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Guns & WhiskyFORUM WESTERN · NOUS SOMME EN ÉTÉ

1889. À la lisière de l'Etat de New Hanover, la petite ville forestière d'Imogen compte un peu plus de 500 habitants. Plus connue pour ses ranchs que pour ses pépites, elle est l’exacte représentation des espoirs et des échecs de tous ceux qui ont pu croire au rêve américain. Son seul lien avec la civilisation est le chemin de terre creusé par le passage des diligences, droit vers la station de gare de l'autre côté de la frontière qui mène vers l'Etat de West Esperanza. Cette route est connue pour ses braquages incessants, causés par le gang des O’Reilly. En plus de terroriser la population - leurs méfaits sont racontés dans tous les journaux de la région ; ils rendent périlleux les voyages vers la grande ville : Silverstone. Cité minière dirigée par la respectable famille des Rosenbach, prospère et moderne ; on pourrait presque croire que c’est un lieu où il fait bon vivre. Mais, derrière la bonhomie de son shérif, les sourires de ses prostituées et les façades fraîchement repeintes, l'influence criminelle du Silver Gang grandit de jour en jour. Lire la suite

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On ne cherche pas de nouveau Shérif pour l'instant, mais qui sait, un jour tu feras peut-être régner l'ordre et la lois sur ce forum ?
FAIT DIVERSDepuis l'attaque de la banque, Mr le maire, Henry Rosenbach, invite les citoyens à redoubler de prudence - il craint que cet acte n'inspire d'autres scélérats, et met en garde ses concitoyens quant au danger qui rôde dans les grandes plaines. Ainsi, il préconnise les voitures de poste, ou encore le train pour se déplacer.
BONNES AFFAIRESN'oubliez pas de passez par le quartier commerçant de Silverstone pour faire vos emplettes dans l'épicerie des Rinaldi ! Vous y trouverez moultes boîtes de conserve, ainsi que quelques plats tout chaud, tout droit sortis de la cuisine et parfois même servi par la petite fille des propriétaires.
RUMEURUn prisonnier se serait échappé du Fort de Silverstone. Les rumeurs les plus folles circulent : certains s'imaginent qu'il s'agit encore d'un coup des bandits qui ont attaqué la banque, d'autres, un peu moins terre-à-terre, parlent d'une attaque d'anciens confédérés. La justice, quant à elle, ne commente aucune e ces hypothèses.
PETITE ANNONCEDepuis la fonte des neiges, le village d'Imogen est fière d'annoncer la réouverture de son marché agricole ! Chaque mercredi, les producteurs de New Hanover sont invités à monter leur stand dans la rue principale et faire commerce de leur légumes, viandes, poules et autres peaux ! Troc autorisé.
RUMEURDes histoires de Dame Blanche circulent dans la région de West Esperanza : certains habitants de Silverstone et des alentours jurent avoir apperçu un fantôme ! Les plus jeunes s'amusent même à invoquer l'ectoplasme dans un nouveau jeu ridicule - mais qui passera bientôt de mode : celui du ouija. Le temple prie pour leur salut.
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Les éléphants dans le magasin de porcelaine | w/ Irina
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Mar 30 Nov - 15:01


Les éléphants dans le magasin de porcelaine

@Irina N. Valanova

La bande de joyeux apatrides que forment les O’Reilly aime à se retrouver au saloon d’Imogen pour boire, rire, parler fort et manger autre chose que les patates de la mère Davis. Parfois, le ragoût de Earl appelle bien plus que les pommes de terre cuites dans l’eau du lac. Les rires gênent tout le monde et les verres s’éclatent les uns contre les autres, dégueulant à même le sol les litres de bières qui parviennent jusqu’aux lèvres des hors-la-loi. Ici, personne ne vient les embêter. Personne n’ose, parce qu’ils ont bien trop mauvaise réputation. Pourtant, ils sont beaucoup à vouloir leur casser la gueule aux Irlandais. Mais ce soir, tout semble invincible. Sauf, peut-être, la vessie de Mae Matthews qui s’est remplie à mesure qu’elle enfilait les pintes de bière. Lorsqu’elle était ivre, la voix de la hors-la-loi changeait, prenant des intonations venant du fin fond d’une caverne. Mae prend donc appuie sur Irina, le regard déjà loin derrière son sourire en coin. « J’veux faire pipi. », chuchote t’elle à la gueule de son amie avant de se lever. Elle termine tout de même sa bière, parce que Patterson est capable de la finir le temps qu’elle fasse son affaire. Elle le regarde d’ailleurs en plissant les yeux. « T’croyais quand même pas qu’j’allais t’laisser ça connard. » C’était totalement gratuit. Mais quand l'alcool chante à ses oreilles, la langue de Mae se délie bien plus vite qu'à l'habitude. Son agressivité avec.« QUOI ?! Y’m’dit qu’j’suis une pute, faut rien dire, faut rire et là ça va pas ? » La hors-la-loi pointe toute l’assistance de son index et part avec son amie pour soulager son envie pressante.

Sur le chemin qui mène à la petite cabane à uriner, que l’on peut appeler toilettes (l’autrice n’a fait absolument aucunes recherches sur les toilettes en 1887, mais se voyait mal faire faire pipi à Mae en regardant Clayton roupiller à sa fenêtre. Elle a un peu de respect pour son personnage quand même), Matthews râle auprès de la russe, bras dessus bras dessous. « Attends, moi j’dois rien dire ? C’fait rire tout l’monde quand on m’insulte, et même quand y’m’casse la gueule là hein et quand c’est moi on m’reproche ouuuuuais Mae blablablablabla ! » Elle chasse tout ça d’un geste vague de la main, en réalité, on ne lui a jamais rien reproché.

L’odeur du cabinet de toilette donne des hauts le cœur à la jeune femme qui retient son souffle. En fixant la porte en bois, elle continue de parler à Irina. « Hé. » A nouveau, elle reprend son souffle en pinçant son nez, ouvrant grand la bouche pour respirer. « C’quand même mieux d’faire pipi dans les bois. » Elle rit comme une andouille en remontant tout son attirail. « Mais bon, t’imagines, j’pisse d’vant l’Golden ? » Matthews pousse la porte et prend alors un grand bol d’air plus frais et expulse l’air qu’elle a coincé plusieurs fois dans ses poumons. Quelle idée, faire pipi devant le Golden Cat.

Le sourire idiot sur ses lèvres ne semble pas vouloir se décoller quand, d’un coup de coude, Mae frappe les cotes de sa comparse pour la réveiller. « Hé Irina ? » La soûlarde passe alors son bras par-dessus l’épaule de la deuxième en posant sa tête contre son épaule. De sa main libre, elle désigne un petit commerce. « T’penses à c’que j’pense ? »

Parce que Mae Matthews y pense très fort.

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Irina N. Valanova
Irina N. Valanova
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Les éléphants dans le magasin de porcelaine | w/ Irina 6cl0
Age : 25 ans officiellement | 56 ans officieusement
Statut : Veuve. À moins qu'elle ait oublié son mari quelque part ? Ou bien qu'elle n'ait jamais été mariée ?
Job : Princesse, arnaqueuse, terroriste, comédienne, acrobate, danseuse étoile, peintre. Bref, tout ce qui l'arrange.
Habitation : À Moonstone Pound, dans une petite tente de fortune.
Disponibilité : Disponible [3/3]
Ven 3 Déc - 20:04


Les éléphants dans le magasin de porcelaine

@Mae Matthews


Les étoiles piquaient le ciel de minuscules taches blanches. La lune était entamée à la manière d’un flanc dans lequel un géant aurait donné un grand coup de cuillère. Des fumerolles s’échappaient des maisonnettes de bois d’Imogen. De la vapeur recouvrait les carreaux du saloon qui vomissait une lumière orangée et des éclats de voix enjouée. Ça sentait la terre mouillée au printemps, la boue et l’urine. Mae beuglait à qui voulait bien l’entendre derrière la porte de bois trop peu épaisse des cabinets.

