TW : Bleus et sang.
Mention de violence sexuelle.

“Aw, ye poor thing.” La blonde secoue la tête avec une moue ennuyée sur sa face. Les deux mains sur ses hanches alors que le pauvre petit est couvert d’hématomes et a une méchante plaie sur le nez. Nancy, de bon cœur, s'accroupit devant son pauvre ami assis sur une souche, utilise un pan de sa robe pour le coller sur l’écoulement de sang. “When ye told me come meet you here, it wasn't what I expected. Ye really can’t survive on your own, rite ?” Plus amusée qu’en train de le réprimander, jamais la jeune femme se permettrait de jouer les grandes soeurs, elle lui offre un gentil sourire.
Malheureusement, ce n'est pas vraiment avec ses petits bras qu’elle pourra retrouver et corriger le mécréant qui a osé toucher son vieil ami, sinon c’est certain que les rues d’Imogen seraient hantées par quelques édentés supplémentaires. Par contre elle peut lui saisir le bras pour l’aider à se traîner jusqu’à la ferme ou il l’a invité. Et même là où elle pourra le soigner et le protéger un peu mieux qu’au milieu des rues de la ville. Le protéger est un grand mot, elle pourrait au moins le cacher et s’interposer. La joue de Nancy est d’ailleurs ornée d’un bleu qui a tourné au violet, la dernière fois qu’elle a eu l’idée géniale d’arrêter quelqu’un de tapé sur plus petit que soi. C’est une technique comme une autre.

Traînant son clopin clopan son bras autour de ses épaules, elle le pose doucement sur la première chaise qu’elle croise avant de jeter un œil curieux autour d’eux. L’endroit est chaleureux, beaucoup plus que les derniers squat abandonnés dans lequel il l’invite de temps à autre. C’est jamais vraiment la loge du président, mais quand il savait que Nancy avait besoin d’un toit ou dormir, Isaac était jamais avare de tuyaux pour dépanner la prostituée de fortune. “Ow, that’s way cuter than all the places you ever showed me, Isaac!” Commente la jeune femme avec le large sourire qui lui était distinct. Moult détails de ci de là témoignent d’ailleurs d’une activité toujours présente, et  pas uniquement par des vadrouilleurs comme eux : “I’m not getting me arse kicked for stayin’ here, am I?” Finalement elle a un bref rire et hausse une épaule, décidant qu’elle n’en avait pas grand chose à faire : “ Well guess, I can stay for a bit anyway: Not leavin ye alone looking like a bunch of beatin’ grapes.”

Sa lèvre se remet à saigner de derechef et elle râle pour la forme, utilisant un des torchons posé dans un coin du salon pour le poser sur le visage de l’infortuné . “Hell men, did you steal someone's boyfriend ? Homeboy was pretty mad at you to beat you raw like that.” Sa mission accomplie après quelques minutes a exercé une pression sur la vilaine plaie, elle se relève et remarque qu’elle s’est fichu de l’hémoglobine sur les mains. Sa robe en ait pas vraiment  épargné non plus, et elle s'essuie les mains avec le reste du chiffon “Ye can stay alone for a sec ? Saw a well outside, I’ll fetch some wat…”

La porte s'ouvre soudainement derrière eux, causa la blondinette de faire immédiatement volte face vers l'intrus. et Nancy fronce les sourcils, une expression qui n’est pas spécialement naturelle chez elle, d'ailleurs ça lui irrite les joues. Machinalement et sans y songer a deux fois, la jeune femme fait résonner ses bottes sur le sol, une tantative tres vaine d’avoir l’air plus menacante qu’elle l’est. Ce n’est pas convaincant, mais si elle provoque assez le type en face, il en oubliera probablement d’être violent avec son ami s' il est venu avec l’intention de cogner un truc.

“Feck yer doin’ here mate ?” Nancy continue d’essuyer ses mains ensanglantées, perplexes. Mais vu les yeux furieux qui se posent sur elle, elle avait la satisfaction de voir que sa stratégie avait l’air de marcher.

Le sourire qui lui colle aux lèvres depuis un certain temps l’agace autant qu’il apprécie le souvenir de sa cause. Benjamin Blackship, le chasseur de prime habituellement aussi joyeux qu’une porte de prison, était maintenant aussi rayonnant qu’une demoiselle hystérique après un soin. Mais s’il garde précieusement l’instant volé dans sa mémoire, il aimerait bien retrouver le calme nécessaire à sa profession. La Kingsley étant absente, il comptait bien demander à Isaac de lui rendre son cœur contre quelques baisers. Voilà pourquoi il chevauchait en direction de la fermette encore en ruine il n’y avait pas si longtemps.

Ben attacha son cheval près de la grange, là où il pouvait s’abreuver avec la vachette. Il flatta l’encolure de l’animal avant de s’approcher de la maison. L’habitude lui fit regarder les alentours, épier des mouvements, des indices. Il y avait une certaine sérénité dans ces gestes routiniers, une assurance qu’il n’était jamais vraiment exposé, prêt à toute situation. À tout, contre lui, mais contre Isaac…

Le sang qui tâchait la pierre était encore frais, mais Ben ne prit pas le temps de vérifier. Ses pas l’emmènerent vers la demeure avant même qu’il n’ait eu le temps de penser logiquement. Un guet-apens l’aurait cueilli comme un fruit mûr. Il frappa la porte de son pied, l’arrachant presque de ses gonds. Il s’était attendu à un groupe de brigands, un chasseur de prime ou encore même Rogers en personne. C’était pourtant une frêle jeune femme qui l’accueillait, les cheveux ébouriffés et la robe tâchée de sang

« Feck yer doin’ here mate? »

Une irlandaise. Bien sûr. En un seul instant, Benjamin dégaina et mit en joue la blonde. Si la demoiselle semblait aussi dangereuse qu’un mulot, il décida de ne pas la sous-estimer. Après tout, l’un des meilleurs chasseurs de primes qu’il connaissait était une femme. Certes bien plus grande et bien plus menaçante, mais une arme à feu éliminait rapidement tout désavantage de taille ou de force. Il était bien placé pour le savoir.

« Where is he? » vociféra Ben en abaissant le chien. « What did you do to him? »

La mâchoire serrée, les sourcils froncés, il toisait la jeune femme, prêt à tirer au moindre mouvement suspect.

“Dunt care brother.” Annonce Nancy avec une perplexité déconcertante “Ferkin’ shot me ‘cause I’ll never tell y-”

Mais, deja, Isaac a les mains levées, alors que ce n’est nullement lui qui est pris en joue et que la seule dont la vie semble être menacée finit de s’essuyer les mains sur sa pauvre robe qui en avait visiblement vu d’autres. C’est pas vraiment à elle dont on s’adresse mais la jeune blonde ouvre des grands yeux curieux quand son ami de toujours essaie de raisonner l’intrus avec une certaine attention qui crevait les yeux de la prostituée. Ses mirettes vertes glissent de l’un à l'autre, essayant de comprendre ce qui était en train de se passer devant elle. Et quand Isaac confirme ce qui ne laissait que très peu de place au doute, Nancy a le visage qui brille immédiatement. A croire que c'était noël avant l’heure et qu’on venait de lui offrir un million de dollars.

“NAUGHT. That’s Ben?!” Fit la petite chose avant de lever en grand les bras pour s’approcher immédiatement celui qui l’aurait bien vu au sol une seconde plus tard. Pas de rancœur pour Nancy : le désir est partagé. “C’mere me boy!” Et le piège est refermé, quand le chasseur de prime se retrouve immédiatement entre la pince des gros calins affectueux de Nancy. Aucune chance d’en réchapper quand l’infortune fait peu ou prou la même taille qu’elle “Look how handsome ye are, old Lowell got himself a keen eye, that’s wha me tellin’ !”

Nancy avait toujours su que son ami n’avait pas d’affection particulière envers la gente féminine. Mais en même temps, des mois a avoir été payée pour lui donner une rouste aux cartes en prétendant qu’il lui brisait le dos et le reste, mise a part manquer cruellement de matière grise, fallait pas etre devin pour savoir ce que ca voulait dire. Elle ne voyait pas le probleme, au pire elle trouvait qu’il etait finalement aussi peu brillant qu’elle : aimer les hommes, dans tout les choix de merde qu’elle a fait, c’etait vraiment un des pires. Mais un sur dix n'était pas si mal.  Libérant celui qui n’était finalement qu’un inconnu, elle se permit d’ajouter : “Yup, was tryin’ to fix this mess. Told him to suck dicks or flee, but he never listened to me.” Le gaillard plisse les yeux dans ce qu’elle peut identifier comme de la perplexité, mais elle lève les mains en innocence. “Eh! Don’t ye look at me like that. That’s how I save meself e’rytime.”

En conclusion, elle poussa celui qu’elle considérait comme un petit frère de substitution gentiment vers une chambre. “Go on, go cover yerself, ye gonna catch death.”
Elle eut un bref regard vers ses fripes ensanglantées en gonflant les joues. Si par miracle, quelqu’un l'aperçoit dans la rue, elle est bonne pour finir chez le shérif avec une accusation de sorcellerie sur le dos. “Eeeeeh, do ye think Cherlotte get herself a dress I can borrow? I mean I can wash mine, but this shite do naught go like this. Plus it’s pretteh cold, me tits will fall off before it’s dry.”

La blonde mentait avec un aplomb déconcertant, et Ben eut un court moment de doute. Pourtant, la voix d’Isaac raisonna dans la maison et le chasseur baissa légèrement le fusil, en même temps qu’il levait le regard. L’ordre maugréé finit par lui faire viser le sol au pieds d’Isaac, maintenant entre eux deux.

« What happened? » demanda Benjamin, incapable de se détacher du visage tuméfié d’Isaac

Mais au lieu d’une réponse, il n’eut qu’un vague « I’m good » qui ne fit rien pour le rassurer. Il lança un dernier regard suspicieux vers la blonde derrière le bandit, une certaine Nancy apparemment. Rassuré par les mots de se dernier, il releva le chien et rangea le colt dans son holster. Juste à temps pour voir la lueur d’émerveillement dans le regard de la blonde et prendre un air paniqué au secret ainsi révélé. Il ne fut pas assez rapide pour éviter l’étreinte.

Benjamin n’était pas habitué aux démonstrations d’affection. Celles qu’il avait envers Isaac étaient des vestiges d’une vie passée dont il ne se souvenait plus des subtilités il y avait encore à peine un mois. Mais Nancy n’avait pas sa rigidité et les petits bras autour de son torse avait une chaleur qu’il n’avait pas connu depuis bien longtemps. Incapable de savoir quoi faire de cette information, il finit tout de même par lui tapoter l’épaule, autant en réciprocité qu’en demande d’en finir.

La langue bien pendue de Nancy n’était pas une exentricité, dans le coin, mais le chasseur ne put s’empêcher de froncer les sourcils, autant pour la crudeur des mots que pour l’implication de Lowell dans des actes proches de le faire rougir. L’expression ne passa pas inaperçue, mais au commentaire, il ne put que l’approfondir, cherchant chez Isaac à être rassuré. Mais déjà, Nancy chassait ce dernier à l’étage et Ben ne put que regarder le jeune homme disparaître.

Nancy commenta sa propre robe et il poussa un long soupir, les yeux évaluant les dégâts. « I’m pretty sure she has some, but taking one would be stealing. » Et s’il laissait un tel crime se passer sous son nez, quel chasseur de prime était-il? L’instinct lui souffla qu’elle ne s’en formaliserait pas cependant, et il suivit la blonde dans les couloirs de la ferme en ruine, après un dernier coup d’oeil vers l’étage. « You don’t intend to take one, do you? »