|
| |
| | Sam 23 Jan - 23:53 I’ll see you in the future when we’re older La neige tombe à gros flocons, et malgré la lumière matinale, elle voit à peine à quelques pas devant elle. Mais ses souvenirs ne la trompent pas, et bientôt, elle distingue les formes sombres qui indiquent une habitation. À cette saison, les bêtes sont évidemment rentrées, et les enclos forment de grands carrés blancs qu’aucune tache ne vient salir. Peu à peu, la silhouette du Baxter Ranch se dessine devant la cavalière, qui attend toutefois le dernier moment pour glisser à bas de sa monture. Ses bottes marquent de leur empreinte le sol blanchi, et elle sourit comme une enfant de cette image qu’elle laisse derrière elle, ses pas et ceux de son cheval, bientôt recouverts par les flocons qui continuent de tomber.
« HANNAH ? HANNAH, C’EST KATH… INOLA ! »
Le vent emporte à moitié ses mots. Elle espère juste que la propriétaire entendra la moitié importante, celle qui dit qu’elle est une amie, une ancienne amie revenue sur les terres de son enfance. Même si elle vit à l’écart de la population d’Imogen et de ses ragots, elle a entendu des histoires sur Hannah Baxter. Le genre d’histoires qui pousse à prendre des précautions. Elle avance précautionneusement en direction de la grange, où elle espère trouver une place pour sa monture. La porte est fermée, mais pas verrouillée, et elle pousse le battant en appelant à nouveau, plus doucement cette fois.
« Hannah ? »
La seule réponse est un meuglement solitaire. Elle attache son cheval à un poteau, rassemble un peu de foin dans un coin pour qu’il puisse se nourrir en son absence, et repart comme elle est venue, l’oreille aux aguets et des flocons plein les yeux. Elle traverse la cour, et parvient enfin à la porte de la demeure des Baxter. La ferme a bien changé depuis sa dernière visite… Elle frappe du plat de sa main gantée sur le bois, qui renvoie un écho étouffé. Un instant plus tard, une silhouette longiligne apparaît dans l’embrasure, une silhouette qu’elle reconnaît instantanément - contrairement aux lieux, Hannah n’a pas tant changé.
« Hannah ? C’est Inola, je… je suis revenue ! »
« Kathleen ? KATHLEEN ! Kathleen Kearney, reviens ici IMMÉDIATEMENT ! »Elle court si vite qu’elle dérape sur un tas de feuilles mortes et manque de s’étaler de tout son long. Il ne faut pas que son père la rattrape, sinon… Elle refuse d’y penser. Elle ne sait même pas ce que c’est, un “pensionnat”. Tout ce qu’elle sait, c’est qu’elle ne veut pas partir. Alors elle court, sans s’arrêter, sans regarder derrière elle. Elle tourne le coin et une main l’attrape par le col. Une main plus fine que celle de John Kearney Sr, et qui s’empresse de la tirer à l’écart, derrière trois planches branlantes. « Je veux pas partir ! Aide-moi, s’teplaît... Faut pas qu’il me trouve ! » chuchote l’enfant. | | | | |
| | Jeu 18 Fév - 9:20 I’ll see you in the future when we’re older La matinée avait très bien commencé. Hannah s’était occupée de ses bêtes, qui se portaient toutes à merveille malgré la saison difficile. Quelques réparations dans la grange et le ramassage des œufs avaient ponctué le soin de ses animaux. Rapidement, la neige avait commencé à tomber sur le Ranch. Le froid s’était donc installé plus férocement, ce qui obligea finalement Hannah à rentrer pour se réchauffer et préparer à manger. Elle avait été assez consciencieuse pour ne pas être en retard sur sa journée et s’octroya un instant au coin du feu.
La fermière s’attelle maintenant à la préparation de son repas. Il lui faut quelque chose qui lui tienne au corps, pour affronter le froid et le travail, seule au ranch. Elle songe alors qu’une aide lui serait précieuse, mais ne trouve personne en qui elle a suffisamment confiance pour la soutenir. En coupant un morceau de viande, elle se dit que le printemps lui laissera tout le temps de trouver quelqu’un. Personne n’aurait envie de faire de travaux en cette saison. Si seulement Gurba n’avait pas disparu dans la nature, sans rien lui dire. On ne peut pas faire confiance aux hommes, de toute manière.
Prise dans ses pensées, Hannah n’entend pas la voix de Kath. Elle prépare pour son petit déjeuner un ragout bien chaud, avec beaucoup de légumes et un peu de viande. Elle accompagnera ce plat de pain de maïs, ainsi que d’un café, si elle ne décide pas finalement de prendre un verre de whiskey. Baxter n’est pas une mauvaise cuisinière, bien au contraire, mais elle se donne rarement la peine de passer autant de temps dans sa cuisine, incapable de trouver cela important. Pourtant, l’hiver, elle redouble toujours d’efforts, afin de ne jamais être faible. Le pemmican lui manquerait presque, bien plus pratique que ces préparations fastidieuses.