C’était une nuit comme une autre.

« Bah dis donc, qu’est-ce qu’elle pisse, celle-là, » marmotta Irina en craquant une allumette contre le talon de ses bottes de cuir. « Rah, pizdets. »

L’allumette s’était brisée. Elle retenta sa chance contre le mur branlant des toilettes.
La flammèche frémit et elle se dépêcha de la couvrir de sa paume avant de la porter à la cigarette qui pendait à ses lèvres. C’était rigolo, ça lui rappelait soudainement les processions religieuses auxquelles elle assistait, petite. Elle revoyait nettement ses grands doigts déjà trop maigre - débarrassés d’une enfance encombrante - protéger cette flamme qui palpitait comme un coeur. Elle s’amusait, alors, à allumer tous les cierges de l’église - et il y en avait un paquet -, ravie de constater ce à quoi pouvait donner naissance une petite allumette de rien du tout. Elle se rappelait aussi de la Vierge Noire, accrochée au-dessus de l’autel. L’or de son halo s’effritait comme des feuilles d’automne.
Où c’était déjà, d’ailleurs ? Saint-Petersbourg ? Tiflis ?
Elle fronça les sourcils, incapable de se souvenir, avant d’observer la fumée s’élever au-dessus de sa tête jusqu’à se perdre dans les étoiles. Elle haussa les épaules. Tant pis.

Quant à Mae, elle continuait de jacter. « Blablabla, » mima Irina autant avec sa bouche qu’avec sa main droite qui pinçait l’air à la manière d’un bec de canard. Elle n’avait pas écouté grand chose. Il fallait parfois savoir se préserver.

« Il va y avoir plus de bière là-dedans qu’au saloon bientôt, » rit-elle alors que la cascade ne s’interrompait pas. « Tu sais, c’est pas bon de se retenir, hein… Après tu vas pisser du sang, comme moi. Ça fait un mal de chien. »

Par chance, l’infection urinaire était partie comme elle était venue, à force de faire bouillir de l’eau tiède qu’elle s’enfilait à grandes rasades toute la sainte journée.

Son regard fut accroché par une devanture - la plus proche d’elle - au tout début de la rue.
Dans la vitrine, un joli peigne à cheveux brillait sous la faible lumière émise par une maison éclairée, de l’autre côté de la rue. Les dents en écailles étaient surmontée d’une pierre bleue luisante - une turquoise -. Par réflexe, elle toucha la mèche qui cachait son oreille depuis ce fatidique braquage de locomotive et qui n’arrêtait pas de s’échapper de son chignon. Mais avec un peigne…
L’idée lui donna plus le tournis que toutes les gigues et que toutes les bières ingurgitées jusque là. Elle voulait ce peigne. En plus, il irait très bien avec sa couleur de cheveux.

Mae choisit ce moment pour sortir de sa caverne, la jupe de travers, tachée de bière - ou bien d’autre chose -, échevelée et les joues roses. Le fond de son oeil était à la fois luisant et à la fois terne. Enfin, l’un ou l’autre, elle était loin loin loin.

« Tu penses à Tiflis aussi ? » s’étonna-t-elle. « C’est dingue ça ! C’est une jolie ville, pas vrai ? Beaucoup de mosaïques, des gens charmants qui ont toujours le sourire et - »

La hors-la-loi s’agrippa à elle pour lui désignait l’échoppe qu’elle lorgnait depuis les cinq dernières minutes.

« Aaaaah, ça ! »

Elle tira sur sa cigarette.

« Moi tu sais, je me suis toujours pas remise de la perte de mon manteau. Tu te souviens, mon joli manteau de fourrure ? Bah il a pété avec le train, pardi, » croassa-t-elle. « Alors, ce à quoi je pense, c’est qu’on devrait aller faire les boutiques entre filles. Preum’s pour le peigne. »

Et bras dessus, bras dessous, les voilà lancées dans la rue principale - la seule - miteuse d’Imogen, bien en dehors des heures de courses habituelles pour la ménagère lambda.
Leurs pas lourds - témoins de leur état d’ébriété avancée - craquèrent contre le bois de la coursive couverte.

« Regarde l’artiste, hé hé. Et tombes pas en attendant, hein. Les pieds bien ancrés dans le sol. Comme si t'allais danser un paso doble. Olé ! »

Elle fit jaillir une pince à chignon de ses cheveux blonds et mit quelques secondes à bien viser le trou de la serrure.

« C’est comme ça que je faisais, » lui expliqua-t-elle. « Cambrioler des - Roh, blin alors ! Décidément hein ! »

Elle retira l’épingle - en tout cas, ce qu’il en restait - qui s’était cassée en deux dans la serrure.

Alors, sans semonce, elle enroula son poing dans son foulard et fracassa un carreau de fenêtre qu’on aurait très bien pu prendre pour une chope brisée au saloon. Elle nettoya les derniers bouts de verre brisés toujours accrochés puis, étendit son grand bras de sauterelle jusqu’à la clé pendue au mur. Elle se contorsionna du mieux qu’elle put et s’écrasa la face contre le bois.

« Gnnnnnh, j’y suis preeeesque. »

Elle finit par carrément y passer la tête et une épaule.

« Eh beh, » commenta-t-elle. « Il fait noir comme dans un four ici. »

Sa voix résonna dans la grande pièce vide. Elle cligna des yeux pour les habituer à l’obscurité. Bientôt, elle distingua les silhouettes du bric à brac de la boutique. Ça sentait la poussière.

« Ah, je l’ai ! » s’exclama-t-elle, victorieuse, en attrapant la clé. « Maintenant je… »

La slave s’arc-bouta pour se sortir de la fenêtre. En vain. Elle appuya ses pieds contre le mur et poussa, poussa et poussa encore. Mais elle ne bougea pas d’un iota.

« Je suis coincée, ha ha. »



Irina N. Valanova
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Mer 8 Déc - 12:26


Les éléphants dans le magasin de porcelaine

@Irina N. Valanova

Mae se tient à la rambarde qui la soutient. Heureusement, elle qu’elle est solide, car la jeune femme sent la marée montée à chaque fois qu’elle tente de se tourner vers la Russe. Irina lui a dit de ne pas tomber, alors elle serre la barre pour maintenir le cap. Les pieds ancrés dans le sol donc, Matthews regarde droit devant elle. Les lumières du saloon dansent le paso doble pendant qu’Irina cherche à ouvrir la porte du fourre-tout. Quand Irina lui parle de son manteau, Mae lui parle de son sujet de prédilection lorsqu’elle a trop bu : les frères. Irina ne la juge jamais, certainement parce qu’elle ne l’écoute pas. Mais ça, la voleuse n’a pas besoin de le savoir. Elle reste concentrée sur les lumières pour ne pas flancher. « Ah oui oui ton manteau. On va t’en trouver un. »

