bannière
Le forum est la propriété du staff et de ses membres. Toute copie, même partielle, est prohibée.

Guns & WhiskyFORUM WESTERN · NOUS SOMME EN ÉTÉ

1889. À la lisière de l'Etat de New Hanover, la petite ville forestière d'Imogen compte un peu plus de 500 habitants. Plus connue pour ses ranchs que pour ses pépites, elle est l’exacte représentation des espoirs et des échecs de tous ceux qui ont pu croire au rêve américain. Son seul lien avec la civilisation est le chemin de terre creusé par le passage des diligences, droit vers la station de gare de l'autre côté de la frontière qui mène vers l'Etat de West Esperanza. Cette route est connue pour ses braquages incessants, causés par le gang des O’Reilly. En plus de terroriser la population - leurs méfaits sont racontés dans tous les journaux de la région ; ils rendent périlleux les voyages vers la grande ville : Silverstone. Cité minière dirigée par la respectable famille des Rosenbach, prospère et moderne ; on pourrait presque croire que c’est un lieu où il fait bon vivre. Mais, derrière la bonhomie de son shérif, les sourires de ses prostituées et les façades fraîchement repeintes, l'influence criminelle du Silver Gang grandit de jour en jour. Lire la suite

staffeux
Clyde King est la fondatrice du forum ! Elle se genre au féminin et ses autres comptes sont : Isaac, Mila, Amitola et Cole. PROFIL + MP
staffeux
Makoyepuk est modératrice du forum ! Elle se genre au féminin et ses autres comptes sont : Kilian, Ichabod, Amelia, Benicio et Howard. PROFIL + MP
staffeux
Pearl Hennessy est modératrice du forum ! Elle se genre au féminin et ses autres comptes sont : Maxence, Nadie, Jacob et Grace. PROFIL + MP
staffeux
Liam Hennessy est modérateur du forum ! Il se genre au masculin et ses autres comptes sont : Arthur, Chuy, Dino et Maria. PROFIL + MP
staffeux
On ne cherche pas de nouveau Shérif pour l'instant, mais qui sait, un jour tu feras peut-être régner l'ordre et la lois sur ce forum ?
FAIT DIVERSDepuis l'attaque de la banque, Mr le maire, Henry Rosenbach, invite les citoyens à redoubler de prudence - il craint que cet acte n'inspire d'autres scélérats, et met en garde ses concitoyens quant au danger qui rôde dans les grandes plaines. Ainsi, il préconnise les voitures de poste, ou encore le train pour se déplacer.
BONNES AFFAIRESN'oubliez pas de passez par le quartier commerçant de Silverstone pour faire vos emplettes dans l'épicerie des Rinaldi ! Vous y trouverez moultes boîtes de conserve, ainsi que quelques plats tout chaud, tout droit sortis de la cuisine et parfois même servi par la petite fille des propriétaires.
RUMEURUn prisonnier se serait échappé du Fort de Silverstone. Les rumeurs les plus folles circulent : certains s'imaginent qu'il s'agit encore d'un coup des bandits qui ont attaqué la banque, d'autres, un peu moins terre-à-terre, parlent d'une attaque d'anciens confédérés. La justice, quant à elle, ne commente aucune e ces hypothèses.
PETITE ANNONCEDepuis la fonte des neiges, le village d'Imogen est fière d'annoncer la réouverture de son marché agricole ! Chaque mercredi, les producteurs de New Hanover sont invités à monter leur stand dans la rue principale et faire commerce de leur légumes, viandes, poules et autres peaux ! Troc autorisé.
RUMEURDes histoires de Dame Blanche circulent dans la région de West Esperanza : certains habitants de Silverstone et des alentours jurent avoir apperçu un fantôme ! Les plus jeunes s'amusent même à invoquer l'ectoplasme dans un nouveau jeu ridicule - mais qui passera bientôt de mode : celui du ouija. Le temple prie pour leur salut.
Never Fade Away
The Mighty Odss
prédéfini
prédéfini
prédéfini
VOTEZ

Le forum a été créé le 10.01.2020. La page d'accueil a été designée et codée par Artemis, pour Artifices. Le reste du design a été pensé et codé par GHOEST.

Toutes les deux heures !


 
AccueilAccueil  FAQFAQ  RechercherRechercher  Dernières imagesDernières images  MembresMembres  GroupesGroupes  S'enregistrerS'enregistrer  Connexion  
-40%
Le deal à ne pas rater :
-40% sur le Pack Gaming Mario PDP Manette filaire + Casque filaire ...
29.99 € 49.99 €
Voir le deal
anipassion.com

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Aller en bas
Con Te Partirò ft. Filippa [TW C'est plutôt sanglant]
Chuy
Chuy
Since : 18/01/2021
Messages : 227
Faceclaim : Diego Luna
Crédits : Ghoest
DC : Liam, Arthur, Dino et Maria
Con Te Partirò ft. Filippa [TW C'est plutôt sanglant] F78a2b07fd145d9b970ef90b5d87720dfc5adcc2
Age : La vingtaine
Job : Crapou à tout et rien faire
Habitation : Il squatte la ferme de Nuttah, parfois le temple d'Imogen
Disponibilité : Opé
Jeu 25 Fév - 19:30
Con Te Partirò

Ce coin là de Silverstone regorgeait toujours d’une animation toute particulière devenue banale au fil des mois. Le quartier remuait de vie, dénotait avec certains coins plus austères qu’on trouvait dans la ville d’argent. Chuy avait commencé à traîner là pour les quelques mots qu’il arrivait à déchiffrer lorsque l’accent ne charcutait pas trop leur prononciation. Il s’émerveillait de réussir à attraper quelques brides (trop brèves) de conversation. Parfois il associait certains termes simplement parce qu’ils semblaient voisins. Chuy restructurait des conversations complètes comme ça l’arrangeait. S’il aimait traîner autant par ici, c’est parce que les badauds étrangers éclataient de couleurs dans leurs conversations. Ils parlaient fort et riaient à gorge déployée sans la timidité des filles blanches qui se voulaient élégantes et raffinées. Les tons étaient familiaux et chaleureux, Chuy s’y noyait joyeusement pour retrouver la nostalgie du pays en étirant les limites qu’offrait la réalité. Chaque jour où il devait rejoindre le cimetière, il faisait un détour exprès par le quartier italien le matin et le soir (il n’avait aucune idée qu’on l’appelait comme ça et comme beaucoup de choses, il ne le nommait simplement pas).

Parfois, quand il ne savait pas quoi faire car Maxence n’avait pas besoin de lui ou n’était pas là pour le regarder travailler, il restait devant la petite épicerie à l’observer du trottoir d’en face. Il ne comprenait pas (ou très mal) ce que les étrangers s’y disaient mais Chuy trouvait dans leurs échanges une familiarité réconfortante. Il aimait regarder les petites grands-mères dont les mains maigres et ridées ressemblaient à des grandes araignées aux pattes cassées qui faisaient danser les billes d’un chapelet sous leurs manches. Plutôt que des prières il les imaginait mieux chuchoter des messes-basses entre elle, à braver le soleil d’été comme le froid de l’hiver assises sur le vieux banc pour ne louper aucune miette des allées et venues de la rue. Chuy avait déjà échangé des insultes comme on échange des balles avec des gamins qui rodaient aussi dans le coin, certaines étaient universelles et comprises, d’autres pouvaient facilement se deviner. S’il aimait l’épicerie c’était pour les odeurs irisées qui s’en échappaient et pour le monde qu’elle semblait brasser dans la journée.

Avec ses vêtements qui tenaient plus des loques et ses plaies mal refermées qui boursouflaient encore son visage, Chuy détonait entre les quelques clients plus récents et habitués du commerce. A cette heure-ci, il y avait un peu plus de monde qu’à l’accoutumé. La boutique n’était pas aussi populaire que ceux tenus par les habitants à l’accent plus typique de Silverstone, et c’était aussi là tout son intérêt. Les hommes de loi avaient moins de scrupule à laisser se démerder les étrangers. Parce qu’il n’était pas question que des envahisseurs viennent leur voler leur boulot premier de settlers quand même.

