. Mais Madame Borden est une lady -déchue-, et la femme d’un seul fantome. Cependant mise à part cela, Vano avait été relativement correct, n’avait pas essayé de jouer la carte du paternalisme, avec un silence respectueux quand elle discutait avec les autres. Les hommes adorent l’interrompre, surtout quand ils n’ont pas la moindre idée de quoi on parle. Elle n'hésitera pas à avoir un mot pour lui si on lui demande comment il s’est conduit.

Il était en train de tenter de faire un brin de conversation, prétendant s'intéresser aux livres qu’elle avait achetés alors qu’il n’en avait probablement rien à cirer, si tant est qu’il savait lire, quand une silhouette surgit de nul part. La seconde qui suit laisse entrevoir a Penny qu’ils ont a faire a un chasseur de prime, et a un bref haussement de sourcil quand Vano se met immediatement entre elle et l’homme a cheval. Vu l’attitude de l'intéressé, ce n’est probablement pas elle qui est en danger immédiat. Par ailleurs, elle n’a nullement peur, mais elle est visiblement un peu frustrée de ce revirement de situation, elle avait hâte de rentrer pour revoir sa famille, et les combats de coq ne l’intéressent absolument pas.

“Vano, cesse immédiatement," siffle-t-elle, pensant faire figure d'autorité, bien évidemment. “Ne sois pas ridic-”

Le bruit sourd de la décharge lui tire un glapissement de pucelle -et pour cause- alors que la silhouette de son compagnon de route surgit au sol. Les membres crispés autour d’elle, tremblant un peu sous le choc inattendu, elle regarde avec ses yeux énormes, encore plus que d’habitude, Vano pousser son dernier soupire à ses pieds, non sans avoir agripper sa cheville dans un dernier sursaut d’instinct de survie. Il est mort, misérablement.

Alors que le natif, sans trop d'émotions, se justifie néanmoins du sinistre, Penelope le regarde avec la même expression ahurie, restant ainsi pendant deux bonnes secondes, le temps que son cerveau enregistre toutes les informations. Ses petits tremblements finissent par se concentrer sur ses points minuscules, et son visage se ferme petit a petit, glissant rapidement de l’incomprehension a la colere.

“J’ignore pour qui vous vous prenez, monsieur…” Commence-t-elle, en s'avançant vers le chasseur, retirant la main du décédé par un petit coup de pied. Jupons en main, et flamme dans les yeux. “Mais je suis une honnête femme mariée, et ce n’est certainement pas a un voleur de cheval ! Vous allez me faire le plaisir de m’appeler Madame Borden, avant de commettre un nouvel affront.”

Elle se pose face à lui, stoppant son chemin pour rejoindre le cadavre et ainsi toucher ses trois sous. Bien qu’il soit largement plus grand, poings sur les hanches, et le menton haut, elle n’a nul problème à lui tenir tête, et son regard ne trahit pas la moindre peur. Qu’est ce qu’elle risque? C’est un chasseur de prime, tuer une femme qui n’a rien demandé, c’est probablement le pire plan pour son affaire. Si elle meurt, c’est qu’il est stupide, et elle lui souhaite une bonne chance pour la suite.

“Monsieur Lovell a été assignée par mon mari pour me ramener saine et sauve chez moi. Non seulement vous me laissez ici, à la merci de n’importe quel dégénéré de tout l’ouest mais en plus…” Et clairement, c’est probablement ici la clé de voûte de sa fureur, alors qu’elle serre les dents et tape de son petit talon sur la terre aride. “Vous avez RUINÉ ma robe ! Une robe neuve monsieur! Trois jours d’essayage, 18 dollars, complètement fichue! Et tout ça parce que vous êtes un fieffé rustre! Ça vous aurait coûté quoi de me demander de me décaler ? J’ai fréquenté bien des malotrus, mais là c’est le pompon!”