L’intérêt pour le manteau d’Irina est de courte durée, déjà la hors-la-loi pose ses fesses contre la rambarde de bois et se rattrape de justesse pour venir au sujet qui la taraude. « Moi y faut un cadeau pour Kilian. » Elle s’allume une cigarette, les yeux mi-clos, elle regarde son amie forcer la serrure en embrayant. « Mais j’me dis t’vois faut aussi pour Sean, mais … AH MAIS J’T’AI PAS DIT EN PLUS ! » Elle change de position pour aller coller son épaule contre le mur à côté d’Irina, fumant vite et mal en continuant. « J’l’ai dit à Kilian. Et ça vaaaaaaaa il l’a pas trop mal pris. J’crois. Il a dit qu’il m’aimait quand même. » L’épingle se casse dans la serrure, stoppant le récit de ses aventures un court instant, celui de dire : « Ah. Merde. » La cigarette coincée entre ses lèvres, la cendre s’échouant sur son chemisier, Mae cherche une nouvelle épingle dans ses cheveux. « Alors, Sean est pas là, j’suis tranquille. Mais quand y va revn’ir, Kilian a dit qu’y voulait l’taper. AH tiens ! » Mae tend l’épingle à Irina mais cette dernière casse déjà le carreau de verre pour pouvoir entrer. Elle se recoiffe donc et fait tomber sa cigarette qu’elle a oublié. « Ouais, alors, à ton avis j’fais quoi ? Parce que si j’prends quequ’chose pour les deux, Kilian va s’dire qu’j’couche t’jours avec son frère, j’ai déjà assez d’Grace qui m’emmerde avec ça. Alors qu’c’est pas vrai t’vois. Enfin si, mais plus là j’te jure sur la tête du p’tit d’Clyde ! Mais d’l’autre côté Sean va mal l’prendre si … Enfin y va quand même s’faire taper à cause d’moi quoi. » Un soupire accompagné d’un maigre sourire vient constater qu’elle n’est pas encore sortie de l’auberge. Mais voilà, Irina est coincée et Mae retient un rire.

« Shhhh ! On va nous entendre ! » Matthews pousse, tire, prend une jambe de la Russe, tire d’un côté, de l’autre et tout ça en manquant plusieurs fois de tomber. « Putain Irina ! T’es … coincée ! Attends, attends… » Pour retrouver ses idées, Mae tente de rouler une cigarette, mais le tabac tombe aux pieds de la soviet dont elle ne voit que les fesses. « Ok. Attends, je reviens. Bouge pas. » Elle pouffe de rire en s’éloignant, revenant vers le saloon. « Bouge pas … T’es con Mae p’tain. »

Les lumières, la chaleur, les rires, les cris et le piano du saloon bourdonnent dans sa tête comme dans une ruche dont elle n’est absolument pas la reine-mère. « Earl. » L’air grave, elle pose ses coudes contre le comptoir du bar. « T’as d’l’huile ? » Mae tourne la tête en direction de ses camarades en leur souriant. Surtout, ils ne doivent pas se douter que quelque chose ne va pas. Pendant ce temps, Earl l’interroge. « De l’huile ? » Mae s’agace et pianote sur le bar. « Oui, c’pour faire passer la chaude-pisse d’ma copine. T’veux des détails ? » Il n’y a pas de raison pour que ce soit toujours Mae qui endosse le mauvais rôle dans les mensonges du gang. Earl la regarde en fronçant les sourcils et Mae soutient son regard. Elle commence alors à ouvrir la bouche, mettant ses menaces à exécution. « J’souhaite ça à personne, c’pas beau à voir. » Ne souhaitant pas en entendre plus, le tenancier dépose une bouteille d’huile arrivant à la fin de sa vie en face de Matthews. « MERCI ! »

Elle repart alors en courant auprès de son amie et brandissant fièrement la bouteille. « On va t’oindre. T’as dû connaître ça quand t’étais chez les romains non ? » Ni une, ni deux, Mae soulève le chemisier de la princessa pour enduire son tour de taille d’huile. « Ah, s’tu vois Earl, t’as la chaude-pisse. » Slourp, le reste de la russe passe comme dans du beurre dans l’échoppe et Mae ouvre la porte.

« Bah, c’tait ouvert. »

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Jeu 9 Déc - 22:57


Les éléphants dans le magasin de porcelaine

@Mae Matthews


Un jour, quelqu’un avait dit à Irina que, chaque jour, l’être humain faisait en moyenne trente-cinq mille choix. Le premier étant de choisir de se lever. Puis, les autres s’enchaînaient en une ribambelle inconsciente. Faire péter la caboche de Mae ou bien de Patterson quand ils gueulaient trop fort (finalement préférer n’en exploser aucune), appeler Clyde par son petit surnom, avancer la mauvaise pièce aux dames et perdre contre Assane, aller chasser le lièvre avec Davis, rester avec eux plutôt que de s’offrir - une fois encore - à l’inconnu.
Chacun de ces choix importait car ils déterminaient notre futur. Qui nous étions.
Parfois, Irina y pensait sans se souvenir de l’inconnu l’ayant abreuvé de ces sages paroles.
En l’occurence, alors qu’elle était coincée à travers la vitre d’une porte d’un commerce miteux d’Imogen, elle y pensait.

Pendant ce temps-là, c’était une autre sage qui la nourrissait et son repertoire se trouvait bien souvent limité à un sujet de conversation - en particulier lorsqu’elle était saoule -. Une chance qu’Irina ait la tête du côté de la boutique poussiéreuse ; la voix de sa camarade lui parvenait étouffée de derrière les carreaux.

« Qu’est-ce que tu dis ? J’entends niet ! Zéro, nada ! »

Elle se tortilla un peu mieux pour tenter de se dégager, mais devant l’inefficacité de l’action, se contenta de ricaner.

« Moi, j’ai tué un tsar ! » rigolait-elle à voix haute. « Moi ! On y croirait pas, hein… On y croirait pas ha ha ! Et pourtant, et pourtant… Oh mon peigne ! Peut-être que si… »

L’alcool avait cette fascinante faculté d’écrouler le mur invisible entre les pensées et la langue, ce qui, chez Irina, ne signifiait pas grand chose puisque cette barrière n’existait déjà plus.

Elle étira le seul bras passé avec sa tête par le carreau dans l’espoir d’atteindre le précieux bijou.

« Allez, encore un peu… Encore… »

Elle avait toute la peau et les muscles qui tiraient de l’épaule jusqu’au bout des doigts, sa main une serre de rapace se rapprochant dangereusement de sa proie. Elle l’effleura. Il glissa à peine.

Brutalement, on l’attira en arrière sans la déloger pour autant.

« Eh ! » protesta-t-elle. « Mais qu’est-ce que tu fais ?! »

Mais déjà, Mae tordit sa jambe dans l’autre sens dans une chorégraphie digne des meilleurs chahut-cancan.

« Ça me rappelle mes années au Moulin ! Pas le Rouge, hein ! Le Moulin de la Galette. On dansait avec Céleste et Grille d’Égout et… Bah, tu t’en vas ? »

Les rires provoqués par les souvenirs de ses folles années à Paris se suspendirent lorsqu’elle entendit la voix de la hors-la-loi décroitre dans son dos.

« T’as qu’à le dire si je te fais chier, hein ! » rouspeta-t-elle en gesticulant comme un saumon pris entre deux rochers.

Les pieds à nouveau appuyés contre la porte, elle réitéra l’expérience et l’épaule qu’elle s’était déboitée il y avait quelques temps (en essayant d’ouvrir une porte, justement) grinça comme de vieux gonds rouillés.
Une grimace et elle retomba mollement, chassant d’un souffle exaspéré la mèche blonde qui était tombée devant ses yeux.