Il avait flâné le long des étales et fouiné dans les étagères, regardé des bouteilles qu’il ne pourrait jamais se payer et tâté quelques légumes pour le plaisir d’avoir l’air occupé et consciencieux. Chuy imitait avec application les regards concentrés et spéculateurs des mères qui cherchaient la perle rare entre les pommes. Finalement, par une bousculade malencontreuse et beaucoup de maladresse (il l’avait toujours été) il envoya une dame buter contre une pile de conserves. Elles tombèrent dans un concert tonitruant, allèrent rouler à droite et à gauche. Sous les remontrances qui devaient s’entendre jusqu’à Imogen Chuy se fondit en excuses. Il ramassa deux des conserves qui avaient buté contre ses pieds, les posa précipitamment ou il pouvait et s’éclipsa. Il balbutiait encore des excuses et avait fait à peine deux pas à l’extérieur qu’il sortait de sa manche une barre de chocolat. Trésor inestimable subtilisé plus tôt lors de son inspection des lieux. Il aurait très certainement dû partir en courant plutôt que d’engouffrer la moitié de la sucrerie dans le fond de son gosier comme si sa vie en dépendait.
made by black arrow
Chuy
Revenir en haut Aller en bas
Filippa Rinaldi
Filippa Rinaldi
Since : 30/11/2020
Messages : 318
Name : Cendre
Faceclaim : Oona Chaplin
Crédits : I-rain (gifs) | Wanderlust (avatar)
DC : Irina | Blair
Con Te Partirò ft. Filippa [TW C'est plutôt sanglant] Boeq
Age : 29 ans
Statut : La revanche a fait d'elle son épouse, personne ne sait qui des deux deviendra veuve
Job : Cuisinière officiellement | Nouvelle comptable des Hennessy en compagnie de Wyatt Smith | Réalise des petits boulots illégaux avec un groupe d'italiens de Silverstone | Ancienne contaiuola de la famille Rinaldi
Habitation : Petit étage en piteux état au-dessus de l'épicerie de ses grands-parents, Silverstone
Disponibilité : Dispo [1/3]
Ven 26 Fév - 0:16

Con Te Partirò
Un silence de cathédrale était tombé dans la petite épicerie des Rinaldi, bien qu’elle n’eut rien d’un édifice religieux, au contraire. Peut-être un aveugle aurait-il pu confondre les piles de conserves de pesto avec des colonnes ciselées, mais l’odeur de sauce qui baignait le commerce et qui ne ressemblait en rien aux parfums s’échappant traditionnellement des encensoirs l’aurait vite remis sur le droit chemin.
Malgré l’étroitesse de la boutique - dont les vilaines langues n’osaient pourtant pas se plaindre - il y régnait toujours une effervescence joyeuse mêlée de voix chantantes, de gentilles bousculades et surtout, ce que Filippa préférait, de bruits de caisse que l’on ouvrait pour y glisser les pièces et les billets, hérités de son dur labeur, puis que l’on refermait avec un « clic » satisfaisant.

Alors, lorsque les soirs d’hiver tombaient et que la vie se trouvait comme soufflée par les bourrasques du crépuscule, l’épicerie s’enfonçait dans un silence assourdissant qui transformait le moindre bruit en hurlement. La nuit essayait de s’engouffrer par la vitrine, par la portée vitrée, seuls trous noirs vers l’extérieur, à grands coups de bras sombres qui venaient ramper sur le parquet en y plantant leurs ongles dépourvus d’étoile. L'intérieur de l'épicerie était désespérément visible depuis la rue alors qu'à l'inverse, le trottoir n'était qu'un maelström de secrets chimériques.
Simplement éclairée par la flamme vacillante de la lampe à huile, l’échoppe luttait pourtant, inondée d’une lumière orangeâtre et changeante qui transformait chaque meuble, chaque légume en ombres difformes projetées sur les murs de bois grinçant. Et l’ombre la plus monstrueuse de toutes était peut-être celle de Filippa qui, assise derrière le comptoir, faisait les comptes, voutée comme un usurier. Il n’était pas rare qu’elle préfère travailler dans l’épicerie plutôt qu’à l’appartement, juste au-dessus. Aussi les rares passants ne s’étonnaient plus de la voir à sa besogne, le nez dans les billets, la concentration plaquée sur le visage.

Un frisson leva les cheveux de sa nuque. Sans qu’elle ne puisse expliquer pourquoi, elle se retourna brusquement, persuadée qu’on l’observait depuis l’arrière-boutique. Déjà, elle était prête à s’armer du hachoir que les Rinaldi cachaient sous le comptoir, par pure précaution. Mais ses yeux ne rencontrèrent que le néant calme et rassurant de l’obscurité où, elle le savait maintenant, personne ne l’épiait.

Elle cligna des yeux pour se ressaisir et décida finalement que s’en était assez pour ce soir. Après un dernier regard vers les chiffres qui s’alignaient avec méthode - celle de son oncle - sur les feuilles, elle referma le carnet avec un claquement sec.
Etouffant un bâillement dans le creux de son coude, elle s’avança vers la porte pour tourner la petite plaque de bois et faire apparaître « FERMER » aux yeux des badauds.

De l’autre côté de la rue, un mauvais esprit l’observait.

Son stoïcisme l’empêcha de sursauter.

Hirsute et efflanqué, il ressemblait à ce que sa grand-mère lui décrivait quand, petite, elle lui racontait d’une voix lugubre l’histoire du mangeur de foie. « Encore lui, » songea-t-elle une fois la surprise passée. Il y avait des jours que ce chien errant rôdait comme un affamé dans le quartier. Filippa n’était pas la première à le voir. Certains clients se méfiaient de la présence de ce pauvre hère couvert d’hématomes et vêtus de guenilles qui ne signifiait rien de bon. Les enfants lui avaient même murmuré qu’il travaillait au cimetière et que c’était forcément un feu-follet. Puis, la révélation faite, ils se signaient grossièrement et retournaient harceler le petit fantôme à coup de pierres dans les jambes pour s’amuser à le voir courir.

Lorsqu’il la vit ouvrir la porte, il fila à toutes jambes. La nuit étant sont amie, il disparut bien vite derrière les bâtiments, mais la napolitaine entendit encore un moment le martèlement de ses pieds contre la terre battue.



*



Lorsque Filippa jaillit de l’arrière-boutique pour remplacer son grand-père, elle sut derechef que quelque chose n’allait pas.

Les clients avaient remonté leurs foulards sur leur nez et si certains auraient pu croire à un braquage, l’allure chancelante des grands-mères mécontentes qui peuplaient l'échoppe suffisait à chasser loin, très loin cette idée.

Elle ne tarda pas à comprendre l’origine d’un tel comportement. Un fumet infect lui chatouilla les narines et se glissa jusque dans sa gorge. Un vieux près du comptoir râla qu’un blaireau était sûrement mort quelque part et qu’il faudrait vite s’en débarrasser avant que les rats ne le trouvent.
Une rapide fouille du regard indiqua pourtant à la mafieuse que le blaireau mort avait bon dos et que le véritable coupable peinait à se fondre dans la masse.

Le feu-follet furetait comme une musaraigne entre les étals et touchait de ses petites mains crasseuses les pommes et les oranges qui s’amoncelaient en piles colorées. Une moue de dégoût déforma sa bouche d’une grimace. Comment allait-elle pouvoir les vendre, maintenant ? Elle fut bientôt imitée par les voisines directes du chien errant qui prirent leur courage à deux mains et fuirent sous un couplet d’insultes le visiteur étranger.
Pour finir d’enfoncer le clou, il enfonça son coude dans les côtes de la vieille Bianchi qui manqua de s’étaler par terre et qui, pour la forme, se rattrapa de justesse à une étagère. Dans son mouvement, elle envoya valser les conserves de pêches au sirop qui éclatèrent au sol comme des fruits trop mûrs.

« Ma non è possibile ! Che stupido ! E che odore ha ! » fulmina la cliente en se relevant, assistée par deux bons samaritains.

Elle entraîna avec elle quelques autres râleurs qui n’attendaient que cela depuis que le vagabond s’était décidé à faire son entrée. La napolitaine prit une profonde inspiration et entreprit de courir après le garçon, à grands pas secs.

Et quelle ne fut pas sa surprise lorsqu’à travers la vitrine, elle l’aperçut s’empiffrer de chocolat. Un coup d’oeil vers le présentoir lui indiqua qu’il manquait en effet une barre. Or, elle n’en avait vendue aucune ce matin-là.

C’est avec un sourire contrit qu’elle franchit la porte à son tour, dans un tintement joyeux de clochette. Elle l’observa par-dessus son épaule.

