L'haleine de John formait un nuage épais autour de sa tête dont les boucles qui commençaient décidément à être trop longues volaient de manière éparse autour de son visage rosi par le froid. Il faudrait qu'il rende visite au barbier bientôt s'il ne voulait pas complètement ressembler à un sauvageon. Bien que le printemps soit censé pointer le bout de son nez bientôt, la neige ne semblait pas être d'accord pour fondre et le lever aux aurores avait été dur pour le fermier. Il lui avait fallu toute sa motivation pour sortir son corps lourd et endormi du foin de la grange ou il avait passé la nuit et seller son cheval de ses doigts engourdis et rouges pour se mettre en route avant les premiers rayons du soleil. Mais il ne se rendait pas à Imogen pour le loisir, de toute façon on ne pouvait pas dire que la petite ville aux rues miséreuses attirait beaucoup les touristes, et il avait bien l'intention de remplir sa course au plus vite. Alors sans se plaindre il avait enfourché sa jolie jument baie et était parti au petit trot à travers la lande encore transie par le froid de la nuit.

Il était arrivé à la ville en même temps que les premiers rayons de l'astre solaire et il devait admettre que même si le vent polaire engourdissait désagréablement toutes ses extrémité, la lumière se reflétant sur le paysage enneigé faisait danser les gouttes gelées comme autant de lumignons accrochés aux toits des maisons qui crevaient fièrement le plat de la prairie. Il souffla dans ses mains pour les réchauffer s'octroyant une petite pause pour admirer le paysage alors que Merry s'impatientait en soufflant bruyamment par les naseaux. Il avait une lettre à délivrer et il s'acquitterait de cette tâche avant de se permettre de flâner un peu dans les rues de cette ville qu'il ne connaissait pas encore.

La commission dont il avait la charge s'était faite plus rapidement que prévu. La réponse à la lettre mandatée en poche, il avait patiemment attendu dans le salon du destinataire de l'épître en sirotant du café bien chaud le temps que celui-ci réponde, il cherchait maintenant une boutique toute particulière dont on lui avait parlé alors qu'il travaillait encore à la ferme Doyle. Imogen n'était pas bien grande aussi il lui fut facile de trouver la bâtisse dont on lui avait vanté les mérites. John flatta l'encolure de sa jument alors qu'il sortait le pied de l'étrier et l'attacha près de l'abreuvoir le plus proche destiné à accueillir les chevaux des voyageurs. Le fermier déchargea sa monture du gros sac de toile qui lui alourdissait l'arrière-train depuis trois jour et s'engagea d'un pas assuré vers l'étale de fourrures qui se dressait devant lui.

Le bonhomme qui se dressait devant la porte n'avait pas l'air des plus amicaux. Le gaillard était aussi velu qu'un ours et semblait en avoir également emprunté le caractère. Il le toisait de toute sa hauteur, perché sur sa jambe de bois, preuve d'une vie pas toujours douce, et John comprit tout de suite qu'il n'avait pas intérêt à faire le malin.

- Bonjour, commença-t-il poliment en s'arrêtant devant le gaillard, j'ai deux ou trois peaux à vendre et on m'a recommandé votre échoppe.

Il déposa son lourd paquetage sur le sol et en défit les liens pour donner un aperçu des fourrures qu'elle contenait au vendeur. Il avait trimballé la lourde fourrure du cougar que Mako lui avait laissée, trimballée depuis Silverstone dans le seul but d'enfin pouvoir s'en débarrasser contre quelques pièces sonnantes. Puisqu'il devait de toute façon se rendre à Imogen pour jouer les facteurs il s'était dit qu'il pouvait bien en profiter pour quelques commissions personnelles. À la peau du lion des montagnes s'ajoutaient deux peau de lapins qu'il avait dépecés lui même mais avec beaucoup moins de dextérité que le travail qu'avait exécuté son ami autochtone sur le félin qui avait failli les dévorer tout crus.

- Je suis bien chez M'sieur Barnes ?