Peut-être, peut-être bien que ses tremblements étaient aussi dû à l'affreuse destinée de Vano, mais elle n’essaya de ne pas y penser : l’époque ou elle pouvait encore s’émouvoir de la mort d’un inconnu avait été rompue quand elle avait fini la bague au doigt. Un an plus tard, elle devait être en mesure de ne plus y penser. Alors elle tend un index accusateur et exigeant sur le cavalier, tonna avec sa petite voix. “Je demanderai bien réparation, mais avant toute chose, j’exige que vous m'escortez chez moi ! Entière, vivante, et sans égratignure." Elle lève le menton, un air suffisant sur son faciès aux boucles blondes, l'air de savoir ce qu’elle veut et ce qu’elle estime avoir droit. “Mon famille sera en alerte si je ne suis pas rentrée au plus tôt. Entre votre prise et ma disparition, faire le lien sera beaucoup trop facile.”

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La demoiselle a l’air plus outrée par la taches sur sa toilette que perturbée par la mort de son ami ( et non amant ). Elle l’enjambe comme un muret, vague obstacle qui sépare le chasseur de prime de sa fulgurante colère.
Madame est Mariée. Madame s’appelle Borden. Madame est visiblement haut placé. Alors madame doit être une vraie peste pourrie gâtée : elle n’ordonne pas, elle exige. Makoyepuk la regarde, presque amusé, de toute sa hauteur. Mais son sourire est plus pincé que véritablement sincère. — Ton mari, il engage souvent des voleurs pour surveiller sa femme ? “ Ironique. A moins que le fiancé soit un cocu à grande corne, il a surtout bien peu d’égard pour la lois ( lui aussi ), à n’en pas douter - mais Makoyepuk n’a pas encore reçu d’ordre pour ce nom là ( hélas ), alors ces doutes resteront seulement siens avant que la justice rattrape Mr. Borden.

Poussant de la main son interlocutrice, il tire une civière de tissus et de bois de son fatras, tendant le tout avant de l’accrocher à la coupe de sa jument. Il se fraye ensuite un chemin jusqu’au cadavre dont il noue les mains. — Moi, je suis juste venu chercher Lovell, je n’ai aucune obligation de t’escorter jusqu’à chez toi. Pas gratuitement en tout cas. “ Tirant la longue corde qui saucissonne le pauvre défunt, il la jette par-dessus le dos de Numees , pouliche devenue poulie à cet instant précis. Une fois qu’il a fait le tour du petit cheval, il hisse le morceau de viande sur son lit funéraire, faisant souffler la bête à chaque fois que la corde lui chauffe le poil. “ Un dollar et cinquante cents, c’est le prix. “
A vrai dire, l’escorter jusqu’à chez elle ne l’embête pas vraiment - si un jour il doit y revenir, il connaîtra au moins l’adresse. Par contre, s’il peut gratter une poignée de cents au passage, cela l'ennuie encore moins. Après tout, la gamine n’a pas l’air facile - si elle s’était montrée polie, elle aurait peut-être pu faire des économies. “ C’est mieux que de rester plantée au milieu de nul part, non ? Sinon, tu peux toujours attendre que ta famille vienne te chercher. “

Il saute sur le dos de sa monture, comme prêt à foutre le camp si jamais elle refuse sa proposition. Cette idée ne le chagrine pas plus que ça, même si les explications qu’il allait devoir présenter à Jacob ne risquent pas d’être des plus agréables. “ Hm. J’imagine qu’il doit y avoir des coyotes dans le coin, en plus. “ Il regarde l’horizon dans son bon vieux numéro de sage. Pourtant, il n’a aucune idée de ce qu’il raconte. “ Allé, monte à l’arrière. Je te dépose en ville, par contre. Pas question que je tombe dans un guet-apens. “ Un aperçu de sa maisonnée lui suffit largement : l’amener jusqu'à la porte, ce serait un peu trop jouer avec la patience du créateur.
Il lui tend la main, d’abord pour récupérer son dû avant de la hisser sur la croupe du cheval.

La jeune femme ne sait pas ce qu’elle avait imaginé en guise de réaction, mais elle ne fut pas spécialement surprise quand il ne lui avait pas dérouler le tapis rouge ni avoir eu un mot d’excuse pour sa pauvre toilette ruinée par l'hémoglobine fraîche. Un vrai comportement de goujat mal luné. Les sourcils de la jeune femme se froncerent alors qu’il lui annonce tout de go qu’il n’avait pas a ecouter sa doleance. Penny, de son cote, était persuadée du contraire. Comment va-t- elle rentrer chez elle sans chaperon? Peut-être aurait-elle dû employer un autre ton, mais c'était le dernier de ses problèmes. Elle n’avait pas à roucouler en papillonnant des yeux alors que sa priorité se trouvait saccagée, pour la seule et unique raison qu’elle s'était retrouvée au milieu d’une rixe ridicule.