Néanmoins, sa mauvaise humeur disparut comme elle était venue lorsqu’elle s’imagina la tête du marchand, le lendemain matin, lorsqu’il viendrait pour ouvrir boutique.
Son regard se reposa sur son peigne.

« Bon, aller, on y retourne, » s’encouragea-t-elle, tous doigts tendus vers sa cible - l’idée de s’accaparer l’accessoire étant finalement plus forte que de se sortir de là -.

Des doigts glacés et gluant vinrent lui tripoter la taille. Un gros rire lui secoua les côtes et jaillit par sa grande bouche comme une cascade tenue prisonnière par la glace. Elle se trémoussa, hilare, pour tenter d’échapper aux chatouillis. Par réflexe, ses grandes jambes de mante-religieuse battaient comme les pales d’un moulin un vent, frappant tibias, cuisses et bras salvateurs.

« A-A-Arrête ! » hurlait-elle. « Ça chatouille ! Au secours, à l’assassin ! Ha ha ha ha ha ! »

À bout de souffle, elle sentait sa cage thoracique se comprimer… avant de finaliser glisser toute entière d’une seul mouvement à travers la vitre brisée, comme un poisson que l’on aurait libéré de son filet.

Elle hoqueta une seconde au sol, la face contre le plancher gonflé d’humidité. Son rire lui revenait dans la face, avec toute la poussière retenue dans les lattes.

« Et du coup, je te disais, » reprit-elle en s’asseyant. « Avec Céleste, on allait danser au Moulin. Cela de la Galette, pas le Rouge ! » insista-t-elle. « On dansait, je te jure, on faisait tourner plus de têtes que nos jupons. »

La slave étira son épaule endolorie.

« La chaude-pisse ? Bah, ça serait pas une nouveauté… Ça fait des semaines que ça dure, je t’assure, j’ai plus peur de pisser que de - »

Mais comme Irina n’avait pas peur de grand chose, la fin de sa phrase resta un suspens, comme toutes les saletés qu’elle avait ramassé en se vautrant par terre.

Le peigne lui revint soudain en mémoire.

Elle se précipita sur le bijou et caressa du doigt ses petites écailles brunes piquées de noir. Elle pouvait sentir les jointures sauter sous son ongle. Au centre, la pierre bleue luisait, mais moins fort que ses yeux.

Elle le glissa dans son chignon, ajustant fermement la mèche pour qu’elle dissimule correctement son oreille scarifiée.

« Alors ? » demanda-t-elle en se retournant vers Mae.

Mais elle n’attendait pas forcément de réponse, toute contente.

La sacoche ouverte, Princessa entreprit désormais de rafler méthodiquement et sans distinction de genre, d’utilité ou de nature, tout ce qui tomberait sous sa patte. Boîtes de haricots, baguettes en ivoire, boutons, rubans, tout dans le sac de Mary Poppins.

Puis, elle fit le tour du propriétaire, flânant dans les étales comme si elle eut été chez elle. Son regard détailla les objets avant de s’arrêter sur un chapeau en feutrine beige, ornée d’un cordon noir.

« Tiens, Mae ! Je te l’offre, il est pour toi ! »

Comme si elle l’eut acheté avec son argent, elle le posa sur les cheveux sombres de son amie.

« Voilà, tu es bien jolie comme ça ! »

Elle l’observa un instant, comme une mère aurait admiré sa fille se préparant pour son premier bal. Mais l’une comme l’autre avaient troqué la boutique de mode blanche et mauve, sentant le coton et l’eau de rose contre l’humidité rance d’une cahute au fin fond de l’Amérique. Les belles robes de tulles, de dentelles et de soie neuves contre les cuir épais et rugueux d’un chapeau qui avait déjà servi (et dont le précédent propriétaire était probablement décédé avec ce même-chapeau sur la caboche).

Irina ajusta les mèches noires de Mae derrière ses oreilles.

« Je te ferai une tresse quand on rentrera, » décida-t-elle. « Comme à la mode de chez moi. »

Personne ne savait vraiment de quel chez elle elle parlait, mais elle était convaincue.

Ses doigts farfouillèrent jusqu’à trouver une petite boite ronde de cire pour chaussures noires. Elle s’en tartina une dent de devant.

« Hé hé ! Regarde ! »

Elle fit volte-face pour sourire de toutes ses dents (moins une) à la voleuse. Elle renfila en gloussant comme une petite fille.

Un grand fracas la fit se retourner vers la porte.

Les portes du saloon vomissait une lumière orangée plus vive. Earl venait de jeter un type dehors. Ce dernier hurla en grommelant. Il peina à se redresser, le poing tendu devant lui, avant de s’écrouler à nouveau, la tête la première dans le purin des chevaux laissés devant.

À l’abri de l’obscurité de l’échoppe, Irina se plia en deux pour esquiver le regard plissé du barman, observant suspicieusement dans leur direction. Elle se boucha le nez pour éclater d’un rire pétaradant, comme une vieille locomotive que l’on aurait pas démarré depuis quinze ans.



Irina N. Valanova
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Jeu 30 Déc - 12:01


Les éléphants dans le magasin de porcelaine

@Irina N. Valanova

Mae se met à glousser comme une dinde, le rire teinté de dégoût lorsque la Russe admet avoir la chaude-pisse depuis des semaines. Avant d’entrer dans la boutique, elle s’arrête donc un instant pour réfléchir, tanguant tantôt à droite, tantôt à gauche, d’avant en arrière. Irina, c’est la figure maternelle, celle que l’on refuse d’imaginer partager des moments intimes avec un autre. Mae a du mal à imaginer celle qu’elle considère comme une mère faire ce genre de choses. Dans un soupir empestant l’alcool, elle pénètre dans la boutique. « J’aurais préféré pas savoir ça. » Elle sourit à sa comparse. « T’es belle comme ça, on dirait une vraie princesse comme t’étais avant. » Dans l’obscurité, sa vue se brouille, elle tâtonne, une allumette pour seule lumière. « Enfin, t’l’es t’jours. Hé mais y’a du savon ! » Le sésame, son Graal à elle depuis qu’elle mène cette vie, sa petite victoire, c’est quand elle a du savon. Relent du luxe bourgeois qu’elle a abandonné en quittant Boston. Elle est toujours contente de pouvoir prendre un bain dans le calme d’une auberge. L’été étant venu fondre les eaux du lac, cela fera très bien l’affaire. Elle glisse donc plusieurs petits pains de savon dans la poche droite de sa robe, jusqu’à ce qu’elle ne puisse plus en mettre. « T’sais qu’avant j’faisais ça à Chicago, les savons. » Elle sourit en passant sans aucune délicatesse sa main sur une étagère, faisant chuter des assiettes. Mae n’a jamais parlé de ça avec quiconque, l’oreille d’Irina se retrouve seule privilégié des confidences alcoolisé de la hors-la-loi. « J’passais des heures debout à emballer ça, ça arrivait à la chaîne ça arrêtait pas. Et l’matin quand ils ouvraient les grilles, ça puait la graisse des animaux qu’i f’saient brûler. Pis t’en avais une qui surveillait tout … J’sais plus son nom. Une sacrée conne. Un peu d’pouvoir et ça t’monte à la tête. » C’est pour ça qu’elle ferait tout cramer si ça ne tenait qu’à elle. Pour que plus personne n’ai à subir tout cela.