« Qu’avons-nous là ? » demanda-t-elle avec une fausse gaité. Sa main vint se refermer sur son épaule comme la serre d'un vautour sur un mulot. Il sentait encore plus mauvais désormais qu'elle était proche de lui.

Avant de rajouter dans un murmure souriant :

« Ne cours pas. Si ce n'est pas moi qui te rattrape, quelqu'un d'autre le fera. D’accord ? »



________________

Vedi Napoli e poi muori
Fratelli d'Italia
Filippa Rinaldi
Revenir en haut Aller en bas
Chuy
Chuy
Since : 18/01/2021
Messages : 227
Faceclaim : Diego Luna
Crédits : Ghoest
DC : Liam, Arthur, Dino et Maria
Con Te Partirò ft. Filippa [TW C'est plutôt sanglant] F78a2b07fd145d9b970ef90b5d87720dfc5adcc2
Age : La vingtaine
Job : Crapou à tout et rien faire
Habitation : Il squatte la ferme de Nuttah, parfois le temple d'Imogen
Disponibilité : Opé
Sam 27 Fév - 20:26
Con Te Partirò

Une serre de vautour vint agripper son épaule, Chuy sentit des doigts noueux s’enfoncer contre sa clavicule. Sans réfléchir il engloutit ce qui restait du chocolat. Pas de preuve, pas de crime selon lui. Pourtant des preuves il en était barbouillé et ses dents en étaient noires. Sans se faire prier, le gamin savait être coopératif quand il fallait, il se tourna vers l’oiseau de proie à la voix doucereuse. Il lui sourit, les sourcils hauts sur son front dans une expression de fausse surprise.

Il n’avait pas besoin de vérifier les alentours pour savoir que partir en courant était une mauvaise idée. Si elle ne faisait pas peur du tout (il suffirait de la pousser suffisamment fort pour qu’elle s’effondre comme une brindille et de lui mettre un coup de pied dans le ventre ou les seins pour qu’elle reste par terre un moment, il en était certain) c’était bien plus le cas des autres visages coutumiers du coin. Et ce n’était pas les visages qui l’inquiétaient mais plutôt leurs gros bras. Il aurait le temps plus tard de regretter de ne pas avoir attendu pour manger ce chocolat. Idiot. Pour l’instant, il évaluait ses chances de s’en tirer face à la petite dame assez élevée. Chuy dépassait la femme de plusieurs pouces, et chez lui la taille de ses potentiels adversaires avait une importance capitale comme mesure du danger. Il avait toujours été simpliste dans ses raisonnements. Il n’était pas le couteau le plus aiguisé du tiroir, loin de là.

« ¿De qué hablas? Lo siento, no entiendo señito. Ves, tienes acento. Habla lentamente, por favor. » Loin de suivre les réclamations hypocrites qu’il servait à la jeune femme, il ne faisait aucun effort pour se rendre particulièrement compréhensible lui-même. En même temps son intention n’était pas de l’être en ce moment précis. Il s’essuya grossièrement la bouche avec l’intérieur de sa main ce qui eut pour effet d’étaler le chocolat sur son menton. Il haussa le ton pour s’adresser de nouveau à elle, comme si elle était demeurée ou idiote et agita son index au niveau de sa propre bouche. « Ar-ti-cu-las, vale. »

Chuy savait que cette femme travaillait dans l’épicerie parce qu’elle y passait la majorité de son temps. La sévérité de ses traits se poursuivait dans son regard qu’il soutenait avec un amusement non feint. Ses grands yeux globuleux lui rappelait ceux d’une chouette, une chouette endeuillée et austère. « Deberias sonreir, si no tendrá arrugas. » Chuy lui sourit, dévoilant ses dents sales comme pour la narguer un peu plus. Et au pire des cas, elle l’enverrait chez le shérif. Il connaissait son bureau par cœur et savait que Maxence serait obligé de rappliquer pour payer et sa caution et son repas sucré. Une bonne raison d’y terminer, au final. Et tant pis si pour ça il fallait supporter el bigote quelques instants.
made by black arrow
Chuy
Revenir en haut Aller en bas
Filippa Rinaldi
Filippa Rinaldi
Since : 30/11/2020
Messages : 318
Name : Cendre
Faceclaim : Oona Chaplin
Crédits : I-rain (gifs) | Wanderlust (avatar)
DC : Irina | Blair
Con Te Partirò ft. Filippa [TW C'est plutôt sanglant] Boeq
Age : 29 ans
Statut : La revanche a fait d'elle son épouse, personne ne sait qui des deux deviendra veuve
Job : Cuisinière officiellement | Nouvelle comptable des Hennessy en compagnie de Wyatt Smith | Réalise des petits boulots illégaux avec un groupe d'italiens de Silverstone | Ancienne contaiuola de la famille Rinaldi
Habitation : Petit étage en piteux état au-dessus de l'épicerie de ses grands-parents, Silverstone
Disponibilité : Dispo [1/3]
Sam 27 Fév - 22:59

Con Te Partirò
Il y avait un verset de la Bible qui vint en tête de Filippa tandis que le jeune brigand renvoyait à son faux sourire une risette malicieuse et badigeonnée de chocolat. « Si le voleur est surpris dérobant, et qu’il soit frappé et meure, on ne sera point coupable de meurtre envers lui. Exode 22:2. » Il était également mention que si le criminel survivait, alors il était tout à fait possible de le vendre comme esclave.
Ces simples mots, clairs comme de l’eau pure, avaient tôt fait - chez l’italienne - de prendre le pas sur les notions d’entraide et de pardon également défendues par la religion catholique. Et ce en particulier lorsque le-dit voleur, loin de s’alarmer de la situation, en jouait et la prenait pour la dernière des imbéciles. « Cette fois, » songea-t-elle alors qu’il baragouinait. « J’ai atteint de nouveaux sommets. » Narguée par une raclure de fond de bidet qui en plus d’en avoir l’apparence, en avait l’odeur. Moquée par un chien des rues alors que quelques années auparavant, la simple mention de son nom de famille aurait suffit à les faire tous disparaître. Il en fallait d’ordinaire plus pour piquer la fierté de la jeune femme, mais les pitreries du petit imbécile la renvoyait avec brutalité au triste présent et à ce qu’elle n’était plus.
Filippa n’en pouvait plus de ressasser et pourtant tout s’obstinait à la ramener à hier et à ce glorieux passé dont elle ne pouvait faire le deuil. C’était un ressac, un poids attaché à la jambe qu’elle traînait en boitant. Alors, elle avait décidé de se venger envers le malheureux voleur qui, décidément, avait mal choisi son jour pour s’essayer à l’art de la subtilisation.

C’est donc avec un brin de nostalgie et presque désolée par ce qui n’allait pas tarder à arriver qu’elle soupira en secouant la tête. S’il avait su. S’il avait eu la moindre idée, il serait aller voler quelqu’un d’autre. Ses lèvres s’étirèrent un peu mieux jusqu’à dévoiler la pointe blanche de ses dents. Ses yeux, en revanche, restèrent aussi froids que ceux d’une poupée.

« Il t’en reste un peu là, » lui indiqua-t-elle avec toujours le même ton doucereux.

Ses doigts se refermèrent un peu plus sur son épaule tandis que de son autre main, elle essuyait d’un coup de pouce grossier le menton brun souillé de sucre. Le Ciel savait où avait traîné cette vilaine bouche menteuse et elle se promit de se laver précautionneusement les mains une fois la besogne accomplie.

« Ah ! » s’écria la vieille Bianchi dans un tintement de clochette indiquant sa sortie sur le perron. « Lo sporco diavoletto ! L'ho visto rubare la cioccolata, l'ho visto ! E mi ha spinto tra le pesche ! Questo gli taglierò la gola come un maiale ! »

L’aïeule pointa un doigt griffu et outré vers le jeune voleur. D’autres clients s’agglutinèrent par-delà les épaules tombantes de la vieilles. Leurs visages plissés d’une curiosité morbide jaillirent de derrière ce corps décharné comme autant de taupes hors de leur trou. Quant aux vitrines, elles étaient déjà couvertes de l’impatience des autres ; les souffles l’embrumaient si bien qu’on distinguait à peine leurs silhouettes grises, tremblantes d’impatience.
Car ici, tous étaient italiens. Et tous savaient le sort que l’on réservait aux voleurs.

« Lo so, lo so, signora Bianchi, » lui répondit-elle avec un hochement de tête.

