Of specters and fangs

@Cole Borden & Leonora

Le Serpent n’avait pas à hésiter. À peine le pied à terre de sa chevauchée pour atteindre le campement du gang et sa monture confiée à l’un de ses camarades, ses bottes marquées de boue la menaient déjà en direction de la caravane de son leader. Dès son arrivée dans le cercle de roulottes, on lui avait immédiatement indiqué où trouver le seul de la part duquel elle accepterait des ordres. Ses visites étaient un manège bien rodé, en dépit de leur rareté. Disparaître plusieurs jours avec un alibi convaincant n’était pas chose aisée pour Elizabeth Kensington. Enfin, tout restait relatif. La brune n’avait pas exactement fait une entrée fracassante dans la bonne société de Silverstone et il était fort possible que son absence passe inaperçue. Néanmoins, l’empoisonneuse se refusait à baisser sa garde et commettre un impair qui mettrait en danger sa déjà bien faible progression. Son visage et son nom commençaient à devenir familiers pour les bourgeois des environs, après de longs mois de présence parmi eux, mais cela ne faisait pas d’elle l’une des leurs pour autant. Elle avait à peine été en présence de la cadette Oakley, que Cole lui avait explicitement demandé d’approcher. Il en allait de même pour les jumelles Rosenbach. Non, son seul fait d’armes notable était sa rencontre avec Thomas Rosenbach lors du bal de la foire et c’était le hasard qui avait conduit l’avocat à ses côtés. Leonora doutait par ailleurs que cette mince interaction transcende l’existence transparente de Lizzie, mais elle aurait, pour une fois, apprécié de se tromper.

Les Borden et elle avaient trouvé un moyen de correspondre sans mettre en danger Elizabeth, des missives étant discrètement passées à un enfant des rues complice au niveau de l’auberge dans laquelle elle séjournait. Le gitan avait droit à des rapports écrits, courts et concis de la part de sa seconde, sa prose trahissant les défauts de son éducation. Seonaid était gâtée de quelques lignes plus enjouées, l’empoisonneuse craignant que ses absences prolongées ramènent sa protégée à de vieux démons. L’homme n’ignorait donc rien des affres qu’avait rencontrées l’espionne. Leonora ne craignait pas de décevoir celui à qui elle devait tout, contrairement à ce que l’on aurait pu croire. Elle savait son jugement au moins aussi implacable que celui du meneur du clan et c'étaient avant tout ses propres desseins qu’elle semblait incapable de mener à bien. Le camp paraissait lui aussi avoir connu son lot de chamboulements, l’œil aiguisé de l’américaine d’adoption ne manquant pas les signes les plus subtils, malgré la brièveté de ses visites. Elle ignorait si son acolyte et elle auraient le luxe de mentionner ces péripéties, pourtant capitales dans l’existence et l’ordre des Borden. Finalement plantée devant le panneau qui menait à l’antre bien gardé de Cole, la femme y asséna quelques coups de ses phalanges encore gantées. « It’s me. » L’aval du maître des lieux obtenu, elle s’introduisit dans la roulette avec l’aisance d’une habituée. Ses iris recherchèrent immédiatement son ami, s’attendant déjà à la moue austère qu’elle trouverait pendue sur ses traits.

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