« Ah bah merci ! » Les yeux de l’idiotie restent figés en un sourire du même acabit, elle tourne sur elle-même, manque de tomber dans un rire gras. « T’sais comment j’l’ai eu l’ancien ? » Décidemment, Matthews se sent de lui conter l’histoire de sa vie ce soir. « On était en Louisiane j’crois bien qu’on v’nait d’arriver. Ou c’était avant … P’têt’ bien dans l’Tennesse. » Parce qu’on a tous en nous quelque chose de Tennesse. Non. Pardon. « Ouais j’crois. Et ouais y’avait un gars qui nous d’vait d’l’argent pac’qu’on avait volé des ch’vaux pour lui. En plus on avait eu chaud au cul, et j’ai perdu mon chapeau. Et donc, le gars là j’sais plus son nom, y veut pas payer. Et j’aimais bien son chapeau. Alors j’dis à Kilian on y va, tu lui en mets une entre les deux yeux et j’prends son chapeau pac’que j’l’aime bien son chapeau. » Pliée en deux, elle rit en revoyant la scène macabre de l’homme gisant au milieu de ses chevaux volés, le crane explosé par l’impact d’une balle trop précise. « Et il l’a fait c’con ! »

Mae ne fait pas attention au chahut de la rue, bien trop occupée à chercher de quoi voler, toujours concernée et concentrée à l’idée de trouver les objets qui feront passer sa bêtise dans le cœur des frères. Elle y croit dur comme fer, et c’est bien là le plus important. Et à nouveau, elle explose de rire devant le spectacle d’une Irina qui ne manque jamais l’occasion de montrer son intelligence au monde. Tout comme elle, Mae se penche, cognant maladroitement sa tête contre le coin d’une table. « Aïe ! » Une main sur le front et l’autre contre sa bouche, elle tente d’étouffer son rire sans vraiment savoir pourquoi. La pression de son corps en deux fait tomber un savon de sa poche trop pleine. « Oh non, mon savon ! Shhhh Irina arrête de rire, j’ai perdu mon savon. » Alors, à quatre pattes dans l’obscurité, la jupe baignant dans l’huile, Matthews cherche l’objet disparu. « Aide-moi ! »

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Ven 31 Déc - 23:10


Les éléphants dans le magasin de porcelaine

@Mae Matthews


La bouche de Mae bullait autant que les savons dont elle parlait. Elle ne sentait pas aussi bon, cependant. Les relents d’alcool avaient remplacé le doux parfums de la lavande ou de l’huile d’olive. D’ailleurs, Irina avait appris à reconnaître un véritable savon de Marseille. Il fallait qu’il soit vert, brun ou beige. C’était ce que lui avait dit Fanny, une de ses copines du marché provençal.
Les petits pains que fourraient la voleuse dans ses poches n’avaient rien des savonnettes françaises. Vendues neuves, elles étaient pourtant déjà toutes nervurées avec des crevasses épaisses comme un doigt qui zébraient leur surface mollie par la chaleur. Et elles ne sentaient pas aussi bons.

Des savons, Mae passa aux chapeaux, lui récitant l’épopée de son précédent couvre-chef avec la verve et l’émotion d’un conteur épluchant l’histoire d’Aliocha Popovitch. Tiens, maintenant qu’elle y pensait, ils ressemblaient drôlement aux chevaliers errants, Mae, Kilian et Sean. Restait à savoir qui serait Aliocha, qui serait Dobrynia et qui serait Ilya. « Sean, Ilya. Kilian, Dobrynia. Et Mae Aliocha. » Pour le dernier, elle se souvenait nettement d’une caricature du héros ivre, glissant de sa selle. Et son maintien approximatif sur le dessin ressemblait drôlement à la démarche louvoyante de la voleuse qui trébuchait contre tous les pieds de meuble. Peut-être était-ce plus pour cela que pour la ruse - caractéristique d’Aliocha - qu’elle avait grimé Mae en Popovitch. La grimace de la slave finit de faire caqueter la poulette brune qui s’éclata tout bonnement le front contre un coin de table en geignant. À travers son hilarité, un sourire fleurit sur le visage de la comtesse Soumarokova-Elston - elle aimait bien ce surnom aussi, peut-être devraient-ils commencer à l’appeler ainsi, en plus de Princessa, désormais -.
Oui, c’était définitivement pour cela que Mae était Aliocha.

« Je me rappelle quand je lisais les aventures des bogatyrs à mes enfants, » marmotta-t-elle entre deux hoquets. « Je raconte bien les histoires, il faut dire. »

Sa dent était toujours noircie par le cire de chaussure. D’ailleurs, elle commençait à avoir un goût bizarre sur la langue. Ce machin-là n’était probablement pas comestible. Enfin, elle en avait vu d’autres.

« Une fois, » se rappela-t-elle. « J’ai mangé un opossum. Eh bah, c’était vraiment dégueu. Et tu me connais pourtant, je suis pas difficile… Mais alors là. J’ai tout rendu pendant la nuit. »

Devant elle, Mae courrait après ses savons qui glissaient hors de ses doigts huileux comme des anguilles.

« Qu’est-ce que… Eh vous là-bas ! »

De l’autre côté de la rue, Earl arrivait à grands pas suivi du type rond comme une queue de pelle et couvert de purin. En voilà un qui venait rajouter un nouveau parfum à l’échoppe poussiéreuse rendue plus agréable encore par la présence des deux membres du gang O’Reilly.

« Oh, super de la graisse de baleine ! » s’émerveilla Irina. « C’est pour les rides. Il faut s’en mettre dès ses vingt-cinq ans. C’est à partir de ce moment-là que tu commences à décrépir. »

Elle eut un regard entendu vers Mae. Il était encore temps de lui trouver un mari riche. Elle prenait de l’âge, mais sous la crasse elle était encore mignonne.

« Ne bougez plus ! »

La silhouette du barman se découpait nettement dans l’encadrement de la porte. La lumière vague du saloon l’auréolait d’un orange brûlant. Contre la fenêtre - juste à côté - son ancien client avait écrasé son nez et bavait contre la vitre plus que de raison.

Irina pétarada d’un nouveau rire, attrapa le petit pot de graisse de baleine et renversa l’étagère qui était devant elle.

Tout éclata dans un concert de vaisselle brisée, de tissus déchirés et d’objets contondants heurtant le parquet.

« Bonne nuit ! » s’esclaffa-t-elle en lourdant sa voix d’un accent français outrancier.

Sa sacoche lourde de son butin, elle passa son bras dessous pour mieux le soutenir, releva ses jupes de son autre main et fila vers la sortie de derrière. Sur son passage, elle prit méthodiquement soin de renverser boites de conserve et porte-manteaux pour entraver la route des deux gentlemen.

Un coup d’oeil par-dessus son épaule et Irina les voyait déjà se débattre entre les savons qui jonchaient le sol et la mer d’huile déversée par Mae. Ils ressemblaient à des patineurs en grande difficultés.

« Bouffons ! » lâcha-t-elle en ouvrant grand la porte avant de sauter dans la nuit.

Derrière elle, Mae tenait la cadence tandis qu’elle s’élançaient en laissant l’échoppe dévastée dans leur dos. L’herbe sèche lui griffait les mollets. L’air tiède gonflait ses poumons. La course lui brûlait la gorge. Elle riait et les étoiles pendues au-dessus de sa tête riaient avec elle.

Il était facile de s’échapper d’Imogen. il suffisait de se glisser en dehors de la rue principale - la seule - pour terminer dans des champs et des pâturages. Un peu plus long, les ombres de la forêt étaient accueillantes.