« C’est bien, » pensa Filippa. « Maintenant, j’ai un public. » Elle n’avait jamais eu l’occasion de montrer l’exemple dans l’épicerie en cinq ans de présence à Silverstone. Peut-être parce que tous, ici, vivaient en communauté fermée et que tous, ici, avaient suffisamment goûté à la notion de respect pour la comprendre.
L’étranger avait besoin d’une leçon. Et les badauds avaient besoin qu’on leur rappelle ce qui arrivait lorsque l’on volait les Rinaldi. Ce n’était pas qu’une question de barre de chocolat. Désormais, c’était une question de réputation.

« Allez, suis-moi qu’on en finisse, » persifla-t-elle.

Sa main harponnée à son épaule se transforma en petite tape d’encouragement.

Puis, elle le bouscula en avant avant que la grosse paluche du signor Spada ne jaillisse de l’amoncellement de clients pour attraper le feu-follet par le colbac, comme un piège à loup qui enserrerait la patte d’un animal fuyard. Il l’attira à sa suite et les visiteurs se dépêchèrent bien vite de se coller contre les murs pour dégager le passage, mais également pour éviter le moindre contact avec le jeune blaireau (les odeurs, ça imprégnaient). Nul n’avait envie de toucher le visiteur tombé en disgrâce, de crainte que la souillure ne se propage.

Filippa suivit de près le petit fantôme. Derrière elle, les clients fermèrent la marche en une masse informe aux yeux grands ouverts.

Sur le comptoir, nonno avait déjà sorti le hachoir dont sa petite-fille avait manqué de se servir la nuit précédente, alors déjà épiée par le voleur. « Ironique. » La lame était belle et brillait d’un bel éclat doré sous le soleil de la fin d’après-midi. Un rayon s’amusait même à se refléter et à renvoyer une tâche lumineuse au plafond. À côté de l’ustensile, une jolie pince à arrache-clou était installée.

De ses gros bras, Spada écrasa la tête crasseuse de l’étranger sur le comptoir et aplatit la main droite du garçon un peu plus loin pour éviter les petites dents teigneuses du renard chapardeur. D’ordinaire, c’était la gauche que l’on coupait (il s’agissait de celle du diable), mais la plupart des hommes étant droitiers, la napolitaine préférait que le handicap soit durable. Avec sa hanche droite, l'homme immobilisa le bras gauche du rongeur en le pressant contre le rebord du meuble. Il y eut un frisson parmi les clients lorsque Filippa se saisit du hachoir.

« Dans notre pays, les mains des voleurs, on les coupe et on les donne aux cochons. C’est de la cibo gratuite. Après, on se sépare bons amis. Bon, nous n’avons pas de cochons, mais non importa. »

Elle se glissa de l’autre côté du comptoir, à la droite de son grand-père. Plus de sourire, cette fois. Elle ne chercha guère plus à articuler.

« Je vais t’expliquer doucement, mais enfin tu dois bien comprendre où je veux en venir. Si tu t’excuses, si tu me dis que tu as volé, mais que tu es désolé, » elle fit cliquer la pince, « je t’arrache seulement quelques ongles. D’accord ? Tu as saisi ? Fais oui avec ta tête. »

Après avoir tapoté la joue de la musaraigne d'un geste bonhomme, le signor Rinaldi toussota avant de prendre une profonde inspiration. Filippa n’avait pas remarqué qu’il avait tenu son souffle jusqu’à maintenant.

« È un’infezione ! Staccerà la carta da parati dai muri ! »

Il y eut un murmure d’approbation parmi le public.



________________

Vedi Napoli e poi muori
Fratelli d'Italia
Filippa Rinaldi
Revenir en haut Aller en bas
Chuy
Chuy
Since : 18/01/2021
Messages : 227
Faceclaim : Diego Luna
Crédits : Ghoest
DC : Liam, Arthur, Dino et Maria
Con Te Partirò ft. Filippa [TW C'est plutôt sanglant] F78a2b07fd145d9b970ef90b5d87720dfc5adcc2
Age : La vingtaine
Job : Crapou à tout et rien faire
Habitation : Il squatte la ferme de Nuttah, parfois le temple d'Imogen
Disponibilité : Opé
Dim 28 Fév - 18:49
Con Te Partirò

Chuy n’avait jamais suscité de la pitié, aussi loin qu’il pouvait s’en souvenir. Pas de cette pitié attendrie réservée aux petits enfants sages aux boucles blondes et aux joues roses et propres. A l’adolescence il avait dû arrêter d’essayer désespérément de l’attiser, c’était très gênant pour tout le monde et principalement pour lui. Il avait fini par accepter cette triste réalité. A présent il ne restait plus que l’insolence crasse pour se défendre et la désinvolture afin d’alléger les esprits. Ou les échauffer, ce n’était que le sien que Chuy voulait calmer. Il était devenu un véritable artiste dans la dédramatisation de chacun de ses gestes, se déresponsabilisant éhontément de tout. Chuy avait peu d’amour propre et de se fait rarement honte.

Toujours le ton aussi léger que le cœur et l’intérieur de sa caboche il avait remercié la femme pour son geste faussement maternel de sorte à s’enfoncer dans l’impertinence. Chuy avait joué, il avait perdu. Bah, ça arrivait alors il se cachait sous la provocation. Jusqu’à la prochaine partie, jusqu’à la prochaine porte de sortie. Il montra ses dents dans un sourire narquois à la vieille quand celle-ci surgit aux côtés de l’autre sans comprendre ce qu’elle bavait. « Sigue hablando, eso es… Sí, sí, por supuesto. » Il avait l’habitude de parler fort mais celle qui avait été la victime de ces petites manigances avait également un bon coffre, il fallait lui donner ça. Elle recouvrait sans mal ce qu’il baragouinait pour meubler, seule défense qu’il pouvait encore trouver. Le public se faisait de plus en plus curieux et de plus en plus étouffant. Il leur tirait la langue en se la passant sur ses lèvres gercées et les jaugeait d’un air bête.

Conciliant, il écouta la dame et commença à jouer des coudes autour des curieux (qui de toute façon l’évitaient bien spontanément). Il n’eut plus besoin de prendre cette peine quand une gigantesque paluche vint accrocher son col. Chuy manqua de s’étrangler et le signifia par un gargouillement incontrôlée qui lui venait du fin fond de la gorge. Il posa sa propre main sur celle de l’homme pour y chercher du leste mais ne rencontra pas un franc succès. « ¡ Aguas ! Ça va ! Je viens ! » Parce que de toute façon tout ça était inévitable alors autant économiser du temps à tout le monde et surtout à lui (le croquemort allait le tuer s’il arrivait encore avec du retard). Une raclée contre du cacao, l’échange était des plus équitables se dit Chuy car ce n’était pas tous les quatre matins qu’on pouvait en avoir après tout. Il regrettait juste de ne pas en avoir profité plus longtemps du coup et de s’être empiffré comme un goinfre. Mais cette peau de vache le lui aurait pris.

Toujours prêt à rendre service (autant que ça aille vite maintenant), Chuy aurait bien spontanément continué après le comptoir pour aller dans l’arrière-boutique. Ça tombait sous le sens qu’une correction ne se donnait pas au milieu d’un magasin. Il n’eut pas le loisir d’y réfléchir plus longtemps à partir du moment où son visage rencontra le bois du meuble non sans douleur. Le gamin cessa subitement de se montrer accommodant et se tortilla pour échapper à la prise de son geôlier. Plus fort, plus grand et plus large, Chuy ne voyait qu’un échappatoire à tout ça qu’en imitant le saumon frétillant. Il se tordait le poignet en grognant, tirait comme un beau diable et comme s’il voulait se le disloquer. Possédé par un élan de survit dont il ne s’était pas montré jusque-là vraiment animé, Chuy se démenait dans le vent face à une montagne qui ne lui laissait rien. Il cracha quelques insultes pour finalement se taire et s’immobiliser aux menaces très explicites de la dame « ¿ Mande ?»