Pas gratuitement. C'était le pompon de la pomponette. Voilà maintenant qu’elle subissait un immonde chantage! Elle savait très bien que le monde n'était pas peuplé des gentlemen incompris qui peuplent ses romans, mais elle était toujours effarée de voir que la réalité était aussi éloignée de la fiction.

“JE!...” Commence-t-elle avant d'être coupée dans son elan par une histoire de coyote. La blonde s'arrête immédiatement, et son regard insolent se change lentement en une expression inquiète, ses prunelles brunes inquisitrices qui vont de la droite vers la gauche. Elle ne questionna nullement si son interlocuteur racontait des sornettes : il était fort probable qu’il s’y connaisse bien mieux qu’elle. Et ce n'était honnêtement pas un risque qu’elle était prête à prendre. Mourir, certes, pourquoi pas ? Mourir au milieu de nul part, laissant un cadavre dévoré par des animaux sauvages, c'était inadmissible. Madame Borden n’acceptait qu’elle estimait en dessous de son statut, y compris son propre trépas.

“... Je suis d’accord.” Fit-elle après s'être éclairée doucement la gorge. Fouillant son petit sac, elle en sortit les piécettes pour les donner au cavalier. “Cela me convient.” Fit Penelope en montant à l'arrière de la monture, prenant la main aimablement tendue par l’inconnu. Un geste galant dont elle fut agréablement surprise. Leur campement était un peu à la lisière de la ville, le marché lui semblait acceptable.

Ils se mirent donc en route, et Penelope fit de son mieux pour garder son sang froid malgre le cadavre de Vano qui était derrière eux. Une triste vision, mais elle tenta de ne pas s’y concentrer en tentant, l’air de rien de faire la conversation.

“Sooooo… j’en déduis que vous êtes chasseur de primes.” Penelope penche la tête sur le côté, sa curiosité piquée au vif. Elle avait bien lu des livres sur le sujet, mais rien de plus.  “Combien touchez-vous pour un voleur de cheval ? J’imagine que ça paye moins que les assassins.” Bref coup d'œil vers le cadavre avant de demander calmement “Vous vouliez qu’il se rende lui même n’est-ce pas? Est-ce que ca aurait rapporté plus s' il était vivant?” Penelope pouvait être une véritable peste, et c'était un euphémisme, mais son ton était étonnement sincère dans sa curiosité, sans trace de malice ou d'acidité.

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L’accord passé, un sourire revient sur les lèvres du chasseur. Un dollar de plus dans sa poche, c’est toujours un motif de célébration ( aussi discrète soit-elle ). En revanche, ce qui l’amuse moins, c’est que la gamine ait pensé qu’il lui ferait la conversation, en plus de l’escorter. En tapant sur les flancs de sa monture, on sent que Makoyepuk n’a pas bien envie de la divertir - en plus de ça, le caractère tout à fait indiscret de ses questions ne font que lui donner des sueurs froides. On dirait qu’elle se fiche bien du cadavre qui la suit dans cette étrange file indienne.
— Vrai. “ Lâche-t-il sans décrocher les yeux de la route. Malgré l’abondance de questions, il se contente d’une seule réponse, puisqu’elle est toujours la même. “ Ils les préfèrent vivants, pour pouvoir les juger. Généralement, la moitié de la prime s’envole si tu les ramènes les pieds devant. “ Les Américains et leur obsession avec les lois : dans un monde qui change, qui évolue si vite que personne ne comprend plus bien ce qui se passe, il faut faire des exemples pour que la modernité prenne le pas sur la sauvagerie. Le code civil se remplit de jour en jour et les desperado disparaissent, abattus d’une façon jugée plus raisonnable.

Le vent ne souffle pas vraiment, pourtant, ça ne l’empêche pas de recaler son chapeau sur sa tête, s’occupant pour ne pas sentir l’embarras qui s'installe en lui.  — On dirait que ça ne te fait pas vraiment peur ces choses-là. “ Makoyepuk n’en doute pas un seul instant, la gamine a dû en voir des choses pour ne pas être émue par le tragique décès de Vano. Ceci dit, dans l’ouest, c’est tout de même courant - tout le monde a vu son lot de morts. Seulement, pour les jeunes filles aussi bien apprêtée qu’elle, c’est chose plus rare, ou en tout cas plus surprenante que de ne constater aucune émotion face à la sauvagerie. “ J’aurais bien mis un drap sur sa tête, mais au final ça ne fait pas tant de différence que ça, n’est-ce pas ? “ Il ne disait pas ça pour l'accabler ou l’accuser. Il discute simplement, puisque c’est ce qu’elle fait. Si un meurtre ne la froisse vraiment pas, elle comprendra.  “ Rassure-toi, il n’aura pas le temps de puer. Vous pourrez récupérer le corps chez le croque-mort, par contre vu que vous êtes sa famille directe, ce sera à vous de payer les charges pour l’embaumement.   “ Il est bien ravi de n’avoir à sortir aucun billet de sa poche, quoiqu’il n’aurait pas ronchonner à donner un peu de son butin à M. Burke ( il faudra d’ailleurs qu’il se renseigne auprès de lui sur cette famille qui a le bras si long ).

— Tu ne m’as pas dit ton nom, je crois. “ L’air de rien, il se roule une cigarette, laissant Numees trotter tranquillement pour ne pas perdre sa cargaison. “ J’imagine que si ta famille est aussi importante que tu le dis, je dois peut-être les connaître. “

Pénélope hoche la tête quand son inélégant cavalier a au moins assez de respect pour répondre à ses questions. La jeune femme, malgré sa situation relativement précaire, semble néanmoins ravie de voir des questions répondues. Elle se doute d'avoir l'air naïve en demandant des choses qui peuvent paraître d'une banalité affligeante. Mais elle sait aussi que son apparence peut avoir l'air parfaitement hors ton. Ça peut avoir son avantage, comme ne pas provoquer la méfiance, ou ses défauts, comme la faire passer pour  une simplette.

"Peur ?" Ne peut s'empêcher de demander la jeune fille avec un étonnement non dissimulé, elle eut un mouvement de main avec un certain amusement dans la voix. "Les morts ne font pas peur. Ils sont morts. Il me semble que cela coule de source. Pardonnez-moi mais si vous voyez beaucoup de femmes terrifiées par des cadavres, c'est qu'elles ne sont guère futées." Philosophe-t-elle avec détachement. "La pire chose qu'il peut me faire c'est de tâcher ma robe, et vous vous en êtes très bien chargé tout seul."

Penny avait depuis longtemps laisser les histoires de fantômes avec ses fantasmes de prince charmant : dans les livres. Là où personne ne peut lui faire de mal. Choquée d'avoir vu un homme se faire tirer dessus devant elle ? Absolument.  Elle en avait encore quelques sueurs qui coulaient de façon désagréable le long de son dos. Mais peur? Certainement pas. Si cet homme voulait la prendre en otage, il s'y serait pris autrement… ou pas? Bah. Quelle importance? S' il s'y essayait, elle lui souhaitait bonne chance. Non seulement Penny se savait dure a supporter, mais en prime elle ne mettraient pas sa main a couper que les Borden cèdent à un chantage pareil. Qui a venir récupérer l'irritante Pénélope, autant sauver quelques dollars et faire parler la poudre.

"En revanche, je vous accorde que ce n'est nullement ragoutant…" Penny jette un œil derrière son épaule, voyant le pauvre cadavre tristement traîné derrière eux. Elle esquive gentiment, mais non subtilement, la conversation sur les frais funéraires. Malheureusement pour lui, Vano était à peine arrivé dans leur clan, cherchant probablement à se protéger de ce qui a fini par arriver. Il n'avait gagné la confiance de personne et ne faisait absolument pas partie de la famille. Personne ne dépensera un cent pour sa pomme d'idiot.