Estimant être assez loin, la révolutionnaire finit par s’accroupir dans les hautes herbes, le souffle court et la respiration laborieuse. Chaque frémissement de sa voix n’était qu’un reste du rire dont elle n’arrivait pas à se débarrasser. Elle serrait fort sa sacoche contre sa hanche.

« Ha ha ha… Ha… » Elle renifla.

Ses côtes lui faisaient mal aussi se laissa-t-elle finalement choir sur son séant. Elle cracha un jet de salive noire avant de se frotter la dent avec une phalange.

« C’est comme l’opossum ce truc, vraiment pas bon. J’ai la langue noire, dis ? »

Elle tira sa langue à Mae sans vraiment se préoccuper du fait qu’il faisait probablement trop sombre pour y voir quelque chose.



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Ven 21 Jan - 21:27


Les éléphants dans le magasin de porcelaine

@Irina N. Valanova

Le savon file entre ses doigts. Genoux contre le sol, fesses levées en direction du ciel, Mae avance sur les coudes à chaque saut de grenouille de la part du précieux tant convoité. « Mon savon ! » A chaque chute, elle répète inlassablement cette complainte. « Oh non ! Mon savon ! » Jusqu’à ce qu’il disparaisse sous une étagère. « Oh non, mon savon ! » Mae tente alors de rattraper ce qui la rattache encore à un semblant d’humanité en se mettant à plat ventre pour passer son bras sous l’étagère. Au passage quelques autres savons qui débordaient de sa poche tombent sans qu’elle ne les entende, trop occuper à geindre sur celui qui se trouve maintenant trop loin d’elle. Elle soupire une dernière fois « Mon savon. » avant d’entendre les voix venant de l’extérieur. Un court silence et la voilà qui se met à rire avec sa comparse. Alors, elle se relève, gardant le dos courbé pour ne pas se faire remarquer et répète après Irina, forçant une voix d’outre-tombe (mais lorsqu’elle a bu, elle a toujours la voix plus grave) « Bonne nuit ! »

Matthews manque plusieurs fois de rouler sur les boîtes de conserves renversées par la Russe, mais elle se tient aux étagères, engorgeant encore plus le passage de ce qu’elle laisse tomber. Elle aussi elle court à toute vitesse alcoolisé derrière son amie, l’air chaud alourdissant sa course bien plus que les verres enfilés quelques heures auparavant. Le sprint final lui arrache un râle alors qu’elle se laisse retomber dans l’herbe sèche de l’été brûlant. Tout son corps irradie de l’effort qu’elle a du faire, ses jambes devenues molles comme du coton s’enfoncent dans le sol à mesure que sa respiration s’alourdit, son dos caresse les herbes hautes pour finalement s’aligner avec le reste de son corps. Mae reste un long moment ainsi à regarder le ciel dégagé de tout nuage. Les étoiles semblent se refléter dans ses yeux et partout autour d’elle. Elles scintillent, d’une blancheur absolue et bourdonnent jusque dans ses oreilles. Mae se laisse aller en plissant les yeux pour y voir plus clair, floutant encore un peu plus ce qui l’entoure. Elle ne voit pas les dents d’Irina dans l’obscurité, trop occupée à son concentrer sur le reste, c’est-à-dire rien.

« Je sais pas si les opossums ont la langue noire Irina mais en tout cas … » En tout cas quoi ? Elle ne sait pas vraiment. Un long soupire lui échappe alors avant qu’elle ne reprenne. « Bah. J’ai pas trouvé de cadeaux tu sais. » Oui, cette idée grandiose avait un but qu’elles n’ont pas su atteindre. Que Mae n’a pas su atteindre, elle n’a pas encore conscience de la sacoche pleine de trouvailles de la Princessa. « Hé. » Dans un geste lent, Matthews tâte les poches de sa jupe. La frénésie s’empare d’elle lorsqu’elle en ressort uniquement un seul morceau de savon qu’elle vient plaquer contre sa joue. « Oh putain ! Oh putain ! » Elle rit en se roulant sur un côté pour tenter de voir plus clair son amie sous la lumière de la lune. « Il m’en reste un ! » Sa jupe remontée au-dessus des mollets, elle pose sa tête contre l’unique, le seul savon, le survivant parmi les neuf qu’elle a possédé en même temps. « J’vais pouvoir me laver putain ! » Et ce sont bien des larmes de joie qui s’échappent un peu du coin de ses yeux fatigués.

« Tu l’dis pas hein c’que j’vais t’dire mais parfois tu sais j’me dis que … » Le visage de Mae devient plus sérieux alors qu’elle repose ses yeux sur la voute céleste. « Pourquoi j’fais tout ça ? Pourquoi j’me bats pour des gens qui … qui en ont rien à foutre ? J’veux dire t’sais dans l’train, y’en a pas un qui a eu une étincelle dans les yeux quand j’leur ai parlé. » Ils étaient tous éteins en réalité, pris par la peur qui envahissait leurs esprits. Du revers de sa manche, Mae essuie son nez en reniflant sans aucune délicatesse. « Et moi j’suis là, j’continue à nous faire courir des risques parce que j’suis trop conne c’est ça ? Alors qu’on pourrait faire un dernier coup et tous se séparer et r’partir à zéro là où on veut et s’faire discret jusqu’à c’qu’on s’décide à crever la gueule usée. » Dans le noir, elle cherche la main d’Irina qu’elle finit par attraper. « J’suis désolée Irina. » Elle ne mérite pas sa folie.


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Lun 24 Jan - 21:02


Les éléphants dans le magasin de porcelaine

@Mae Matthews


Les poumons toujours enflammés par leur course folle à travers champ (la cigarette devait y être pour quelque chose), la respiration hachée et secouée de rire continuait de gonfler douloureusement la poitrine de la russe. Un point lui pressait les côtes, comme si elle s’était faite tirée dessus juste sous le coeur (à droite pour le coup, comme ses organes étaient inversés). Le rythme saccadé de son souffle troublait celui des grillons et des autres insectes invisibles qui devaient tapir les pâturages. Dans leur dos, la forêt bruissait elle aussi.

Irina continuait de se frotter la dent jusqu’à en peler la pulpe de son index tandis que Mae roulait dans l’herbe, euphorique à l’idée d’avoir pu trainer un savon hors de l’échoppe. Le chapeau beige avait glissé de sa tête brune pour laisser s’échapper ses cheveux qui paraissaient noir dans l’obscurité. Ses roulades ravies avaient emmêlé ses mèches et il ne fallut que quelques minutes pour qu’elle ne soit couverte de petite boulettes collantes qu’Irina avait l’habitude de retirer, fichées dans ses jupons.
Au loin, dans l’ombre des cahutes d’Imogen, on pouvait apercevoir la flamme vacillante d’une lanterne qui éclairait les champs. Cachées sous la canopée, les deux voleuses étaient hors de portée cependant.

Les trémolos joyeux de Mae finirent par se calmer et c’est avec une voix plus sérieuse - quoiqu’encore passable ivre - qu’elle reprit son discours.
La comtesse l’écouta d’une oreille distraite, soudain un brin alarmée par la hauteur des herbes dans lesquelles elles se trouvaient. « Ah, c’est pas de bol, » songea-t-elle en attrapant une tige entre ses doigts noircis. « C’est un repère à tiques ça. J’aime pas les tiques. » Parfois, sa jument en avant des grosses comme l’ongle du petit doigt et toutes blanches avec ça. Elle devait y aller à la pince à épiler pour sortir ces horreurs.
Par précaution, elle descendit sa jupe que la course avait fait remonter sur ses genoux. Elle était bonne pour une inspection dès leur retour au bar.

En point final de ses questions philosophiques, Mae attrapa la main d’Irina qu’elle serra bien fort.
Sentant que ses interrogations attendaient une réponse de sa part - en tout cas c’était ce que son silence laissait présager - l’ancienne danseuse de ballet couvrit ses doigts des siens.

« Ok ! » lâcha-t-elle comme si l’arnaqueuse lui eut proposé d’acheter du pain. « Tu regarderas dans mon dos quand on sera rentrées ? Pour les tiques ? Une fois, mon deuxième mari en a eu une dans la raie des fesses, je te raconte pas le numéro de trapèze que c’était. »

Elle se redressa en clignant des yeux ; sa respiration s’était calmée. Le village avait replongé dans sa quiétude. On entendait vaguement le brouhaha joyeux du saloon et les notes légères du piano désaccordé.
Plus aucune lueur n’arpentait les champs à leur recherche.

« Allez viens, on rentre, » annonça-t-elle en tirant sur le bras de Mae. « Allez, lève toi ! »

Elle traîna le corps mou de la voleuse en tirant sur son poignet jusqu’à le déboiter. L’exercice la fit suer. Son sillage laissa s’envoler des volutes de poussière sèche. Il n’avait pas plu depuis un long moment par ici.

Lasse, Irina laissa finalement Mae s’affaler dans l’herbe pour remettre la mèche que l’effort ne cessait de chasser de son chignon. Cette fois, le peigne la tint bien en place. Son oreille mutilée était bien dissimulée.

« Et n’oublie pas le chapeau que je t’ai offert ! » siffla-t-elle en désignant la feutrine beige qui gisait à côté de Mae. « Il m’a coûté les yeux de la tête ! Ah, je crois que j’en ai une, regarde ! »

Elle pointa sa jambe de ballerine du dimanche vers la truffe de la hors-la-loi et leva ses jupes pleine de graisse pour dévoiler une cheville poilue.

« Tu la vois ? C’en est une ? » Elle-même se courbait en avant pour essayer d’y voir quelque chose dans le noir.  

L’action fit glisser sa sacoche sur ses épaules et elle glissa brutalement sur son bras, arrachant la moitié de son chemisier à son épaule. Les bibelots cliquetèrent les uns contre les autres.

« Rah, je déteste quand ça fait ça ! » se plaignit-elle en remontant sa besace pour la glisser sous son bras. « Moi j’en ai des cadeaux pour Kilian, si tu veux… Tiens ! »

Elle farfouilla dans son sac aux trésors pour en ressortir son petit pot métallique de graisse de baleine.

« Tu lui diras que c’est pour la peau, » lui expliqua-t-elle. « Une fois par jour, le soir par exemple. Regarde comme ça sent bon. »

Elle souilla la surface parfaitement lisse et laiteuse de la crème - laissant au passage une trainée de cirage à chaussure noir - pour en déposer une noisette sur le nez de Mae.

« C’est grâce à ça que je fais dix ans de moins. Tu devrais y penser, toi aussi, d’accord ? Tu t’énerves tellement dernièrement… Tu vas ressembler à un pruneau. Enfin seulement si tu pètes pas une durite avant. »

Elle étouffa un bâillement à s’en décrocher la mâchoire dans le dos de sa main.

« Tu crois que qu’il restera un truc à manger ? Grace avait fait pour beaucoup, non ? »





Irina N. Valanova
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Dim 6 Mar - 20:23


Les éléphants dans le magasin de porcelaine

@Irina N. Valanova

Les confidences sur l’oreiller ne semblent pas émouvoir un seul instant la hors-la-loi qui ne prend même pas la peine de la remercier pour les excuses qu’elle lui a servi sur un plateau. La remise en question est une chose rare et précieuse qu’il faut savoir accueillir comme un privilège lorsque cela vient de Mae Matthews. Mais, pour Irina, la réalité est tout autre, bien plus préoccupée par la présence de tiques que la fin de leurs vies de truandes. “J’irai certain’ment pas r’garder dans ton cul.” Le dégoût lui tord alors la bouche rien qu’à imaginer un tel moment en sa compagnie. Irina Valanova se dit princesse, mais sa disgrâce lui colle pourtant à la peau. Elle se souvient encore d’un été où les poux avaient décidé de tous les envahir et des solutions radicales qu’Irina avait tenté sur les têtes qui ne faisaient que se gratter. Si les hommes avaient fini par se raser la tête, Mae avait opté pour une mixture qu’un trappeur lui avait conseillé sur un marché à la Nouvelle-Orléans. Elle avait déboursé une fortune pour obtenir de la lavande et de l’huile de ricin qu’elle avait mélangé à du whisky. Par la suite, en préventif, elle se tartinait régulièrement d’une décoction vendue par un autochtone sur ce même marché. Pendant des mois, la hors-la-loi a traîné sur elle une odeur permanente de charogne, mais elle n’a plus jamais été inquiétée par les parasites. Étrangement, Sean et Kilian n’étaient pas enclins à trop s’approcher d’elle pendant cette période de leur vie.

Le corps de Mae retombe mollement à chaque tentative vaine de larguer les amarres de la part de la Russe. Elle essaye pourtant, mais quelque chose l’attire irrémédiablement vers le sol qu’elle perçoit comme un doux nuage de volupté. Sa main en vient même à caresser l’herbe sèche qui vient lui chatouiller une joue. Mais la force d’Irina la tire de ses contemplations, traînée sur quelques centimètres, Matthews râle et laisse sa comparse s’épuiser. “Raaaah mais pourquoi tu veux pas qu’on reste un peu ?” Assise par la force, droite sur ses fesses, elle palpe ses seins à la recherche d’une cigarette tout en plissant les yeux pour s’habituer à l’obscurité et chercher la fameuse tique. “ Non, non c’est rien.” Un haussement d’épaule accompagne les paroles mensongères : dans le noir, elle ne voit absolument rien. Ivre, elle voit double. Elle manque d’ailleurs plusieurs fois la prise de son nouveau chapeau, tâtonnant dans les champs tout en continuant de parler à la plus vraie des menteuses.

Chapeau sur la tête, Matthews soupire en chouinant pour essuyer la graisse de baleine posée sur son nez. “Forcément que j’m’énerve.” Elle est en colère contre elle-même, contre le monde, plissant toujours un peu plus les rides de son inquiétude grandissante quant à son avenir. “J’suis plus capable d’faire un braquage correctement. Comment tu veux qu’j’sois pas en colère hein ? Et en plus, j’fais du mal autour d’moi. J’suis qu’un fléau Irina, une faucheuse d’espoirs.” Grandiloquente, elle lève les bras en direction du ciel, pleurant de dépit, enfant trop gâtée qui vient avouer sous les vapeurs alcoolisées. Exagérant sa vie qu’elle ne voit plus comme douce. Sa voix gémissante n’inspire pourtant aucune pitié. Si ce n’est celle de la voir dégriser. Supplice qu’elle inflige autour d’elle. “Une … calamité qui s’abat sur les gens qui sont autour de moi ! Comment t’veux qu’j’aime les gens correctement hein ? Dis moi ! Dis moi comment j’fais moi hein ? Parce que Kilian il va jamais m’pardonner et Sean non plus j’le sais ! T’as vu comment ils m’regardent ? J’vois bien qu’ils donnent raison à Patterson.” Elle prend son savon entre ses mains, amas de graisse animale et de plantes séchées qui lui irritera la peau au premier lavage. Du bout des doigts, elle le câline, substitution de réconfort qu’elle n’a pas dans son ivresse bête. “Même Kilian il dit qu’il m’en veut pas mais il m’en veut j’le sais.” Un soupire éteint un dernier sanglot avant qu’elle ne redresse la tête. “Tu trouves que j’fais vieille pour de vrai ?” Elle qui pensait avoir de la chance face au temps qui semblait passer sur les autres et l’oublier.

“Bah. Laisse tomber.” Un dernier immense effort s’échappe de ses poumons quand elle se relève pour retrouver la Russe. “Tu manges c’que fait Grace toi ?” Plutôt crever. “Tu m’dégoûtes.”


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Ven 1 Avr - 23:05


Les éléphants dans le magasin de porcelaine

@Mae Matthews


Le mélodrame n’était pas un art inconnu à Irina. Son passé d’actrice de théâtre y était pour quelque chose, certes, mais c’était surtout sa vie à Paris (à naviguer de salon en salon avec des femmes et des hommes plus fardés que des prostitués) et en Angleterre (à battre la campagne en compagnie de nobliaux obséquieux) qui lui avait appris l’orfèvrerie délicate des larmes, des envolées lyriques et des mots plus gros que soit. Les Français et les Anglais avaient beau passablement se détester, ils avaient en commun un goût prononcé pour les longs discours sentencieux, la larme à l’oeil et la voix toute tremblotante. La cour de Russie n’était pas aussi amusante.
Mae à elle seule rassemblait le tout Paris et le tout Londres. Beaucoup n’aurait pas parié sur elle, à la voir accroupie, ivre au milieu de nulle part, à se frotter le nez avec de la graisse de baleine. Mais la slave la pratiquait depuis assez longtemps pour connaître son potentiel de passionnée exaltée. Et il était fleuri. D’ailleurs, elle ne baissait pas les bras ; après une interlude (trop) rapide d’inspection de tique, elle repartait de plus belle.

Le personnage principal de son monologue était, comme souvent, ses insécurités. Elle avait beau toujours présenter un masque de confiance absolue, Irina n’était pas aveugle. Avec une patience de nonne, la révolutionnaire observa la lieutenante des O’Reilly vociférer contre elle-même ou bien contre les autres, l’oeil luisant et le nez morveux. Sa tête échevelée dissimulée sous son nouveau chapeau en feutrine, le visage de Mae peinait à exprimer un sentiment distinct. Elle était troublée, au moins autant que les bières qu’ils avaient ingurgité au saloon.
De l’ongle de son majeur, Irina décocha une pichenette sur son épaule, croyant se débarrasser d’une tique invisible. « Saloperie, » songea-t-elle en lissant son col.

« De quoi on parle déjà ? Du train ? De Kilian ? De Sean ? »

Elle se craqua une cigarette avant d’en proposer une à Mae. Cette dernière s’était redressée. Les braises rougeoyantes du tabac éclairaient son petit visage d’une lumière faiblarde. Elle faisait presque de la peine avec ses joues striées de larmes, ses paupières gonflées et sa truffe mouillée. « Un vrai petit cocker. » Irina en avait eu un, plus jeune. Mischka. Elle avait l’habitude de lui donner son assiette à lécher sous la table. Le pauvre chien était devenu rond comme un petit tonneau. Il sentait toujours bon le romarin derrière les oreilles lorsqu’il courrait dans le jardin d’aromates en été. Une brave bête qui était morte de sa belle mort. L’américaine ne serait jamais ni aussi grasse, ni aussi vieille que Mischka. Trop de stress. Il n’y avait qu’à voir son teint.

« Bah quoi ? » souffla la voix enrouée d’Irina. « Tu fais ta propre popote toi ? Tu demandes qui a fait le ragoût avant de manger ? Et si c’est Grace tu craches dedans ? Aller Mae, à d’autres. »

La plupart du temps, les prises de bec entre Mae et Grace l’amusaient. Elle s’asseyait avec Patterson autour du feu et, en vieilles pies, ils s’amusaient à commenter la bagarre comme deux journalistes. « Beau crochet du droit de Matthews, mais l’irlandaise ne se laisse pas abattre… »
Mais, parfois, elle se lassait de leurs éternelles remontrances et coups bas. L’hiver en particulier. Le camp était souvent morose pendant la saison froide ; on souffrait du manque de nourriture, de confort, d’engelure et de cul gelés à force d’aller chier dans la neige, et leurs piaillements constants finissaient par lui taper sur les nerfs en plus d’envenimer l’ambiance.

La russe ricana en soufflant sa fumée âcre dans le visage humide de la jeune femme.

« Tu diras que je te dégoûte quand tu auras vu ma raie des fesses, va ! » s’amusa-t-elle en reniflant. « Y’en a qui ont payé pour ça, tu sais… Tu te rends pas compte du privilège. »

Elle étira sa longue carcasse en geignant. L’escapade à travers champ lui avait fait passer la sensation douloureuse de son infection urinaire. Parfois, la brûlure restait pendant plus d’une heure après le pipi évacué.

« Tu te prends trop au sérieux, » finit-elle par lâcher en haussant les épaules. « T’as essayé, ça a foiré, point. Ça sert à rien de se morfondre. »

La philosophe de comptoir entama un détour pour atterrir vers les latrines publiques ; là où elles avaient été officiellement vues pour la dernière fois. Cela signifiait une petite marche pour remonter le champ et un court passage à travers le bosquet plus clairsemé que des cheveux sur le crâne d’un quinquagénaire.

« Et puis personne n’est mort, hein. Patterson a perdu une jambe, j’ai perdu une oreille, bon. Ça arrive. On a ramené des bijoux quand même. Et Arthur et Nadie. Ils étaient marrants. Enfin j’imagine qu’ils le sont toujours. Va savoir où ils sont maintenant… »

Pendant quelques longues minutes, on n’entendit rien d’autre que le bruissement de leur jupe contre les hautes herbes et leurs pas dans la terre aride. La fumée s’élevait de la cigarette d’Irina comme un serpent s’enroulant autour du néant. Les grillons entamaient un nouveau couplet de stridulations mélancoliques. Une chance que la pleine lune éclairait bien le paysage.

« Moi je t’aime bien, » rigola-t-elle en lui enfonça son coude dans les côtes de la brune. « Mais il faut arrêter ça, hein. »

Elle mima des expressions exagérées sur son visage : bouche grimaçante, yeux plissés, mains en l’air, s’arrachant les joues, puis le coeur, simulation d’évanouissement.

« Sinon t’auras même pas le temps de le devenir, vieille. Je vais te dire, une de mes tantes, trente-sept ans, encore fraîche comme une rose, guillerette, bien sur elle et tout. Mais nerveuse… Nerveuse comme pas parmi. Elle se bouffait les ongles et la peau qui va autour. Des fois, elle dormait pas pendant des semaines entières pour qu’elle pensait. Son coeur a lâché un petit matin. Elle jouait aux cartes et bim, face contre la table et elle s’est plus jamais relevée. Quand ils ont essayé de la ranimer, elle avait l’as de pique collé sur le front. »

Elle colla une pichenette sur le front blanc de Mae.

« Alors arrête de ruminer et pense plutôt à planifier le nouveau braquage. Et sinon, reconvertis-toi dans le théâtre. »





Irina N. Valanova
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