Chuy s’appliqua de nouveau doublement à essayer de dégager sa main ou sa tête, la situation devenant bien plus pressante d’un coup. Il prenait de grandes goulées d’air avec difficulté, sentait la panique grossir entre ses poumons et dans sa gorge. Sans que cela ne rencontre beaucoup de succès il voulut donner des coups de jambes ou de coude mais c’était peine perdu. Tout de suite, c’était difficile de se concentrer sur ce que la vieille chouette racontait. Il fit quand même un effort, n’ayant de toute façon écouté les consignes qu’à moitié. « Ça va ! Je suis désolé ! Je suis désolé ! Je peux payer, d’accord ? Je peux-y’a le foss-le… » il cherchait ses mots, replia ses doigts contre la paume de sa main tout en continuant de s’agiter. « Le croque-mort, il peut payer, d’accord ? Je-Je travaille avec lui et il a beaucoup-il sait ou y’a l’argent ! Je suis désolé, c’est bon, ça va ! Arrête ! » Il vomissait des excuses décousues poussées hors de sa gorge par la peur et sentait ses yeux le piquer. Il avait envie de vomir et la tête commençait à lui tourner. Maintenant le public devenait plus dérangeant et cette petite femme avec un gros hachoir entre les mains, très dangereuse.
made by black arrow
Chuy
Revenir en haut Aller en bas
Filippa Rinaldi
Filippa Rinaldi
Since : 30/11/2020
Messages : 318
Name : Cendre
Faceclaim : Oona Chaplin
Crédits : I-rain (gifs) | Wanderlust (avatar)
DC : Irina | Blair
Con Te Partirò ft. Filippa [TW C'est plutôt sanglant] Boeq
Age : 29 ans
Statut : La revanche a fait d'elle son épouse, personne ne sait qui des deux deviendra veuve
Job : Cuisinière officiellement | Nouvelle comptable des Hennessy en compagnie de Wyatt Smith | Réalise des petits boulots illégaux avec un groupe d'italiens de Silverstone | Ancienne contaiuola de la famille Rinaldi
Habitation : Petit étage en piteux état au-dessus de l'épicerie de ses grands-parents, Silverstone
Disponibilité : Dispo [1/3]
Dim 28 Fév - 22:10

Con Te Partirò
Comme toutes les grandes tragédies, c’était en trois actes que se jouait la punition de la petite musaraigne. D’abord, il y avait eu le vol aux airs d’interdits chocolatés. Ensuite, il y avait eu l’arrestation à grands coups de sourires forcés. Et désormais, tous attendaient avec impatience la sanglante - mais juste - condamnation.
Derrière le comptoir, pince entre les mains et sourire envolé, Filippa n’avait pas des allures de juge. Ou alors, elle était la juge idéale pour faire respecter les règles et la loi que les Rinaldi avaient inventées. En revanche, le vaurien avait tout du condamné : l’affolement, comme un furet que l’on aurait soudainement coincé dans une cage dans l’objectif final de le dépecer, et les gémissements plaintifs qui, si l’on reprenait ce même furet, étaient tout à fait justifiés lorsque l’on considérait l’arme avec laquelle on le menaçait.

Spada n’avait pas besoin de peser de tout son poids pour tenir fermement l’animal écrasé sur la surface. Il s’agitait vainement, s’arc-boutant comme un beau diable. Il était passé du rongeur au ver désarticulé bloqué entre le bec acéré d'un corbeau.
Le visage du garçon était mat de soleil et témoignait d’un labeur en plein air. Il était couvert d’ecchymoses et de bleus que l’italien éclatait contre le meuble à la manière d’un citron dans un presse agrume. Ainsi écrasée, sa face aurait pu avoir des allures comiques. Sa pommette gauche lui remontait sous l’oeil, le fermant à moitié, et empêchait les petites larmes rondes de s’échapper sur ses joues.
Une fois, un trappeur de passage dans la boutique lui avait dit qu’une biche s’était arrachée la patte d’un piège à ours, mue pour un instinct de survie extraordinaire. Sans surprise, il l’avait retrouvée quelques mètres plus loin, raide comme une pierre et vide de son sang. Considérant la situation comme somme toute assez semblable, la mafieuse se demanda un instant si le voleur pourrait s’arracher le bras dans la panique. Enfin, il ne pourrait certainement pas s’arracher la tête.

Dans le silence ténu de l’épicerie, soudainement vidée des voix chantantes et des cris rieurs, personne n’entendait plus rien si ce n’était le choc des genoux de garçon contre le bois et sa voix nasillarde et morveuse qui se répandait en excuses pathétiques. Et si on ne parlait pas, on buvait avec une attention trouble les pauvres paroles du petit voleur. On se délectait de sa détresse tout en se félicitant mentalement de ne pas être à sa place. Les poils se hérissaient sur les bras et sur la nuque ; on attendait avec impatience la suite et surtout, on ouvrait grand les yeux pour ne pas en manquer une miette.
Filippa, elle non plus, ne disait rien. Elle se contentait d’observer les jérémiades de l’étranger avec le même oeil froid qui avait un jour toisé la fille Mazzarella. Le crime n’était certes pas comparable, mais la napolitaine croyait dur comme fer que la moindre petite offense devait être traitée avec le même sérieux que la pire injure. Alors, on ne songerait même pas à lui causer du tort puisque le châtiment était connu de tous.

Les ongles crasseux du renardeau griffèrent le bois dans l’espoir de les cacher sous sa paume.

« Tut-tut-tut, non, non, non, » le gronda Filippa en faisant claquer sa langue contre son palais.

Spada lui tordit vilainement le poignet et, comme une fleur éclorait au printemps, la petite main du voleur s’ouvrit à nouveau. Les pétales étaient simplement plus sales.

Nonno lui asséna une nouvelle claque gaillarde, dans le dos cette fois.

« Andiamo ragazzo, è un brutto momento da spendere ! Hai rubato, devi dare per scontato ora. Non preoccuparti, andrà tutto bene. E considerati felice, ai miei tempi, erano i colli che venivano tagliati ! »

« Allez petit - »

Filippa fut interrompue dans sa traduction par le gros rire de son grand-père, bien content de sa blague. Il trouva un écho parmi les clients reconvertis en spectateurs et certains, bien contents de cette intervalle comique avant le drame, se bourrinèrent les côtes de coups de coude joyeux.

« Allez petit, » reprit-elle dans un soupir une fois l’euphorie passée. « Ce n’est qu’un mauvais moment à passer. Tu as volé, il faut assumer maintenant. Ne t'inquiète pas, ça va très bien aller. Et estime toi heureux, de mon temps, c'était les cous qu'on tranchait. »

Le signor Rinaldi ponctua chaque phrase d’un petit hoquet de rire qui se noyait dans sa moustache.

« Ah, quelli erano i bei tempi… » soupira-t-il, un brin nostalgique.

Filippa appliqua doucement sa main gauche sur les phalanges moites de l’animal, comme un pansement sur une méchante blessure. Elle eut un petit hochement de tête doublé d’un sourire d’encouragement.

Puis elle immobilisa fermement ses doigts pour avoir une meilleure prise. Elle pouvait sentir tantôt le grand froid de la peur tantôt la chaleur de l’angoisse irradier sous sa paume immobile. Le sang pulsait dans chacune de ses petites veines fines.

Un claquement de pince et les dents ciselées se refermèrent sur l’ongle rond du pouce qui s’aplatit légèrement sous la pression. Elle pouvait tâter la résistance au bout de l’outil.

« Tu vas payer pour le chocolat, ne t’en fais pas, » le rassura-t-elle. « Mais après. Adesso, tu vas payer pour le vol. »

Elle prit une profonde inspiration. Ses ongles s’enfoncèrent à son tour dans la chair du garçon.

Puis elle tira.

Il y eut un instant de flottement. Tous les coeurs s’étaient arrêtés à l’unisson et le temps resta suspendu.

Elle avait tiré, oui, mais pas assez fort visiblement, puisque l’ongle ne s’était arraché qu’à moitié. Il n’y avait plus que des filets de sang grotesques liant encore la petite griffe à la chair.

« Je suis rouillée, » lui expliqua-t-elle comme une excuse.

Elle termina sa besogne d’un coup sec du poignet, le petit ongle noirci entre les pinces comme une pierre précieuse entre les instruments d’un bijoutier.
Elle le posa sur le comptoir dans une flaque de sang. Il y eut de « oh » de surprise parmi les spectateurs.

« Qu’est-ce qu’on va faire pour le comptoir ? » s’inquiéta soudain nonno en italien. « Ta grand-mère ne vas pas être contente. »

Filippa haussa les épaules.

« Nous verrons bien après. »

Elle reporta son attention sur la vermine.

« Écoute, il en reste quatre. Ne t’évanouis pas. »

Car s’il tombait dans les pommes, cela ne l’empêcherait certes pas de finir ce qu’elle avait commencé, mais enlèverait bien des chapitres à la leçon. Et ces chapitres là étaient les plus importants.



