L'étrange convoi se vidait petit à petit, au fil de sa promenade dans les rues d'Imogen. Son couvre-chef constellés de flocons qui fondent petit à petit, Dolores aurait bien dit au shérif que sa mission d"escorte il pouvait se la coller là où le soleil ne brille pas. Mais c'était avant de voir la panique qui traverse le visage des femmes au saloon, et que leur seule autre option était un homme dont elle ne connaissait rien et n’aurait pas confier sa chope vide. Dolores n'aurait pas pu se résoudre à laisser des proies potentielles sans sa protection, et avait fini par rassembler les femmes en écoutant leurs directions pour être certaine qu'elles arriveraient toutes à bon port.

Dolores était toujours profondément mal à l'aise devant autrui, et encore plus quand ces gens sont de sa ville natale. Certains visages ne sont pas tout à fait inconnus de sa mémoire et même pas tout à fait synonymes de bon souvenirs. Mais la panique a pris le dessus sur les médisances, et bien qu'elles ne dissimulent pas leur soulagement, très vite elles ne font plus attention à la mercenaire. Les murmures inquiets se soulèvent au milieu du silence hivernal, que Dolores écoute d'une oreille en pensant que leurs quolibets pourraient la mener sur quelques pistes. Hélas, pas de telle chance pour ce soir, mais peut être que ce début de geste leur donnerait assez de confiance pour lui confier quelque chose plus tard.

Une heure de marche et les dames sont toutes rentrées sans heurt. Si ce n'est une. Une jeune femme très discrète, remarque Dolores. Probablement effrayée de son apparence, se dit-elle sans y prendre ombrage. Bien qu'elle se souvenait parfaitement qu'elle était venue naturellement vers elle pour quérir sa protection. C'était ce qui avait convaincue la grande blonde d'accepter. Si quelqu'un préférait sa terrifiante carcasse à un simple homme, c'était que le danger devait être parfaitement effroyable. Elle s'était trouvé dans l'impossibilité de lui refuser ce service.

"Merci de ta patience." Fit Dolores sans savoir quoi lui dire, ni même comment la rassurer. Elle reprend le chemin à côté d'elle, la voyant la suivre. Se doutant qu'elles allaient dans la bonne direction. "Tu as bien fait de venir me voir." Elle renifle avec un certain mépris. "Personnellement je ne ferais confiance à personne dans cette situation. Surtout pas les nigauds sur place." Son regard couleur acier glisse sur la petite brune, à la fois curieuse et inquisitrice. "Mais c'est quelqu'un en particulier qui te faisait peur… pas vrai ?" Se rendant compte de son naturel ton menaçant, elle s'empresse d'ajouter peut-être un peu maladroitement. "Je ne dirais rien à personne, ne t'inquiètes pas. Mais personne n'a la moindre idée de qui pourrait avoir fait cette chose horrible. Et j'imagine que tu as une excellente raison d'avoir peur. Et peut-être que je pourrai même lui faire passer l'envie de recommencer."

Dolores n’est pas une habituée du contact humain, et encore moins des conversations. Elle se ne rend compte qu’après coup que menacer de tabasser autrui ne se rendait pas plus avenante ou digne de confiance. Mais manque de chance, c’est tout ce qu’elle n’a jamais réussi à faire de sa vie. Casser des os, et faire peur. La blonde semble parfaitement stoïque et sure d’elle, mais elle se doute bien qu’elle ne tirera rien de la jeune femme ce soir. Et probablement pas les autres soirs.

Malgré les bourrasques froides, le feu des mots de la jeune femme parvient sans peine à la montagne. Et elle ne peut s’empêcher d’hocher la tête avec compréhension, et un semblant de sororité. Si elle s’occupait personnellement de tous ceux qui aiment prendre l’avantage sur les personnes qui sont trop faibles pour répliquer, les villes qu’elle a traversées seraient des cimetières à ciel ouvert. Mais malheureusement elle ne peut pas protéger tout le monde, et tomber dans une rage sanguinaire ne guérirait pas le monde autour d’elle. Elle ignorait si c’était encore possible, mais elle sait que rien en elle ne pouvait améliorer la vie d’autrui. Son métier était comme affronter une Hydre. Un brigand pendu, et des dizaines surgissaient de nulle part, ou assez malin pour passer au travers des filets de la justice.

“Est-ce que…” Commence Dolores en se tournant vers elle alors que la petite main prompt aux engelures lui a saisit le bras avec peine et commence a épuisé sa diatribe en parlant du plaisir non dissimulé que ces hommes prennent en retirant la vie de leurs victimes. Mais la blonde est plus remuée par son état de fatigue extrême que par ses paroles qui n’ont rien de nouveau pour elle.

Maladroitement, Dolores passe une main sur ses épaules et frictionne pour créé un semblant de chaleur. Trop engoncée dans ses discours intérieure, elle s’insulte intérieurement de ne pas avoir vu la détresse de la jeune femme à la place. “Du calme.” Bafouille-t-elle sans savoir quoi lui dire. Dolores regarde autour d’elle, voyant que les rues d’Imogen touchaient a leur fin, et que visiblement elles n’étaient pas encore arrivé chez cette jeune femme.

“T’occupes.” Fit Dolores en déglutissant. “Où est-ce que tu vis pour le moment ?” Et sans savoir quelle mouche l’a piqué, elle continue : “Si tu ne peux plus marcher je t’y portes. Mais je te laisse pas dans la neige.”

Et laisser une victime gratuite à quiconque chasse dans les rues ? Ou n’importe quel taré avide de sang, argent et chair fraîche ? Certainement pas.