La petite mort

ft. @Zilpha Narayanin

La gestion d’un établissement de charmes comme le Red Rock n’est pas toujours rose, loin de là. Il y a quelque chose qui a tendance à prendre du temps à Jezabel, en plus de lui tirer de nombreux soupirs de dépit : les comptes. C’est toujours agréable de se rendre compte des recettes de la semaine, voire du mois, mais c’est toujours un peu embêtant à faire. Pas très excitant, il faut bien le dire…Cependant, c’est la vie qu’elle a choisie de mener, après une vie protégée par de l’argent et un statut social, une vie qui lui semble bien loin, comme vécue par une autre personne. Ce qui n’est pas loin d’être le cas. Dieu que la surprise serait grande pour ce pauvre John s’il la voyait à présent. Dirigeant un bordel d’une main de maître et devenue une artiste dans l’art de la vente d’informations. Encore faudrait-il qu’il sache qu’elle est là. De sa famille, elle n’a gardé aucun contact et de toute façon, s’étant réinventée comme elle l’a fait, il n’y a pas grand-chose qu’ils puissent faire pour la retrouver, à moins d’embaucher un chasseur de primes pour se faire. Mais passons.

Les yeux sur son livre de compte et l’esprit dans les calculs, Jezabel entend pourtant parfaitement un bruit sourd venant de l’étage. Un bruit de quelque chose de lourd tombant. Elle hausse un sourcil, intriguée, avant de sourire doucement. Certains (et certaines) ont des jeux un peu plus musclés que d’autres, il faut bien l’admettre. C’est ce qui fait le charme d’un établissement comme le sien : il y en a pour tous les goûts. Une chose qu’elle se plaît à mettre en avant aux nouveaux clients qui arrivent chez elle. Elle se reconcentre sur sa tâche.

Peu après le bruit sourd, ce sont des bruits de pas, un peu trop nombreux et avec un peu trop pressés qui attirent à nouveau son attention. Hum…Là, quelque chose cloche à son avis. Elle connaît ses filles, elle connaît les bruits attenants à son établissement, si bien que tout bruit hors de l’ordinaire attise sa curiosité…Et son inquiétude. La dernière fois qu’elle a eu ce genre de bruits, ça ne s’est pas très bien fini. Soupirant, elle referme son livre de compte, range les billets et les pièces de la recette et attend, patiemment, que sa porte s’ouvre. Elle n’a que quelques minutes à attendre pour entendre des coups à la porte de son bureau et la tête d’une de ses filles passer par l’ouverture, le visage blanc comme un linge et les yeux teintés de peur. Jezabel fronce les sourcils et suit son employée sans un mot de plus, verrouillant son bureau en partant.

Arrivée à la porte de la chambre concernée, elle voit l’homme, clairement mort, sur le sol, avec une autre fille dans la pièce, terrorisée, et Zilpha, sa fidèle Zilpha, près du corps. Les mains sur les hanches, la Madame s’énonce.

"Allons bon. Qu’est-il arrivé à ce pauvre malheureux ?" Son ton reste calme, teinté d'amusement, mais pas de reproche.

Ses yeux passent d’une fille à une autre, attendant des explications, fermant doucement la porte derrière elle, pour qu’on ne les dérange pas, ou que des regards indiscrets ne voient ce qu’il s’est passé. Manquait plus que ça, un mort chez elle !