________________

Vedi Napoli e poi muori
Fratelli d'Italia
Filippa Rinaldi
Revenir en haut Aller en bas
Chuy
Chuy
Since : 18/01/2021
Messages : 227
Faceclaim : Diego Luna
Crédits : Ghoest
DC : Liam, Arthur, Dino et Maria
Con Te Partirò ft. Filippa [TW C'est plutôt sanglant] F78a2b07fd145d9b970ef90b5d87720dfc5adcc2
Age : La vingtaine
Job : Crapou à tout et rien faire
Habitation : Il squatte la ferme de Nuttah, parfois le temple d'Imogen
Disponibilité : Opé
Lun 1 Mar - 20:37
Con Te Partirò

Antonio le lui disait souvent : Regarde (en général, s’il était très en colère ou trop fatigué, il glissait une insulte sur sa famille, principalement sa mère car les mères étaient souvent traînées dans la boue, allez savoir pourquoi) comment Jésus a souffert pour ta petite gueule de rat, comment tu peux oser encore ouvrir ta gueule. C’était toujours l’introduction d’un très long monologue culpabilisant sur les supplices du fils de Dieu car il n’y avait rien de tel, selon le géant, pour faire relativiser sur une situation des plus déplaisante pour les deux parties. Jésus était devenu une carte joker terriblement efficace sur Chuy et, bien plus haut dans l’échelle du respect, était la souffrance de la Madone. Car (fils de pute) il n’y a pas de plus grande souffrance sur terre que de perdre un enfant. Chuy en conclut qu’il se sortirait de cette histoire avec beaucoup moins de dignité que Jésus. Mais pour sa défense il n’était pas le fils de Dieu et il n’avait même pas un ami dans la foule pour le renier ici où là. Il se mit à hurler au moment ou la pince effleura l’ongle de son pouce.

Modèle de droiture, Chuy avait prit soin d’éviter d’insulter quiconque dans la pièce quand l’un et l’autre s’étaient répondu dans un monologue qui lui passait bien au-dessus de la tête. Il c’était mordu la langue pour garder ses injures dans le fond de son gosier et éviter de creuser sa tombe davantage. A ce moment-là il espérait encore que ce n’était qu’une mise en scène terrifiante destinée à l’inciter à ne plus recommencer ses méfaits. La traduction placide du vautour décharnée n’avait pas aidé à lui faire comprendre quoi que ce soit. Aux rires avait succédé un vilain bourdonnement dans ses oreilles qu’il n’avait pas remarqué. Il avait continué à se tordre le poignet et le cou dans un ballet ridicule et douloureux.

Chuy beuglait avec un souffle qui venait du ventre, on l’entendait facilement de la rue. Ses hurlements avaient un volume monstrueux mais étaient brefs et il s’épuisait à reprendre des inspirations bruyantes et sifflantes régulièrement. Le bord du comptoir devenait de plus en plus douloureux dans sa peau (sur une note positive, ça allait très vite devenir le cadet de ses soucis) et jouait sur sa difficulté à respirer convenablement pour pouvoir cracher sa peur comme il l’entendait. Quand elle commença à tirer (ce qui arrivait toujours bien plus vite qu’anticipé), que Chuy réalisa enfin qu’il aurait des difficultés dans les mois à venir à se curer le nez avec son pouce (il n’utilisait pas le pouce pour ça) mais surtout que les prochains minutes (heures, jours) allaient être particulièrement douloureuses, il débuta une litanie d’insultes qui venait du cœur (Te voy a cortar la cabeza con dientes, guarra) qui s’évanouit lorsque son bourreau aux grands yeux reprit la parole. Chuy en resta muet de stupeur une seconde, la fixant avec le regard vif du poisson.

« ¡ Tú cierRA LA PUTA BOCA, PUTA ! - ¡ME CAGO EN TU MADRE, PUTA ! »

Il n’était pas vraiment en état de se faire la remarque, mais son application à postillonner des insultes sur la bouchère (en tout cas sur le comptoire) rendait plus supportable le supplice. Il n’avait pas finit sa phrase que c’était déjà terminé. Les chuchotements du bourdonnement s’amplifiait dans ses oreilles. La douleur pulsait à un rythme régulier et bruyant à l’intérieur, remontait par des à-coups le long de son bras et martelait son crâne. Quand il fit réellement attention à son ongle dans la pince (loin de son doigt sanguinolant) Chuy se tût brusquement et s’affaissa comme un pantin désarticulé.

A son plus grand malheur il se réveilla non moins de quatre secondes plus tard. Son estomac jouait au yoyo dans le fond de sa gorge et son cœur était au bord de ses lèvres. Chuy arrêta de simplement essayer de bouger la main, se disant que peut être la douleur serait moins éclatante comme ça. Il éclata en sanglots qui se perdaient dans la bave et la morve dans lesquelles il pataugeait déjà. « Voy a arrancar tus ojos con las uñas que me queda, hija de gaviota de tu puta madre. Te voy a matar- » Il n'arrivait qu'à bredouiller et marmonner son flot de menaces, une bulle de salive éclata au milieu de sa phrase.

La Madone ne s’était sûrement jamais fait arracher les ongles par des italiens.

made by black arrow
Chuy
Revenir en haut Aller en bas
Filippa Rinaldi
Filippa Rinaldi
Since : 30/11/2020
Messages : 318
Name : Cendre
Faceclaim : Oona Chaplin
Crédits : I-rain (gifs) | Wanderlust (avatar)
DC : Irina | Blair
Con Te Partirò ft. Filippa [TW C'est plutôt sanglant] Boeq
Age : 29 ans
Statut : La revanche a fait d'elle son épouse, personne ne sait qui des deux deviendra veuve
Job : Cuisinière officiellement | Nouvelle comptable des Hennessy en compagnie de Wyatt Smith | Réalise des petits boulots illégaux avec un groupe d'italiens de Silverstone | Ancienne contaiuola de la famille Rinaldi
Habitation : Petit étage en piteux état au-dessus de l'épicerie de ses grands-parents, Silverstone
Disponibilité : Dispo [1/3]
Mer 3 Mar - 0:08

Con Te Partirò
S’il y avait bien un terme qui trouvait un écho dans énormément de langues latines, c’était bien le mot pute. Aussi, compte tenu de la situation, Filippa n’eut aucun mal à l’isoler dans les hurlements bestiaux et indistincts du petit opossum puant. C’était étonnant la vitesse avec laquelle les bredouillantes demandes de pardon contrites se transformaient en insultes viscérales sous le coup de la douleur. Sous le coup de la peur.
Les filets de bave giclant de ses lippes gercées se mêlaient au sang gluant qui imbibait déjà le comptoir vernis. Ses petits yeux de fouine s’étaient écarquillés et, l’espace d’un instant, il ressembla à une belette ayant regardé le soleil trop longtemps.

« Je sais, je sais, je n’ai pas été très habile sur ce coup là, » soupira-t-elle alors qu’il l’observait avec des yeux de merlans frits, la langue soudainement coupée (à défaut de ses doigts). « Promesso, je vais mieux faire la prochaine fois. »

Mais tout son corps fébrile s’était affaissé sur le plan de travail en un amas de chair molle, de loques et de crasse aussi, elle douta qu’il ait entendu sa dernière phrase.
Elle haussa les sourcils et ferma les yeux, désabusée. Il était jeune, mais pas aussi jeune que la petite Mazzarella, pourtant. Et cette dernière avait eu plus à coeur de tenir la tête haute, avec son menton fier et sa bouche grimaçante qui n’avait pas crié avant longtemps. Pour celui-là, il n’avait fallu qu’un ongle et le voilà qui s’écroulait comme un pantin de chiffon. Vraiment, ce pays était le gardien de ce que ce monde avait de plus décevant.

Au fond d’elle, elle le savait pertinemment, elle aurait pu s’arrêter là. Il aurait été d’une facilité déconcertante de poser la pince et de ficher à la porte ce qu’il restait de dignité du voleur. Peut-être même aurait-elle été contente de cette issue pas si malheureuse finalement.

Mais elle ne le pouvait pas. Non, elle en était tout bonnement incapable.

