☆ 1. Dans son premier souvenir, Scarlett voit le dos de sa soeur qui la traîne en remorque. Elles ne sont pas bien vieilles puisqu'elle reconnaît les robes unisexes dont on affuble les très jeunes enfants. Elles trottinent dans un couloir du manoir, seules, et Scarlett entend au rire satisfait de Louisa qu'il y a une bonne raison à ça. Les deux petites ont réussi à échapper à leur chaperon et se baladent en liberté, affranchies de toute autorité. Scarlett se rappelle s'être demandée si elle devait avoir peur puis avoir réalisé qu'elle n'avait rien à craindre tant que Louisa serait à ses côtés.

   ☆ 2. Elles ne sont pas bien vieilles quand les premières différences apparaissent. À la surface, ce sont les mêmes boucles blondes, les mêmes manières impeccables et la même vivacité. En réalité, les deux petites filles le savent. Louisa est une force de la nature, un ouragan en culotte de mousseline bleu canard, toujours à la recherche d'un nouveau défi auquel se mesurer. Scarlett d'une nature plus romanesque et d'un caractère moins affirmé ressemble à ces orchidées que les jardiniers amateurs de Silverstone s'arrachent. Délicate et sensibles au moindre changement. Ces personnalités à peine façonnées annoncent les jeunes femmes qu'elles deviendront.

   ☆ 3. Alors que Louisa s'acharne à persécuter leur petit frère, Scarlett prend le contrepied de son attitude sans jamais se mêler directement du conflit. Elle lui met de côté des sucreries, répare parfois les conséquences des petites mesquineries de sa soeur et utilise aussi bien son argent de poche que les faveurs parentales pour acheter du matériel de dessin à leur cadet. Elle se sent une responsabilité envers Friedrich et est pas si secrètement très fière de pouvoir jouer les grandes soeurs. On se rengorge autour d'elle de voir une fillette de 6 ou 7 ans jouer les petites mamans avec son cadet.

   ☆ 4. Parce qu'elle donne si bien le change, parce qu'elle a du talent pour la majorité des choses qu'on attend d'elle, personne ne se rend compte que l'anxiété la ronge parfois jusqu'à lui provoquer des crises de panique qu'elle s'arrange pour cacher à son entourage. Elle n'a pas 10 ans et déjà conscience que son attitude ou ses échecs pourraient jeter l'opprobre sur sa famille, sur ses proches qu'elle aime tant. D'un caractère naturellement réservé, elle doit se faire violence pour assurer les représentations en société que ses origines et son genre exigent d'elle. Ses angoisses prennent peu à peu la forme d'une maladresse chronique qui s'exprime lorsqu'une situation l'agite un peu trop.

   ☆ 5. Elle a une quinzaine d'années et la tête pleine de rêves de romance quand un jeune homme l'aborde pour la première fois dans une soirée mondaine. Prise au dépourvu et plus habituée à ce que Louisa soit l'objet de toutes les attentions, Scarlett ne réussit qu'à bredouiller quelques mots avant d'observer son prétendant tourner son attention vers une jeune fille plus sûre d'elle. Ce premier échec marque le début d'une série de déconfitures sentimentales. Anxieuse, Scarlett se prend les pieds dans sa robe, n'arrive pas à s'exprimer ou au contraire se lance dans de grandes tirades, témoignant d'un intellect mal venu chez une femme. Par chance, on regarde ses erreurs comme une preuve de son jeune âge et l'on met ses erreurs sur le compte d'une personnalité excentrique héritée des origines françaises de sa mère.

 ☆ 6. Elle se retrouve à l'infirmerie du Fort un peu par hasard en suivant sa mère dans l'une de ses innombrables œuvres de charité et se sent profondément émue par le sort des malades et des blessés. Loin d'être révulsée par leur condition, elle se porte volontaire pour aider et se découvre un talent pour apaiser les patients. Dans ces moments-là, ses angoisses s’envolent pour laisser s’exprimer sa personnalité. Ses visites deviennent une habitude chassant les rumeurs sur son tempérament instable à la grande satisfaction de sa mère. Même aujourd’hui, il ne se passe pas un mois sans qu’elle y fasse une apparition pour aider. Son tempérament calme et sa douceur font d’elle une bénévole très appréciée.

 ☆ 7. Quand sa sœur disparaît, Scarlett est à la dérive, incapable d'appréhender la notion. Louisa est une constante dans sa vie. Un roc. Et à la perspective de la perdre, ses pensées tourbillonnent en tempête avant de s'égayer comme des papillons. Et elle glisse sur le sol, évanouie, comme morte sous le choc. Elle passe les heures d'incertitude rongée par l'angoisse, essayant de se rendre utile mais ne réussit qu'à se mettre en travers du chemin et finit par se réfugier dans la bibliothèque familiale en attendant des nouvelles. Quand enfin, on ramène Louisa en vie, la jeune femme peut à nouveau respirer normalement. Consciente que sa jumelle a souffert aux mains de son geôlier, elle ne la presse pas de questions mais s'assure qu'elle sache qu'elle sera toujours là si besoin.

 ☆ 8. Ses frères partent, reviennent, vivent leur vie et elle reste sur le bord du chemin. Elle ne se révolte pas comme cet état de fait. Oh elle est un peu jalouse bien sûr mais ce n'est pas la place d'une jeune femme bien comme il faut que de se lancer à l'assaut du monde même si l'idée lui paraît par moment follement romantique. Alors elle vit par procuration via la correspondance qu'elle entretient avec ceux de ses proches et moins proches qui ont quitté Silverstone. Correspondante très appréciée, Scarlett ne manque jamais d'un bon mot ou d'une réponse enthousiaste à la moindre miette de nouvelle.

 ☆ 9. Avec le temps, ses anxiétés en société se sont quelque peu apaisées. Pas parce qu'elle est a gagné en confiance mais plutôt parce qu'elle a appris à connaître la bonne société de Silverstone et que les gens qu'elle croise dans les rassemblements mondains lui sont familiers. Il suffit que quelqu'un vienne de l'extérieur pour intégrer ce petit monde pour que sa voix la déserte et que son envahissante timidité reprenne le dessus. Elle a appris à faire de cette tendance à se mettre en retrait une force plutôt qu'un handicap. Elle ne sera jamais une grande extravertie au cercle social étendu mais les gens ont fini par apprécier sa mesure, son calme et sa discrétion. Si seulement ils appréciaient autant sa culture...

 ☆ 10. Scarlett soupire quand tout le monde regarde ailleurs. Elle soupire comme si elle étouffait dans ce milieu bourgeois où son cerveau ne pourra jamais vraiment s'épanouir, ses soirées interminables qui devraient ressembler à ce qu'elle lit dans les romans mais semblent inexplicablement plus brutales et politiques qu'elle ne le souhaiterait et cette vie étriquée qui les condamnent elle et sa soeur à être plus potiches décoratives qu'humaines. Elle soupire comme si elle se sentait à la traîne, laissée en gare par un monde qui avance, par des amies qui s'épanouissent (ou pas) dans leurs rôle d'épouses et de mères quand elle n'est que fille. Scarlett soupire et se replonge dans ses rêveries et ses livres, incapable de réaliser qu'ele n'est pas si heureuse ou d'imaginer comment changer sa vie.


   

Pseudo/Prénom › Dragon. - âge, pays › La trentaine, Canada. - type de personnage › Poste vacant de la famille des Rosenbach. - Fréquence rp › Une fois par semaine. - comment as-tu connu le forum ? › C'est la faute à Penny. - Chose à dire ? › J'ai tenté de jouer une herboriste il y a fort fort longtemps.