"Fiddle dee dee!" Chantonne la jeune femme avec un plaisir non dissimulé. "Vous ne m'avez pas dit le vôtre non plus." Pénélope s'installe un peu mieux sur la selle inconfortable pour son postérieur de fille de riche avant de répondre cependant. "Pénélope Borden, ravie de vous rencontrer… malgré les circonstances. Nous venons d'arriver dans les environs. Vous avez peut-être entendu parler des caravanes de Gitans qui font la navette entre Silverstone et Imogen. C'est mon peuple." Difficile à croire avec sa tête de jeune première et son teint de pain au lait, et pourtant, elle était on ne peut plus sérieuse.

"Et vous mon cher, puis-je demander le prénom de mon chaperon? Vous avez l'air plus familiers avec les environs que moi, vous êtes natifs d'ici ? Oh peut être vous connaissez un tailleur qui peut me dépanner une nouvelle robe ! J'ai déjà eu assez de mal à trouver une librairie quelque part…"

Penny avait moult talents. Se taire n'en faisait pas parti.

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Le moulin est lancé : il a à peine soufflé sur ses voiles qu’l tourne déjà à plein régime. La jeune fille lui parle de ses maux, de son ang ( enfin, ça, il en doute, vu comme elle brille au soleil ) et de son nom avec une fierté et un bagout qui ferait pâlir un vendeur de journaux. Makoyepuk n’en attendait pas tant, mais se régale des informations qu’elle lui donne, au moins à propos de la bande de caravaneux avec qui elle fait visiblement équipe. Ce qui ne se sédentarise pas pose toujours problème, d’après le gouvernement.

— Une librairie... “ Il rit à peine, quoique sincèrement amusé par les intêrets tout à fait précieux de la demoiselle. ” C’est comme chercher une aiguille dans une botte de foin. Je ne suis pas d’ici, mais je connais assez les environs pour te dire que tu ne trouveras pas un bon tailleur dans les parages. Mr. Hawkins est retourné à New York pour travailler. Il ne reviendra que dans deux semaines. Il y a toujours la boutique de Madame Richter, mais ça m’étonnerait que ce soit à ton goût. “ Ses articles ne sont pas chers, sûrement pour une bonne raison. Il avait cru reconnaître un jour le manteau d’un pauvre voleur qu’on avait pendu sur la place- il faut croire que madame récupère ses vêtements partout pour les revendre, même chez le croque-mort.
— Makoyepuk. C’est comme ça que je m'appelle. “ Elle ne retiendra sûrement pas son prénom, ce qui l’arrange un peu. ” Je ne viens pas de la réserve. Ici vous avez des surtout des Apaches et des Cheyennes. “ Pas que ça les intéresse, en général, mais il se permet de faire la différence, peut-être par pure fierté culturelle.

— En tout cas, tu en a de l’argent on dirait. “ Il siffle, comme le font les cowboys quand ils jaugent tout ce qui est précieux. ” Tu peux te payer tout ça en une journée ? Il va falloir me dire quel travail fait ton mari, parce que ça m’intéresse. “ Une nouvelle robe réalisée sur le pouce, ça ne vaut pas qu’un seul dollar ( contrairement à sa course ). ça et les livres, ça en fait une belle somme pour une matinée en ville - on croirait entendre parler un Rosenbach.
En tout cas, la conversation lui semble soudainement digne d’être entretenue. Mademoiselle Pénélope est un sacré personnage, entourée sûrement d’un beau parterre de rôles qui commencent à intriguer le chasseur de prime. — D’ailleurs, il a peur de quoi monsieur Borden pour te faire escorter comme ça ? . “

Oui. Une librairie.
Cachée derrière son épaule, elle a une brève moue ennuyée, oubliant que l'écrasante majorité des gens qui l’entourent ne savent pas lire. Pour cette raison elle s’amusait a faire la lecture a plusieurs personnes au sein du camp, Tusitala etait son plus grand fan d’ecouter ses romans d’aventures d’une oreille en travaillant sur ses derniers projets d’alchimie Elle etait meme persuadee d’avoir surprit Cole l’ecouter, quoiqu’il etait difficile de savoir si il etait juste profondement ennuye et etait devenu completement sourd au son de sa femme qui pepie des phrases ampoulees.

“Enchantee Monsieur Mako-ye-puke” Articule-t-elle pour prononcer son nom avec justesse -apres tout elle est une jeune femme polie et eduquee. Mais très vite sa lueur de curiosité se remet à briller dans ses grands yeux sombres, et elle s'enquiert. “Vraiment? Alors d'où venez-vous, si vous n'êtes pas d’ici. Est-ce que je devine dans votre ton que vous ne vous entendez pas avec les gens de la réserve ? Pourquoi donc ?” Les questions étaient sincères, d’une pauvre petite fille blanche riche qui n’avait jamais vraiment eu affaire à des autochtones avant de quitter sa cage dorée chez son insupportable et méprisant père. Elle savait qu’elle avait beaucoup à apprendre, et sa curiosité n'était jamais satisfaite. Le baron avait egalement subit les moult questions de la part de la jeune femme, mais elle avait a apprendre que tout le monde n’avait pas la patience et l’affection de l’adorable geant a son egard.

Elle eut un bref sourire satisfait avant de préciser. “C’est mon argent, pas celui de mon mari.” Celui de son père précisément, mais elle n’avait pas à lui offrir toute son histoire sur un plateau d’argent, d’autant plus que ce n'était pas vraiment intelligent de parler de son passé criminel a un chasseur de prime. Et de toute façon elle saute sur l’occasion de changer de sujet quand il pose une autre question.

“Je vous demande pardon ?” Fit-elle, pas insurgée, mais surprise. “M’avez vous regardé ? Je suis absolument délicieuse! Il n’y a rien de plus dangereux que de laisser une jeune femme comme moi dans la nature. Qui sait-ce qui pouvait m’arriver si un hurluberlu a une mauvaise idée en me voyant!” Elle réprime un frisson avant de conclure. “Monsieur Borden a juste des yeux et la tête sur les épaules." Et il ne lui a jamais caché que son rang chez les Borden peut être dangereux pour les potentiels rivaux. Au moins un chasseur de prime n’en a strictement rien à faire d’elle.

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Ses sourcils manquent de disparaitre sous son chapeau tant il les lèvent haut à l’écoute de ce qui doit sûrement être son nom. Il se garde pourtant de tout commentaire - contrairement à d’autres, la petite dame a au moins essayé ( et c’est déjà beaucoup. peut-être trop ). — Tu en poses des questions.... “ remarque glissée entre deux trois répliques de la pipelette, il souffle du nez en l’entendant continuer de jacasser dans son dos. Comme les anciens, il commence même à secouer la tête, marquant du sceau de l’humour sa vaine désapprobation. “ Tu n’as pas reconnu l’accent ? Je viens du Montana. “ Ce trait d’humour touchera peut-être sa cible, en tout cas ce n’est pas l'impassibilité de son auteur qui le portera.  “ Tu sais, c’est comme les anglais avec les irlandais. Vous vous ressemblez, mais il ne faut pas forcément vous mettre dans la même pièce. “ Les guerres tribales ne sont guère plus douces que celles des européens. Il y a encore dans certaines nations pourtant à moitié mortes l’envie sérieuse d’aller achever leurs voisins. Makoyepuk lui-même n'échappe pas à ce sinistre mécanisme tout bonnement humain.

— Ton argent ? “ Il s'interrompt un instant, surpris par cette réponse. Que les femmes possèdent leur propres terres ainsi qu’une bonne partie du mobilier n’est pas un concept qui lui est étranger - en revanche, que ce soit le cas d’une femme du “nouveau” monde l’impressionne un peu plus. Ceci dit, ça l’arrange bien : il n’aura même pas à passer par son mari pour récupérer le reste de son solde. “ C’est toi qui l’a gagné ? “ Il pose une nouvelle question, comme pour appuyer toute l’absurdité de ses propos. Il sait très bien qu’elle a dû l'héritier - mais tout de même, d’où lui vient une telle dot ? Ses pairs sont sûrement sédentaires.

— Mouais. “ Ultime réponse au dernier discours de la demoiselle, il s’amuse de sûrement la vexer - en même temps, il s’autorise le luxe de la franchise. “ Monsieur Borden n’a pas l’air de trop s’inquiéter des bandits s’il en emploie un pour te garder. “ De peur que le disque ne se raye trop, il enchaîne sur un autre sujet. “ Et sinon, avec tout cet argent, comment tu t’es retrouvée à épouser un homme qui n’en a pas ? “ Il s’imagine bien qu’elle n’a pas dû recevoir la bénédiction de son père vu l’union étrange qu’elle vante sans pudeur.

Et toujours dodeline sur son brancard le corps sans vie du pauvre voleur de chevaux. Makoyepuk l’a presque oublié, comme tous les autres qu’il a traîné avant. On s’y fait, tant que l’odeur n’est pas trop forte. Mais histoire de mieux l’oublier, il couvre tout de même le chuintement de ses bottes qui frottent le sol avec un peu de mondanités. — Non, parce que - attends, tiens moi ça. “ Sans que la tâche ne l'embarrasse trop, il donne les rênes de cette embarcation funéraire à Mrs. Borden “ Je comprends pas trop d’où tu viens, toi. “ La sacoche de tabac qu’il garde à la ceinture est vidée, et son contenu, tassé dans le fond d’une pipe. “ Tu es la fille de quelqu’un d’important dans la région ? “ Au dernière nouvelle, il n’a rencontré dans le cercle des Hennessy aucun Baron assez aimable pour abandonner les spéculations qu’il peut faire sur un gendre de qualité.

Elle ignore ce qui a pu la rapprocher des irlandais et des anglais en le forçant à la mettre en lien avec l’un ou l’autre, mais par réflexe elle gonfle les joues. Elle est française et n’a rien à voir avec des rustres et des alcooliques. Mais elle se retient de le dire à voix haute, de peur de ressembler un peu trop à son détesté père. Elle sent bien que la patience de son acolyte commence à tirer un peu sur la fin, mais si il pouvait éviter d’en rajouter pour lui donner envie de poser plus de question, ça serait bien urbain de sa part.

“Vous l’avez deviné tout seul ! Les gens du Montana sont-ils tous aussi brillants?” Ajoute-t-elle avec un semblant de sarcasme, alors qu’elle saisit les rênes du cheval avec une certaine nonchalance, pour oublier le misérable cadavre qui gît à l'arrière. Penny prétend être à l'aise, mais il n’en a rien : elle pourrait lire tous les Mary Shelley du monde, voir un cadavre en vrai c’est autrement moins ragoutant que dans les livres. “Plus sérieusement : Vous êtes probablement aussi curieux de moi. Vous cherchez à épouser une de mes sœurs ? Je pourrais peut-être vous présenter : Jodie n’est pas très aventureuse, mais elle est moins bavarde que moi. Ça vous reposerait.” Elle sort son sourire en coin le plus insupportable, même si elle affirmerait que c’est celui le plus confiant qu’elle possède.

Elle n’a pas l’ombre d’un sou qui ne revient pas à son mari, vu qu’elle l’a volé pour le gang, et pour ainsi dire, elle aurait dû se douter que de semer des indices comme des petits cailloux reviendrait lui mordre dans les mollets. Jouer du violons pour les chalands, elle le fait régulièrement, mais rien de ce qu’elle aurait pu raconter n’aurait pu justifier une jeune femme qui transporte des livres, aux côtés d’un bandit recherché, alors qu’il la ramène a un camp de gitans.

“Je plaisante, je plaisante mais oui vous m’avez eu: j’ai en effet quitté la maison pour un sans le sou. Je sais c’est plutôt stupide et très classique, vous en avez vu combien comme moi?” Elle secoue la tête en levant les yeux au ciel. “Nooon, pas dans la région! Grand Dieu j’ai pas intérêt à revoir papa si je veux pas finir tondue!” Un gloussement dingue d’une dinde. “C’est un vendeur de livres qui a fait fortune à Philadelphie -vous savez là où les gens lisent. Je suis partie avec l’argent que j’ai gagné en tenant la boutique pendant qu’il voyage.”

Elle le regarde allumer sa pipe, regrette le fait de ne pas avoir de cigarette sur elle, et ajoute: “En revanche, si vous êtes toujours intéréssé, je suis certaine que Jodie est encore célibataire! La pauvre chérie n'est pas très gâtée par la nature -un vilain pied bot, mais elle ferait une excellente épouse, si quelqu’un lui laisse une chance. Pour le coup si vous avez besoin d’une dot, papa vous dédommagerai probablement.” Pauvre Jodie.