Ce qu’elle avait pris pour une force était en réalité un carcan aliénant : le public qui était là la soumettait au poids de ses propres paroles. Plutôt que des encouragements, on la jugerait désormais quoiqu’elle fasse. Et leurs regards se posaient sur ses épaules comme une chape de plomb.
Elle serait une tortionnaire pour les coeurs fragiles qui estimeraient qu’elle allait trop loin.
Elle serait une lâche sur laquelle on pourrait dorénavant tirer pour les plus assoiffés de sang qui s’attendaient au carnage.
Filippa avait, avec le plus grand soin, ouvert la porte de la cage et s’y était bien sagement enfermée aux côtés de la musaraigne (bien que, il fallait l’avouer, son sort à lui n’était pour le moment pas comparable au sien).

Dans tous les cas, elle perdrait probablement des clients.

Malgré ses airs froids, elle était furieuse. Furieuse contre cette énergumène méprisable qui avait cru pouvoir s’attaquer à elle et furieuse contre elle même d’autant se soucier du regard des autres.
Avant, oui avant, tout ça ne serait jamais arrivé. Lorsque les Mazzarella avaient volé et détruit leurs maisons de jeu, les Rinaldi avaient déferlé sur eux comme une vague rouge et inarrêtable. Et Filippa ne s’était jamais posée de question. Quoiqu’elle fasse, tout était légitimé. Puisqu’elle était au service de la Morue et de sa famille, alors, elle n’aurait même pas besoin de s’excuser auprès du Seigneur. Tout était juste. Personne n’oserait jamais la regarder en biais. Personne.
Alors, que pouvait-elle faire désormais que celle qui la regardait de travers était elle ?

Elle serra les dents et fit sauter l’ongle de l’index aussi facilement que l’on retirerait une écharde d’un orteil. Pas de tremblement, cette fois. Pas d’hésitation. Elle devait arrêter de se tourmenter.

« Ça va repousser. »

Et elle disait cela autant pour lui que pour elle. Car derrière cette simple affirmation elle en cachait bien d’autre. Ce n’est pas grave. Il l’a mérité. C’est juste. Je ne me trompe pas.

Il y eu un brouhaha parmi les clients et une dame sortit précipitamment, le coeur au bord des yeux. À peine le tintement de clochette eut-il retentit qu’on entendit nettement son estomac se retourner et finir sa course sur ses bottines propres. Le grand-père, bien trop habitué à la violence pour s’en soucier, préféra se saisir d’un balais pour nettoyer derechef le vomi. Que l’on salisse le comptoir était une chose, mais alors le perron, cela commençait à faire beaucoup. Et la bile, ça tâchait.

Sa sortie inspira quelques spectateurs blêmes qui n’attendaient que le plus couard (ou le plus courageux) pour leur ouvrir la voie ; on ne désirait pas être le premier à tourner les talons. Bientôt ne restèrent que les plus avides, les visages creusés par leurs vices et leurs iris plus luisantes encore à mesure que le sang glissait le long de la paroi et trempait la joue du voleur. Ses cheveux en restaient collés sur ses tempes.

« Che cosa ? Ci fermiamo qui ? » s’impatienta la vieille Bianchi qui, la plus maligne de tous, attendait que sa propre vengeance soit accomplie par une autre main.

Le garçon s’était réveillé. Il couinait comme un chien battu. De sa bouche s’écoulait toujours un flot continu d’insultes, uniquement mis en pause par son évanouissement. Il avait reprit là où il s’était arrêté, bien que sa voix ait perdu quelques octaves. Il était évident que Spada mettait moins d’énergie à l’immobiliser qu’à le tenir simplement debout.

Filippa se pencha légèrement en avant. Si ses cheveux n’étaient pas tenus par son chignon austère, ils traineraient, eux aussi, dans le sang qui poissait le comptoir.

« Tu n’aurais pas pu t’en tenir aux pardons ? » siffla-t-elle en attrapant le hachoir. « Tu n’aurais pas pu tacere ? »

Elle était au pied du mur, maintenant. Elle ne pouvait plus reculer. Plus maintenant qu’il l’avait insultée.

La lame sectionna la première phalange du pouce.

Tout était juste.



________________

Vedi Napoli e poi muori
Fratelli d'Italia
Filippa Rinaldi
Revenir en haut Aller en bas
Chuy
Chuy
Since : 18/01/2021
Messages : 227
Faceclaim : Diego Luna
Crédits : Ghoest
DC : Liam, Arthur, Dino et Maria
Con Te Partirò ft. Filippa [TW C'est plutôt sanglant] F78a2b07fd145d9b970ef90b5d87720dfc5adcc2
Age : La vingtaine
Job : Crapou à tout et rien faire
Habitation : Il squatte la ferme de Nuttah, parfois le temple d'Imogen
Disponibilité : Opé
Mar 23 Mar - 22:27
Con Te Partirò

Chuy était régulièrement sujet à des syncopes, bien qu’il n’ait évidemment jamais employé ce terme, disant plus simplement que parfois ses yeux et sa tête avaient besoin de se reposer pour quelques secondes. Il aurait sûrement du s’en inquiéter, mais ça ne lui était simplement jamais venu à l’esprit puisqu’à chaque fois il se réveillait frais comme un gardon. Et si cette fois il n’était pas frais comme un gardon et bien c’était à cause des circonstances.  Circonstances atténuantes. Un jour, bientôt, son cœur allait lâcher. Bam, comme les ongles.

Le pire était passé. Chuy vit l’ongle de son index s’arracher avec la même facilité qu’on retire une chaussette propre (les sales avaient du mal à glisser). Il n’avait pas eut le temps de retenir son souffle et en resta muet de surprise seulement pour un très court moment. Le temps que l’information suinte jusqu’à sa petite cervelle où la douleur tourbillonnait et tambourinait à lui faire péter le crâne. Malgré ses yeux trempés de larmes il voyait son ongle coincé entre les mâchoires de la pince. La douleur n’explosa pas, cette fois. Elle l’écrasait avec plus de poids que le vieux, lui compressait les poumons et rendait son souffle rapeux. Il était plus soucieux des prochains à passer que de ce qui était déjà fait. Chuy avait arrêté de s’époumoner pour continuer à balbutier des insultes qui n’avaient de sens dans aucune langue. A moins que ce ne soit quelques prières qui venaient tardivement.

Quand elle lui parla, il lui répondit par une autre injure que seul le ton rendait explicite. Bien que dans ses conditions il aurait été bien aimable de lui accorder le bénéfice du doute. Il se mit à gesticuler de nouveau, cracha quelques grossièretés insolentes et particulièrement vulgaires à la vieille qu’il ne pouvait pas voir ni comprendre. Chuy arrêta de s’agiter seulement parce que la douleur dans ses doigts était insupportable. Il n’arrivait pas à sentir la sensation chaude du sang poisseux qui faisait glisser sa mains contre le bois. Ses doigts étaient pris de spasmes et tapaient contre le comptoir à intervalles irréguliers provoquant des étincelles derrière ses yeux. Des milliers d’aiguilles chauffées à blancs plongeaient sous le sang gluant pour remuer la chaire déchirée mise à nue. L’air palpait les plaies béantes, tirait et grignotait les nerfs. Un chaton surexcité et incapable de rentrer ses griffes avait prit ses doigts pour une pelote de laine. Ça tirait des lambeaux qui allaient s'effilocher. Il sembla à Chuy que les garder immobile, travail déjà bien fastidieux, n’apportait qu’un réconfort psychologique.

Le gamin releva des yeux furieux (puisqu’il mangeait toujours le comptoir avec la grosse paluche qui le tenait en place) vers la responsable de tous ses maux, celle qu’il s’amuserait à dépecer vivante dans sa tête d’ici quelques jours. Il eut du mal à dégager les mots de l’accent qui les enveloppait et encore plus à comprendre leur sens. Le hachoir ne représenta pas immédiatement une menace. En un battement de cils le hachoir lui cachait la vue de son pouce sanguinolent. Chuy resta idiot.