Une voix la fait soudain sursauter et Baxter se coupe légèrement le doigt. Le portant à la bouche, elle regarde par la fenêtre. Une silhouette passe et vient cogner à sa porte. Attrapant un tissu qu’elle enroule autour de son doigt, Hannah laisse ses pommes de terre et va ouvrir la porte. Un de ses colts se trouve toujours dans l’entrée, sur un petit meuble, prêt à être utilisé.
Elle pose sur la jeune femme un regard sévère, qu’elle adresse souvent aux inconnus qui viennent la déranger. Elle ne reconnaît pas celle qu’elle a en face. Pas tout de suite. Ses sourcils se froncent à la mention d’Inola. Elle s’approche un peu plus, afin d’observer ces traits qui lui sont vaguement familiers. Puis son visage s’éclaire, un sourire se dessine et Hannah prend dans ces bras cette enfant qu’elle n’a pas vue depuis trop longtemps.
« Mais… Qu’est ce que tu fais là ? T’es revenu d’puis quand ? » Elle tient alors ses épaules dans ses mains, l’éloignant légèrement pour mieux la regarder. Quelle femme était-elle devenue ? Une beauté sans pareille. « Que tu es belle. Tu as grandi, c’est incroyable. » Elle reste un instant à observer la jeune femme, avant de se rendre compte qu’il fait incroyablement froid dehors. Comme une vielle mère, elle fait entrer Kath en la poussant à l’intérieur du plat de la main, observant les étendues neigeuses devant sa maison. « Rentre. Il fait froid. » Refermant la porte, Hannah récupère le tissu qu’elle avait laissé tomber, avant d’entrer dans le salon. « Entre, fais comme chez toi. Assis toi. J’vais t’chercher à boire. Du café ? Du whiskey ? Assis toi, j’t’amène une couverture. » Hannah s’active et va dans la cuisine pour préparer un café à son invité, un sourire aux lèvres. Elle l’écoute d’une oreille attentive, se pressant pour la rejoindre dans le salon. Elle n’en croit pas ses yeux. Décidément, le passé vient souvent toquer à sa porte ces derniers temps.
New Hanover, 1872 △ 15 years earlier Hannah prenait une pause bien méritée, fumant sa cigarette les mains dans les poches de son pantalon et le visage caché sous son chapeau. La porte de son ranch coinçait et elle s’était attelée à sa réparation. Elle avait l’esprit ailleurs depuis maintenant trop longtemps. Le drame qui avait touché son frère ne l’accablait que trop. Les nouvelles concernant sa nièce n’étaient pas bonnes et elle s’inquiétait terriblement.
Elle entendit des cris. Un homme hurlait et contre toute attente il s’agissait du vieux Kearney. Du haut de sa vingtaine d’années, Hannah ne supportait pas bien le caractère rageur de l’homme avec qui elle s’était déjà bien souvent disputée. La seule chose que ce grincheux avait faite de bien était sa fille qui était un amour et qu’Hannah appréciait tout particulièrement. La petite lui rappelait sa propre personne et cela avait le dont de toucher son cœur qui était loin d’être tendre, surtout à cette époque. Mieux que personne, elle savait ce que cette gamine pouvait ressentir.
Comme un petit chien qui fuit les coups de son maitre, Kath - qu’Hannah connaissait davantage sous le nom d’Inola - passa devant Hannah sans la voir. Cette dernière attrapa la petite par le col, en l’entraînant légèrement à l’écart, afin que son père ne les trouve pas. La cigarette à la bouche, elle s’agenouilla, se mettant à la hauteur de Kathleen. Elle tenait ses épaules entre ses mains, le regard sévère. Pourquoi pensait-elle qu’elle devait partir ? Quelle idée !
« Qu’est-ce que tu dis Inola ! Tu veux aller où ? Il te veut quoi encore ton père ? Tu veux qu’je lui botte les fesses ? » Elle lui lança un petit sourire complice, sa cigarette bougeant au rythme de ses paroles.
« Baxter ! BAXTER ? Mais elles se foutent de moi. Elle va voir de quel bois j’me chauffe. KATHLEEN, j’vais t’faire passer l’envie de déguerpir comme ça. »
La voix de Kearney agaça tout particulièrement Hannah, qui se leva, en vérifiant que son colt était bien chargé. De quel droit s’aventurait-il chez elle en râlant de la sorte ? Elle pencha la tête pour rassurer la petite. « C’est dissuasif. J’vais pas tirer sur ton père. » Mais j’aimerais bien.
| | |
| |