Il n’avait plus mal, mais il ne s’en rendit pas compte tout de suite. Il avait aussi arrêté de chouiner et regardait simplement avec des yeux écarquillés la finalité du triste spectacle qui s’était joué sous ses yeux et dont il avait raté les deux premiers actes. « Bah… » Il fronça le nez une nouvelle fois, renifla bruyamment pour dégager ses narines de la morve qui, il s’en rendait compte maintenant, l’empêchait de respirer. Un tour de passe-passe dont il n’arrivait pas à trouver l’astuce. Chuy était bon public, il adorait pourtant la magie. « Mi pulgar. » Le sang continuait de s’écouler, de glisser jusqu’à lui pour lui lécher la joue et lui  barbouiller les lèvres comme une putain maladroite. Il eut un rictus, tenta de se dégager de nouveau la tête. Sa main était bien plate contre le bois et ne tremblait pas. « Bueno. Mira, mi pulgar puso en el camino. » Chuy se mit à cligner des yeux bêtement, peut-être pour laisser s’échapper les larmes qui le gênait à présent. Il relâcha la pression dans sa mâchoire qui avait joué un orchestre de crissements de dents et les avaient rendues douloureuses. Il souffla pendant deux ou trois secondes. Sa tête était lourde. « Nuttah se enojará mucho conmigo. » Et Max aussi. Il allait être absolument furieux. Chuy se pinça les lèvres, insensible au goût de fer qui se collait contre ses dents, et plissa les yeux pour s’empêcher de pleurnicher comme un gosse encore une fois. De toute façon il était très fatigué.
made by black arrow
Chuy
Revenir en haut Aller en bas
Filippa Rinaldi
Filippa Rinaldi
Since : 30/11/2020
Messages : 318
Name : Cendre
Faceclaim : Oona Chaplin
Crédits : I-rain (gifs) | Wanderlust (avatar)
DC : Irina | Blair
Con Te Partirò ft. Filippa [TW C'est plutôt sanglant] Boeq
Age : 29 ans
Statut : La revanche a fait d'elle son épouse, personne ne sait qui des deux deviendra veuve
Job : Cuisinière officiellement | Nouvelle comptable des Hennessy en compagnie de Wyatt Smith | Réalise des petits boulots illégaux avec un groupe d'italiens de Silverstone | Ancienne contaiuola de la famille Rinaldi
Habitation : Petit étage en piteux état au-dessus de l'épicerie de ses grands-parents, Silverstone
Disponibilité : Dispo [1/3]
Mer 24 Mar - 17:15

Con Te Partirò
Il n’y avait de meilleure justice que celle que l’on officiait soi-même. C’était une vérité que Filippa n’avait pas eu besoin d’assimiler ; elle avait tout simplement grandi avec. Modelée par sa famille, elle n’avait jamais eu à remettre en cause leurs décisions, leurs habitudes et leurs us, même lorsqu’il s’agissait d’égorger une femme adultère ou bien de lester les chevilles d’un homme trop bavard avant de le jeter dans la baie. D’ailleurs, la normalité était telle qu’elle n’avait jamais éprouvé ni le moindre plaisir ni le moindre dégoût à obéir aux ordres, quels qu’ils furent. Quant aux remords, le mot lui était parfaitement inconnu puisqu’elle n’avait pas besoin de pardon. Il n’y avait que la satisfaction innocente de la besogne accomplie. Les choses étaient ainsi et c’était tout.

Aujourd’hui, pourtant, alors que le hachoir crissait contre le bois du comptoir pour définitivement séparer le pouce de la main en une traînée sanguinolente, elle ne retrouvait pas la placidité habituelle clôturant la justesse de son verdict. Sa colère n’était pas retombée et demeurait là, lovée dans ses tripes en braises ardentes répandant leur fiel dans la moindre fibre de son corps, comme une flamme suivrait inexorablement une traînée de poudre. Ses doigts se crispèrent sur le manche du hachoir jusqu’à faire blanchir ses jointures, inscrivant la marque de ses ongles dans sa paume froide.

Devant elle, il pleurait. Et Filippa resta idiote, elle aussi.

Ce n’était pas qu’une simple barre chocolatée. C’était la vive réalisation qu’ici aussi, ils étaient atteignables. Vulnérables. Le premier imbécile traversant la rue poussiéreuse pouvait, s’il le décidait, leur voler une sucrerie ou bien leur coller la mort entre les deux yeux. Et plus que de la fureur, c’était de la peur que la napolitaine ressentait au creux d’elle. Plus jamais on ne devait s’en prendre à eux. Plus jamais. Pour quoique ce soit. « Être implacable. Inflexible. Il n’y a que ça qu’ils comprennent. » La voix enrouée de tabac de son oncle pendait à ses oreilles comme des boucles trop lourdes. Respire.

Alors, elle se rendit compte que ce n’était pas la justice qu’elle rendait, mais la vengeance de cette condition précaire qu’elle infligeait. C’était ce qu’elle n’avait pas pu offrir à tous les Mazzarella. Eux, n’étaient pas là. La petite musaraigne, si. Et tant pis si les crimes n’étaient pas les mêmes. Oui, tant pis. Car il n’était que le bouc-émissaire de ses maux et la ligne entre justice et vengeance était de toute façon trop fine pour seulement exister. La finalité était la même. La vengeance était simplement une sœur plus sauvage qui convenait mieux à la nature des hommes. Une justice à laquelle on aurait ôté le bandeau. Une justice pourtant aveuglée par le ressentiment.

Le voleur avait perdu ses attributs bestiaux tandis que le regard noir de Filippa tombait sur lui comme un couperet. Elle ne voyait plus que l’ombre d’un jeune garçon rendu plus jeune encore par son air hagard, ses yeux bouffis de larmes et sa voix chevrotante qui balbutiait des mots qu’elle ne comprenait pas. A travers le sang barbouillé sur sa joue, les sanglots avaient tracé des traits roses et brillant. Sur son nez légèrement en trompette, une grosse goutte pendait et on aurait su dire s’il s’agissait d’une larme ou bien de morve. La douleur avait gravé sur son visage une grimace malheureuse de petit garçon réveillé par un cauchemar.
Il l’a bien mérité. Il n’avait qu’à pas voler. Voilà. Ivre d’amertume, elle ne s’autorisait à penser que cela. Sinon, sinon…

Derrière eux, les spectateurs s’étaient murés en un silence presque religieux. Comme lors de la lecture d’un livre qui retournait l’estomac, on redoutait de tourner la page, mais on ne pouvait cependant pas s’empêcher d’avoir envie de découvrir la suite.

« Va bene, lo spettacolo è finito, » souffla-t-elle finalement en rangeant la lame sous le comptoir.

Les derniers clients clignèrent des yeux à l’unisson, comme sortant d’une transe et il n’y avait que la vieille Bianchi – soudain réveillée – pour rouspéter que c’était toute la main qui aurait dû être coupée.

Spada souleva le corps mou du garçon qui se laissa balloter comme un fichu de paille au milieu de l’océan. Son visage se décrocha de la planche avec un bruit de succion gluant. Le sang épais avait inscrit sa marque sur sa joue et glissait maintenant le long de son menton jusqu’à ses épaules avec la lenteur de la vase coulant au fond d’un marais. Il avait le teint cireux de ceux dont la bile remontait le long de la gorge.

« J’espère que le cioccolato valait le coup, » lâcha-t-elle tandis que l’italien colossal le traînait à l’extérieur en même temps que le petit troupeau qui se glissa à sa suite. « Si tu veux vomir, c’est dehors. »

Dans un petit mouchoir, elle recueillit le pouce et les deux petits ongles rouges qui ne tardèrent pas à poisser le tissu gris. Elle le noua avec toute la précaution du monde avant de sortir à son tour.

« Ecco ecco ! » s’écriait joyeusement nonno en tapotant l’épaule flasque du voleur. « Se non fosse stato il più coraggioso ! Siamo pari. E su col morale, guarirà rapidamente ! »

L’italienne lui tendit le petit paquet sanglant alors que Spada le bousculait hors du perron comme un chien errant que l’on chasserait à coups de pied.

« Tu diras au croque-mort que j’attends i miei soldi, » trancha-t-elle une dernière fois en frottant son pouce contre son index.

Sa silhouette titubante oscilla un moment avant qu’il ne disparaisse définitivement. Filippa doutait désormais de le revoir l’épier à la nuit tombée. Ou alors, cela serait à plus noir dessein.

« Avremmo dovuto coprire il bancone, » s’obstina son grand-père. « Tua nonna ci ucciderà. »

Elle haussa les épaules.

« Hai bisogno di aiuto con questo ? »

Elle eut un geste vague vers la flaque de vomi qui n’avait pas eu le temps de sécher. Nonno fit non de la tête.

« Invece, abbi cura di raggiungere il bancone. »

Alors Filippa obéit. De toute façon, elle était trop fatiguée pour regretter quoique ce soit.  




________________

Vedi Napoli e poi muori
Fratelli d'Italia
Filippa Rinaldi
Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé
Contenu sponsorisé
Revenir en haut Aller en bas
Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Revenir en haut Page 1 sur 1
Sauter vers: